Une dette envers mon pays

Une dette envers mon pays

En grandissant dans les quartiers défavorisés de Douala, au Cameroun, j’ai appris à compter sur mes camarades pour sillonner les rues accidentées où nous jouions au football. A leurs côtés, j’ai découvert le sens des mots « camaraderie » et « compassion ». Avec les adultes, cependant, j’ai appris ce que signifiait guider, conseiller, épauler et, parfois, punir pour avoir désobéi. L’environnement dans lequel j’ai grandi donne tout son sens au proverbe « Pour élever un enfant, il faut tout un village ». Cet apprentissage m’a permis de m’adapter aux difficultés, une qualité qui s’est révélée très précieuse lorsque, âgé de 16 ans, je suis parti en Europe pour jouer au football.

J’aurais pu ne jamais y arriver. Enfant, j’ai été victime d’un nombre incalculable de crises de paludisme qui auraient très bien pu me coûter la vie. Mais j’ai été dans le camp des chanceux, contrairement aux millions d’enfants que la maladie a tués dans mon pays et partout en Afrique. De plus, j’ai grandi dans les années 1990, à une époque où rien ne semblait pouvoir arrêter le sida. Dans mon pays, j’ai vu des gens mourir et des communautés entières vaciller sous les assauts de la maladie.

J’aurais très facilement pu compter parmi les victimes dans ma communauté. J’ai appris à apprécier ma chance et à me demander comment m’acquitter de cette dette — comment jouer un rôle dans la lutte contre ces maladies et contre d’autres encore. Je suis un joueur de football et non un médecin ou un spécialiste en santé publique. Pourtant, j’espère contribuer à la victoire en faisant équipe avec d’autres.

J’espère apporter ma pierre à l’édifice en racontant mon histoire et, plus important encore, celle des personnes touchées par ces maladies. Ces histoires sont multiples. Elles parlent de jeunes filles qui ont vécu et qui sont devenues médecins, ou encore enseignantes ou agricultrices, ciments de leurs communautés. Elles parlent de garçons comme moi qui ont survécu à ces maladies et qui ont pu jouer au football, ou pratiquer d’autres sports à un niveau international, avant de revenir pour changer les choses dans leurs communautés et en dehors. Ces hommes et ces femmes n’ont pas seulement vaincu la maladie ; ils et elles sont devenus des agents du changement pour nos pays.

Endosser le maillot de mon pays, faire partie de ces « Lions indomptables », a toujours été un très grand honneur, l’occasion de rembourser ma dette envers les personnes qui m’ont construit. J’espère faire profiter le Cameroun et l’Afrique de mon expérience en soutenant le Fonds mondial, qui a contribué à sauver plus de 17 millions de vies dans le monde. Le football est un puissant instrument, un langage qui se joue des frontières et que nous pouvons utiliser pour combattre des maladies infectieuses qui, elles non plus, ne connaissent aucune frontière. Pour remporter la victoire, il faudra que tout le monde joue collectivement. C’est pour cette raison que je m’engage sur le terrain de la santé internationale. Je veux jouer un rôle de premier plan, être un nouvel attaquant dans cette mission d’urgence.

Samuel Eto’o

Joueur de football (Cameroun).

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici