Sénégal : Des photographes en campagne pour combattre le mépris du chef de l’État vis-à-vis des photographes sénégalais.

Qui va se réjouir si le chef de l’État Sénégalais nommait un expatrié français, ministre? Les photographes sérieux, pionniers de la photographie sénégalaise, « boycottent la campagne du président sortant. » De Senghor à Wade en passant par Diouf, aucun chef d’État dans l’histoire du Sénégal, n’a osé choisir un expatrié français, photographe officiel de la présidence. Dans une lettre adressée à ces collègues, Mahtar Licka, un des pionniers de la photographie sénégalaise, relate « À Boubacar Touré Mandemory et aux collègues photographes!
Le président de la République du Sénégal nous a signifié son mépris en choisissant un photographe étranger. C’est un outrage et une trahison à l’égard de toute la corporation des photographes sénégalais et africains.
Maintenant que nous avons fait ce constat amère, nous devons agir ensemble afin que de tels faits ne se reproduisent plus jamais.
Mbindiou canam borom mokoy fathe! Bien sûr, nous devons boycotter la campagne électorale de Macky Sall!
Nous sommes en mesure de lui démontrer la puissance et le rôle primordial de la photographie dans la marche du pays en étant solidaires et disciplinés.
Ils nous appartient de saisir cette occasion pour enfin organiser notre corporation. Nous devons mettre en place un syndicat et des règles juridiques qui régissent notre profession. Il est grand temps! » Son collègue Boubacar Touré Mandemory de répliquer « Nommer aux emplois civils et militaires relèvent de la compétence constitutionnelle du Président élu par les Sénégalais. Soit. Mais encore il reste bien entendu que lesdites nominations visent ceux-là mêmes qui élisent le Président et qui par leurs impôts et les différentes taxes dont ils s’acquittent payent directement le financement des institutions et de la première parmi elles.
Le Président de la République est également, c’est une disposition constitutionnelle, le « Protecteur des Arts, des Lettres et des Artistes »
Notre monde est désormais un territoire ouvert ou tous ont le droit de faire valoir leurs compétences. Par conséquence, je ne suis absolument pas militant d’un quelconque ostracisme ou nationalisme étroit.
Au nom de tout ce qui précède, je suis en droit de demander quelle incompétence on reproche aux photographes sénégalais pour les déresponsabiliser du service photo de la Présidence de la République au profit d’un expatrié qui n’est pas, loin s’en faut, mieux indiqué que nos photographes pour proposer au monde les images du Chef de notre Etat. C’est quasi une affaire de souveraineté nationale. A la limite, j’aurai compris -et accepté – que l’expatrié en question fut choisi à la suite d’un appel à candidature. Si à cette occasion, il se serait révélé plus doué que les talents nationaux, qui, ailleurs, font la fierté du Sénégal, je me serais incliné sans aucun problème. Mais, il n’en est rien. Sa cooptation est une nébuleuse dont je ne peux parler puisque j’en ignore les tenants et aboutissants. Ce qui m’interpelle, c’est le traitement très peu élégant réservé aux jeunes qui y officiaient et le mépris affiché envers l’ensemble de la profession qu’on semble considérer comme moins que rien, en tout cas indigne de s’occuper de l’image de notre première Institution. C’est grave.
D’autre part, financer, à coups de millions l’exposition d’une consœur, d’un autre pays frère est une excellente chose en soi. Mais s’aurait été bien plus appréciable si les photographes nationaux, qui peinent à trouver des financements bien plus modestes, bénéficiaient aussi de telles largesses.
En tout état de cause, le Chef de l’Etat, Protecteur des Arts, des Lettres et des Artistes nous doit, non pas un regard paternaliste, ce n’est pas ce que nous revendiquons, mais une certaine justice, un certain regard à même de reconnaître et de distinguer la compétence nationale. C’est le cri de cœur fort justifié de cet autre grand artiste, Zulu Mbaye, c’est le nôtre. C’est l’expression de droit de dire afin qu’il nous soit offert de montrer aux sénégalais notre savoir- faire. La reconnaissance internationale dont nous jouissons, dans tous les domaines artistiques, n’aura de sens pour nous qui si et seulement si nos autorités nous accordent une parcelle de cette considération qu’elles distribuent généreusement aux autres.
Avec tout le respect dû à l’incarnation de l’Etat.
P.S : Qu’il soit entendu que ce plaidoyer n’est pas pour me faire une place au soleil. Je n’en ai pas vraiment besoin. Il s’agit de rétablir un droit valable pour les jeunes compétences africaines d’ici et de partout sur le continent. « L’expertise » importée dans ce domaine est un gâchis-qui coûte très chère à nos finances rachitiques- qu’il est temps d’arrêter » a fait savoir le photographe, un des doyens de la photographie du pays qui ajoute : « feu Meïssa Gaye, feu Mama Casset, feu
Sala Casset , feu Doudou Diop, feu
Mix Guéye, feu Baïdy Sow et tous les précurseurs de la photographie au Sénégal, au fond de leur tombe lancent des cris d’indignation. Leur corporation est humiliée. »

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