Ousmane Sonko – Adji Sarr : deux stratégies de communication, différents résultats

Aff. Adji Sarr: Ousmane Sonko
Aff. Adji Sarr: Ousmane Sonko

La commémoration de l’an 1 des émeutes de mars dernier a été l’occasion pour les parties concernées par l’affaire Sweet Beauté de se lancer à des sorties médiatiques. Par presse interposée, Adji Sarr et Ousmane Sonko, ont fait leurs procès, avec chacun un Grand Jury bien défini. Si la masseuse a préféré s’adresser a l’international, pour des raisons purement politiques, le député-maire de Ziguinchor reste ancré sur son « nationalisme » communicationnel. Comme toujours, il s’est servi des supports médiatiques nationaux pour s’adresser aux Sénégalais, les premiers concernés par cette question purement domestique.

La sortie d’Ousmane Sonko, vendredi 11 mars, n’est qu’une réponse du berger à la bergère. Au moment où Dame justice se claquemure dans un agenda difficilement compréhensible, les parties concernées par l’affaire Sweet Beauté, semblent n’en pouvoir plus d’attendre. Depuis plus d’un an qu’il est pendant devant la justice, le dossier ne manque pas de susciter des sorties publiques et médiatiques fréquentes. Depuis la libération d’Ousmane Sonko, le 8 mars 2021, la partie accusatrice fait des communications intempestives, soit par l’entremise de l’avocat Me Elhadji Diouf, soit par le biais des souteneurs de la jeune femme, Adji Sarr, dans le seul but de se mettre l’opinion dans la poche.

Deux communications, même but, différents résultats

Alors que la justice lui a enjoint l’ordre de ne pas communiquer sur le dossier, il y a un an, Ousmane Sonko affirmait qu’il ne resterait pas sans répondre tant que la partie en face se plairait à se prononcer sur l’affaire. Chose promise, chose faite. Et il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que le député et patron de Pastef réponde à la sortie de sa supposée victime, qui est revenue à la charge, sur des médias internationaux. En vérité, les communications coordonnées d’Adji Sarr, et couvertes par des journaux français comme Le Monde, Jeune Afrique et Rfi, pourraient être le facteur déclencheur de celle de l’actuel maire de Ziguinchor, même s’il est connu pour son penchant à communiquer régulièrement. En espérant que la justice vide le dossier, le politicien qui avance qu’aucun juge ne pourrait l’emprisonner, a compris que ce serait une grave erreur de laisser l’espace médiatique à ses détracteurs.

Aussi bien dans le fond que dans la forme, la sortie de la jeune masseuse laisse apparaître un coup ourdi pour entacher la réputation du plus redoutable opposant de Macky Sall. A l’image du Chef de l’Etat qui réserve ses plus grandes communications à la presse étrangère, Mlle Sarr a pu décrocher le sésame en se faisant couvrir par trois grands supports français qui ont de l’influence en Afrique. Pour ces médias concernés, il ne s’agit pas ici d’une simple obligation d’aller à la recherche de la bonne information. Ce dont il est question, c’est plutôt d’une opération de communication visant à vendre la version de la plus populaire des jeunes masseuses. Cependant, la campagne de diabolisation d’Ousmane Sonko n’a pas donné l’effet escompté du moment où la quasi-totalité des followers de ces médias ont rejeté les « déballages » de la cliente de maître Diouf.

Opinion nationale ou internationale, deux audiences différentes et sciemment choisies

 « La communication, c’est comme la chirurgie esthétique, quand ça se voit, c’est que c’est raté », avait coutume de dire Gérard Colé, communicant de François Mitterrand. Sur la sortie d’Adji Sarr, aussi bien pour ce qui est du contenu du message, des canaux de diffusion, que du timing, tout prête à un plan de communication conçu pour liquider un adversaire. Cependant, les concepteurs qui s’attendaient à une levée de boucliers contre le député-maire, ne doivent pas être satisfaits du résultat. Malgré les moyens déployés et des preuves publiées, si tant est qu’il y a des preuves de viols, les Sénégalais se sont déjà faits leur religion sur ce dossier qu’ils considèrent en majorité comme une simple tentative de « réduire l’opposition à sa simple expression ».

Là où Ousmane Sonko dame le pion à la partie adverse, c’est d’abord et avant tout le choix de l’audience dans son adresse d’hier. En passant par des médias comme Walfadjiri et Sud Fm, réputés pour leur contribution à la consolidation de la démocratie au Sénégal, le leader de Pastef montre qu’il ne s’adresse pas à l’opinion internationale. Après tout, une question domestique, quand bien même elle concerne une personnalité politique de premier plan, doit avoir comme destinataires les populations locales au premier chef. L’intérêt et la réussite de sa sortie se mesurent d’ailleurs à l’aune de l’audience qu’elle a suscitée sur les plateformes concernées.

Peu de moyens pour un si grand impact

En attendant que le juge vide le fond du dossier, Ousmane Sonko a gagné la manche de la Communication. Il tient toujours le pavé à ce propos, c’est un produit qui se vend sans difficulté au niveau des médias. D’ailleurs on n’a pas besoin de voir les dizaines de milliers de personnes qui l’ont suivi en direct pour avoir la confirmation que le maire de Ziguinchor est la personnalité politique dont les sorties sont les plus scrutées au Sénégal. Un constat qui fait que l’homme n’a pas besoin de mettre des moyens financiers importants, comme aurait pu le faire Adji Sarr, pour disposer d’un temps d’antenne à même de lui permettre de dire le fond de sa pensée.

La réalité, aujourd’hui, est que la communication de la protégée de Me Elhadji Diouf fond comme du beurre sous le soleil de la sortie de son fameux « bourreau ». En effet, la perception que le public a du message envoyé ne dépend pas que du seul contenu, qui est le plus souvent manipulé à l’envi. On ne saurait faire abstraction de la personnalité de l’auteur dans ce genre de campagne, et sur ce plan, il n’y a vraiment pas matière à comparaison. De plus, l’implication personnelle- pas que professionnelle- de l’avocat de l’accusatrice n’arrange en rien celle-ci, qui sortira  coup sûr comme la plus grande perdante dans cette affaire.

Par Khalifa Ababacar Gaye/SeneNews

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