Le footballeur s’est ému des difficultés que rencontrent certains de ses coéquipiers alors que le sujet est encore très tabou dans ce sport.
Olivier Giroud veut s’atteler à faire « changer les regards négatifs sur les joueurs de foot ». C’est ce que l’attaquant de Chelsea nous confiait en mai dernier dans une longue interview où il parlait notamment de ses engagements humanitaires. Depuis, il n’hésite pas à accorder des entretiens pour parler de sujets de société et d’humain, bien au-delà de sa passion du foot. En septembre par exemple, il avait poursuivi l’introspection auprès du Parisien, en évoquant sa religion et ce qu’elle lui avait apporté dans le jeu. Ce jeudi, Olivier Giroud ouvre un autre dossier qui lui tient visiblement à cœur, l’homosexualité.
Interrogé par Le Figaro sur les moments forts de sa carrière, le champion du monde a souhaité se remémorer ce qu’il avait ressenti au moment du coming out du joueur allemand Thomas Hitzlsperger. Un sujet qu’il estime encore trop tabou dans son sport. C’était en 2014, et « c’était fort en émotion », se souvient le quatrième meilleur buteur de l’histoire des Bleus. « C’est là où je me suis dit qu’il était impossible d’afficher son homosexualité dans le football », regrette-t-il avant d’essayer d’en analyser les raisons. « Dans un vestiaire, il y a beaucoup de testostérone, de chambrage, les douches collectives… C’est délicat mais c’est comme ça. »
« C’est une vraie épreuve »
Olivier Giroud semble alors vouloir parler du problème pour ses coéquipiers gays de vivre leur passion tout en s’assumant. « Je comprends la douleur et la difficulté des gars à faire leur coming out, c’est une vraie épreuve après un travail sur soi pendant des années. »
Pour sa part, le joueur de Chelsea se sent investi d’une mission pour faire bouger les lignes. « Je suis ultra-tolérant là-dessus », explique-t-il d’abord, sans réaliser que ce terme risque d’offusquer les homosexuels qui n’apprécient guère l’idée que la société doit « tolérer » leur orientation sexuelle plutôt que simplement l’accepter comme aussi normale que l’hétérosexualité. Mais le footballeur de poursuivre, a priori de bonne foi : « Quand j’étais à Montpellier je m’étais engagé dans ce combat en faisant notamment la Une de Têtu, à Arsenal quand ils m’ont demandé de porter les Rainbow Laces(des lacets arc-en-ciel, ndlr) en soutien à la communauté gay, je l’ai fait », rappelle-t-il. Mais « il y a encore beaucoup de travail dans le monde du foot sur ce sujet, c’est le moins qu’on puisse dire ! »
Griezmann regrette « les insultes »
L’an dernier, son coéquipier du mondial Antoine Griezmann avait également regretté ce tabou dans le foot. Dans une interview au quotidien espagnol El Pais, l’attaquant français de l’Atlético de Madrid avait même estimé qu’il y avait « beaucoup de mauvaises personnes dans le football » et que les joueurs homosexuels « peuvent avoir peur d’aller dans les stades et avoir peur des insultes ».
« On nous demande d’être durs et forts et nous avons peur de ce qu’il pourrait se dire. Les joueurs ne sortent pas du placard parce qu’ils ont peur », avait-il insisté. A la question de savoir si lui-même ferait son coming out s’il était gay, le joueur avait aussi expliqué qu’il « pensait » qu’il « le ferait ». Mais de convenir : « Bien sûr, c’est plus facile à dire que quand on est soi-même exposé. »
Rare sont en effet les joueurs qui ont osé franchir le pas, et plus encore avant la retraite. L’Anglais Justin Fashanu avait par exemple révélé son homosexualité dans les années 1990. Mais il s’est suicidé en 1998 après avoir été pris pour cible par ses pairs et des supporteurs. Les choses ont depuis évolué au Royaume-Uni – où la Fédération anglaise avait lancé l’idée d’un coming-out collectif l’an dernier ! – comme en France mais le foot reste encore très hermétique à ce genre de révélations.
Un seul Français a franchi le pas
Outre l’Allemand Thomas Hitzlsperger, qui a attendu d’être retiré des terrains, le Français Olivier Rouyer avait avant lui franchi le pas en 2008, une vingtaine d’années après avoir pris sa retraite sportive mais alors qu’il continue à intervenir dans des médias. Cet été, il confiait au magazine So Foot sa crainte que cela ait pu compromettre sa carrière de joueur : « C’est pour ça qu’on triche. Pourtant je n’étais jamais avec une femme, ni marié. C’est comme ça. Je ne faisais de mal à personne bordel ! J’essayais d’assumer ma vie, faire mon boulot du mieux possible. Il y avait peut-être une dose d’inconscience mais il était naturel pour moi, même sans le dire, que je vive ma vie. Ce qui m’a étonné, c’est qu’aucun footeux n’est venu me voir pour me dire : Je suis homo comme toi mais je me cache. Certains ont peur, d’autres sont tendus… »
Olivier Rouyer, qui a secrètement entretenu une longue relation à l’époque, veut croire que les choses ont changé : « Je me dis quand même que si j’avais été joueur aujourd’hui, gay, en équipe de France, comment aurais-je été regardé si mon compagnon était dans les tribunes avec les compagnes des autres ? Ce serait génial en termes d’ouverture d’esprit et de compréhension ! » Mais de préciser : « Ce qui me met toujours en colère, c’est qu’au niveau de la Fédération et de la Ligue, on ne fait rien. »