Menace terroriste : Peur sur Dakar

L’ère de l’insouciance paisible semble révolue à Dakar. Du Plateau aux Almadies, en passant par le Sea Plaza, haut lieu de la consommation, les populations vivent sous le spectre d’une attaque terroriste.

Depuis un bon moment, un dispositif sécuritaire exceptionnel a été mis en place dans les grandes artères, avenues et hôtels de la capitale. Ces lieux, en effet, demeurent les cibles potentielles des djihadistes. Le ministère de l’Intérieur a décidé d’être d’une grande fermeté sur ce sujet. « Les hôtels qui ne respecteront pas les consignes de sécurité risquent d’être fermés », a averti Abdoulaye Daouda Diallo, qui a mis à contribution les populations afin qu’elles signalent tout individu jugé suspect. Déjà, un peu plus de 900 personnes ont été interpellées dans les opérations de sécurisation entre Dakar et Thiès, au cours du week-end dernier, pour « vérification d’identité ». Près de 28 000 véhicules saisis. Signe que la menace est prise très au sérieuse au plus haut sommet de l’État. Et le quotidien des dakarois a été complètement chamboulé.

« Vous me faites peur?! » Devant l’entrée du Sea Plaza, une ressortissante étrangère d’origine africaine, qui se fait fouiller, est sur le point de céder à la panique. « Stp, rangez votre arme. Vous me faites peur », demande-t-elle au policier en faction. Depuis quelques jours, le centre commercial le plus visité de la capitale, désigné comme potentielle cible d’attaques des terroristes, est placé sous haute surveillance policière.

La boue au ventre…

C’est la boue au ventre que Amadou (nom d’emprunt) vient chaque matin au Sea Plaza. L’hôtel est quadrillé par les éléments de police, mitraillette à la main. Chaque entrée est filtrée. Les sacs fouillés. Les véhicules systématiquement passés au détecteur de métaux. « Beaucoup de nos clients ont fui à cause des fouilles. Au restaurant, ce ne sont que quelques clients qui sont là à la pause. On ne voit plus l’affluence que l’on voyait avant », explique cet employé du centre commercial qui préfère ne pas trop s’avancer en commentaires. « Nous ne sommes pas autorisés à faire de commentaires sur ça, nous souffle un employé. Il vous faudrait une autorisation de l’administration d’abord ». L’accès au Radisson Blu est encore plus difficile. Un policier encagoulé, armé, casque composite sur la tête, gilet pare-balle bien en place, est en poste devant le complexe. Les véhicules ne sont plus autorisés à se garer devant l’entrée principale pour déposer les clients. Des sortes de colonnes de Buren, détecteurs de métaux en même temps, sont levées en guise de balises pour empêcher aux voitures d’avoir directement accès à l’hôtel.

Un peu plus loin, aux Almadies, même dispositif sécuritaire. Des gendarmes armés sont postés à chaque rond point. À l’hôtel King Fahd, la fouille des véhicules est systématique. Un véhicule de gendarme est garé un peu plus loin vers la pointe des Almadies. Alioune, vendeur de café, préfère ne pas se prononcer sur le sujet. Sur un ton assez sec, il nous envoie balader. « Ici, rien n’a changé. Je viens normalement au boulot. Et nous ne craignons rien ici. », dit-il expéditif. Le monument de Wade n’échappe pas non plus à la vigilance des agents de sécurité. Une grille de sécurité a été placée devant le Monument de la Renaissance africaine. Là aussi, le modus operandi est le même. Les voitures sont arrêtées et fouillées. « Cela risque de faire fuir la clientèle », confie un marchand d’art qui tient boutique sur le site du Monument depuis 2010. « Pour le moment, les touristes continuent de venir. Il faudra attendre le week-end pour savoir si réellement les habitudes ont changé ou pas. Ce sont les vendredis, samedi et dimanche où les touristes viennent le plus. Avec ces fouilles et ces barrages, ils risquent de prendre peur et de s’en aller », explique-t-il. Malgré la peur et l’angoisse, Youssou n’abandonne pas son commerce dans ce coin huppé de la capitale. « Nous avons peur. Nous ne sommes pas rassurés, mais je ne veux pas céder à la panique. Je ne veux pas y penser. Si ça doit arriver que cela soit une surprise. Je ne peux pas vivre en ayant à l’esprit continuellement cette hantise », confie-t-il. En attendant, il s’en remet au Bon Dieu. Sur place, une ressortissante française dédramatise : « On ne peut pas s’arrêter de vivre à cause des terroristes. Je m’interdis d’arrêter de circuler parce qu’il y a des menaces dans tel ou tel autre pays. Ils nous ont trouvés dans notre pays, en France, et nous ont attaqués. La France est mieux armée que le Sénégal et cela ne les a pas empêchés de nous atteindre. S’ils doivent le faire ici, ils le feront. En attendant, on profite bien de la vie ». Même pas peur?!

Au plateau, l’atmosphère semble moins lourde. Mais, là aussi, les consignes sont les mêmes. La présence des forces de sécurité a été renforcée devant les hôtels, ministères et autres édifices bancaires. Les grandes entreprises ont aussi discrètement renforcé leur sécurité. Monument, hôtels, grands magasins, banques, restaurants… le niveau de sécurité a été considérablement relevé. Après les attentats de Paris en novembre 2015, Bamako et Ouagadougou, Dakar semble prête à faire face à une attaque. Mais, la psychose d’être une future victime par le hasard d’un lieu trouble le sommeil de bon nombre de Dakarois.
 

 Seneweb.com

 

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