Limites des corps de contrôle (ARMP, OFNAC, IGE, COUR DES COMPTES…): les explications du Pr Sakho

Limites des corps de contrôle (ARMP, OFNAC, IGE, COUR DES COMPTES...): les explications du Pr Sakho

Dans le cadre du dossier que nous publions ce lundi 15 janvier, Sud Quotidien a posé une seule question au Professeur Abdoulaye Sakho de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar : Quelles sont les limites des organes de contrôle au Sénégal. Voici sa réponse.

«Pour moi les limites de l’activité des corps de contrôle ne sont ni dans le cadre juridique et institutionnel ni dans les procédures. Elles sont plutôt dans la «pratique» du contrôle. Je peux prendre deux exemples.

Le contrôle porte plutôt sur les hommes et non sur le système.

A l’observation de la manière dont sont conduites les procédures de contrôle chez nous, on a l’impression que la fonction de contrôle est complètement dévoyée dans plusieurs cas au Sénégal. En effet, telle qu’elle est pratiquée dans certains cas, elle semble plus porter sur l’homme que sur le système. Or, pour moi, dans l’évaluation ou dans le contrôle normal d’un système, les hommes doivent être le dernier maillon à regarder si, bien sûr, on veut faire un examen objectif dans le but d’améliorer le fonctionnement du système et éviter, au cas où on trouverait des anomalies, que cela ne se reproduise plus jamais.

Entendons nous bien, je ne demande pas du tout d’absoudre les hommes du contrôle, mais plutôt de faire en sorte que le contrôle serve à bannir à jamais le comportement humain jugé répréhensible.

Il ne faut donc pas, pour les corps de contrôle, pas venir contrôler une entreprise en ayant à l’esprit les sanctions ou la «volée de bois vert» que l’on va infliger aux hommes qui y sont, mais plutôt un bon diagnostic de l’organisation et du système. De ce point de vue, le contrôle doit commencer par le cadre institutionnel et juridique, puis par les outils et les procédures et enfin par les hommes.

Si on arrive à procéder de la sorte, il y a de fortes chances qu’un bon diagnostic soit établi et que les hommes deviennent une circonstance relativement minime dans le fonctionnement de l’institution.

Regardez au Sénégal comment on a l’impression de vivre un éternel recommencement en matière de contrôle : il arrive que des personnes soient sanctionnées dans une entreprise et, quelques années plus tard, on sanctionne d’autres personnes pour des faits similaires dans la même entreprise. Cela ne montre-t-il pas que le contrôle porte plus sur l’homme que sur le système ?

Moi, en tout cas, j’ai l’impression que c’est cela. Je crois que les contrôleurs et leurs organismes ne doivent pas servir d’autres desseins.

La perception «négative» du contrôle dans l’opinion

Par ailleurs, il me semble que la perception que l’on se fait du contrôle impacte négativement sur son efficacité. Oui, dans un pays dont les institutions reposent sur la séparation des pouvoirs, il est important d’informer sur le fait que les résultats des corps de contrôle ne sont pas forcément les résultats définitifs.

Ces corps de contrôle appartiennent généralement au domaine du pouvoir exécutif et certains sont même sous soumis à la hiérarchie administrative.

Dans notre pays, la séparation des pouvoirs confie au seul pouvoir judiciaire les condamnations définitives. Malheureusement, ici dès que le contrôleur «épingle» quelqu’un, il est considéré comme coupable et si par la suite la justice sort un verdict différent, cela pousse à des interrogations sur l’objectivité de l’une ou l’autre des décisions rendues soit par le contrôleur soit par le juge.

Ce fait ne milite pas du tout pour la sérénité dans la fonction contrôle au Sénégal. Du coup, on donne l’impression qu’on épingle en fonction des besoins et non dans le but de l’amélioration d’un système.

Attention, je ne généralise pas et je considère que les hommes en charge du contrôle sont généralement intègres que ce soit dans la justice ou dans les structures de contrôle relevant de l’administration qu’elles soient autonomes ou pas».

avec Sud Quotidien

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