L’Etat, otage des lobbies

Faut il s’en réjouir ou s’en alarmer ? La forte présence d’hommes d’affaires et de capitaines d’industrie dans l’entourage présidentiel est une caractéristique principale du régime de Macky Sall. Jusque-là en marge des cercles du pouvoir, ils sont à présent au cœur d’une institution comme la présidence. Certains sont même investis de fonctions officielles. Qui sont ils ? Quelle est la nature de leurs relations avec le Président ? Des connexions que certains trouvent utiles au Président, mais qui sont troublantes pour d’autres voire dangereuses pour les alarmistes.

Lors de son premier mandat, très vite, quelques nominations pour le moins surprenantes ont fait craindre des conflits d’intérêt au niveau de certaines sphères de l’Etat, y compris le Palais. Il en est ainsi du choix de Diagna Ndiaye comme ministre conseiller auprès du président de la République. Diagna Ndiaye, c’est connu, est le bras droit et l’homme de confiance du patron de la Compagnie sucrière sénégalaise Jean Claude  Mimran. Très introduit dans les milieux des affaires, il est réputé être un grand défenseur-et c’est très normal-des intérêts du puissant groupe Mimran dont il est l’administrateur principal.

Ce qui surprend en revanche, c’est qu’il ait accepté à Macky Sall ce qu’il a toujours refusé aux régimes précédents. S’il a donné son consentement pour être revêtu de ce titre officiel c’est parce que donc pour une fois, il y trouvait vraiment son compte en tant défenseur du groupe Mimran. En plus à l’époque il avait en ligne de mire Abdoul Mbaye  à qui on a vite prêté l’intention de chercher à casser le monopole du groupe Mimran sur le sucre et la farine. Suffisant pour que l’homme de confiance de Mimran entre en selle pour, entre autres objectifs, le faire débarquer de la station primatoriale. Mission qu’il a réussie d’ailleurs.

Baba diao a été également nommé Conseiller spécial du Président Macky Sall. Le richissime patron d’ITOC a bâti sa fortune dans le pétrole. Cultivant la discrétion, l’homme n’a été propulsé au devant de la scène que par la crise énergétique qui avait plongé le Sénégal dans le noir, il y a quelques années. D’ailleurs on le suspecte d’avoir provoqué cette crise pour ébranler le régime de Wade. Et on a connu les émeutes de l’électricité. Bref très puissant il lui suffit de bloquer ses importations de combustible ou de gaz butane pour plonger le pays dans une crise profonde.

C’est donc naturellement que Baba Diao a été parmi les premières personnalités à avoir été reçu par Macky Sall. Une audience qui a eu lieu le 31 mars 2012. Sa déclaration à sa sortie a été claire «  Je suis prêt à accompagner le Président Macky Sall dans sa politique. J’ai été reçu  pour lui apporter les orientations prioritaires » Deux semaines après, il sera nommé Conseiller spécial. Seulement, on lui a prêté lui aussi des relations tendues avec l’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye, qui aurait voulu libéraliser le secteur du gaz pour parer aux ruptures récurrentes que les sénégalais ont connues ces derniéres années. Or Baba Diao Conseiller spécial de Macky Sall va-t-il suggérer u jour au Président de casser le monopole du secteur de l’énergie que sa société ITOC détient pratiquement ? Difficile d’y croire

La présidence, c’est également le lieu de refuge d’hommes d’affaires comme Harouna Dia, le supposé bailleur de Macky SALL , Abdoulaye Saly Sall qui avait été cité dans l’affaire de blanchiment d’argent qui avait valu au président de l’APR une convocation à la police. De même que Kalidou Wagué, un homme d’affaires crédité d’une fortune estimée à prés de 20 milliards.

Autre particularité du régime de Macky Sall : le recyclage d’hommes d’affaires que l’opinion publique, après être émue de leur fortune bâtie en un temps record sous Wade, voyait déjà emprunter le chemin des tribunaux. Et l’on s’interroge encore sur la maniére avec laquelle ils ont réussi à noyauter le système au point de partager la table du président ou de ses proches.

 

Une « gestion sobre et vertueuse » voilà ce que Macky Sall avait promis au Sénégalais. Mais sa gestion peut elle être vertueuse avec autant de conflits d’intérêt au cœur même de la Présidence, clé de voute des institutions ? Peut-il réellement concilier les intérêts privés et Publics. Le doute est permis. Macky Sall aura –t-il le courage de faire le grand ménage pour son second mandat ?

A compter de jeudi notre confrere de Dakarmatin vous propose le portrait de certains hommes d’influence qui contrôlent le système.

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