Les États-Unis étendent leur présence militaire en Afrique

Le site d’information Vice publie des documents déclassifiés de l’armée américaine qui démontrent la présence croissante d’opérations spéciales menées par les États-Unis sur continent africain dans le cadre de sa lutte antiterroriste.

La présence militaire des États-Unis en Afrique est aussi discrète que tentaculaire. Le pays a établi son unique base permanente à Djibouti, « hub » de ses activités militaires dans la Corne de l’Afrique où sont stationnés environ 4 000 soldats. C’est de là que décollent les drones qui visent Al-Qaïda dans la péninsule arabique au Yémen et contre les Shebab en Somalie. Les États-Unis disposent également de 13 bases « secondaires », selon la dernière communication du Commandement américain pour l’Afrique (Africacom) devant le Congrès américain, ainsi que d’une trentaine de bases plus modestes, et surtout plus discrètes, qui peuvent se matérialiser par un simple hangar.

Des documents déclassifiés, émanant du Commandement des opérations spéciales américaines (Socafrica) dévoilés par le site Internet Vice, démontrent que si cette présence est discrète, elle n’en est pas moins en expansion. En 2006, seulement 1 % des soldats rattachés à ce Commandement, déployés à l’étranger, se trouvaient en Afrique. En 2010, ce nombre est passé à 10 %, bondissant à 17 % en 2016. En volume, cela représente 1 700 militaires disséminés dans une vingtaine de pays où ils mènent une centaine de missions concomitantes. Cette donnée place l’Afrique juste après le Moyen-Orient en matière d’opérations spéciales menées par les États-Unis.

« Ces soldats ne sont pas déployés en permanence sur le sol africain, nuance Nicole Vilboux, chercheuse associée à la Fédération de recherches stratégiques, spécialiste des États-Unis. Ils agissent par petits groupes et sont extrêmement mobiles d’un pays à l’autre. » Leur mission ? Aider les partenaires africains des États-Unis dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme. « Ils font principalement de la formation et de l’appui logistique », précise Nicole Vilboux. Un appui qu’ils apportent notamment à l’opération française Barkane dans le Sahel, précise le directeur de recherche à l’Iris en charge de l’Afrique, Philippe Hugon.

Une cinquantaine de groupes terroristes répertoriés

Cette augmentation de la présence américaine va de pair avec la multiplication de groupes terroristes et milices armées répertoriés par les États-Unis en Afrique. La Socafrica en compte une cinquantaine aujourd’hui, contre seulement cinq « groupes terroristes majeurs » en 2012.

« Les défis auxquels est confrontée l’Afrique pourraient créer une menace qui surpasserait celle à laquelle les États-Unis font actuellement face à cause des conflits en Afghanistan, en Irak, et en Syrie », estime dans ce rapport déclassifié le commandant de la Socafrica, Donald Bolduc. Un propos de l’ordre du « fantasme », estime cependant Philippe Hugon. Selon ce chercheur, la seule vraie menace pourrait émaner du groupe État islamique en Libye.

La Libye et la Somalie sont les deux pays du continent où les soldats américains seraient susceptibles de mener des opérations qui dépassent le cadre de la formation et de l’appui. La mort d’un soldat américain à une soixantaine de kilomètres de Mogadiscio, mi-avril, blessé lors d’une opération contre les insurgés islamistes shebab, témoigne de cet engagement sur le terrain. Une perte qui est intervenue moins de deux semaines après l’annonce par Donald Trump de l’envoi de troupes supplémentaires dans le pays, officiellement pour conseiller et assister les forces somaliennes. Cet envoi supplémentaire n’ouvre cependant pas la porte à une augmentation massive des soldats américains en Afrique, selon Nicole Vilboux. Donald Bolduc insiste sur un fait : « Les États-Unis ne sont pas en guerre, ce sont ses partenaires africains qui le sont. »
source: France24.com

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