«La cupidité, le vol, l’injustice, l’impunité, la corruption sont à un niveau jamais égalé »

Comme à l’accoutumée, imam Tafsir Babacar Ndiour de la grande mosquée Moussanté de Thiès, a servi un sermon de feu aux fidèles, à la suite de la prière de Tabaski. il s’est insurgé contre le bradage foncier, la destruction de l’environnement et du cadre de vie, avant d’affirmer, que « la cupidité, la duperie, la perfidie, le vol, l’injustice, l’insouciance, l’indiscipline, l’impunité, la corruption sont dans le pays, à un niveau jamais égalé.»

La communauté musulmane de Thiès a célébré à l’unisson, l’Aïd El Kébir. A la grande mosquée Moussanté, c’est l’Imam Tafsir Babacar Ndiour qui a dirigé la prière des deux rakas. A cette occasion, il a dénoncé les tares de la société, avant d’appeler tous les musulmans à un retour à Dieu. Il s’est insurgé contre le bradage foncier, la destruction de l’environnement et du cadre de vie, etc. Parlant du foncier, il s’est interrogé sur le fait que des milliers d’hectares soient attribués à un seul individu, là où de paisibles citoyens éprouvent toutes les peines du monde à avoir un toit. Et souvent ditil, le bénéficiaire de ces milliers d’hectares finit par les morceler en parcelles, pour ensuite les vendre. L’Imam a ensuite mis le bénéficiaire et le donateur dans le même sac de la tortuosité. D’après lui, la spéculation foncière est telle qu’on a l’impression qu’il y a une volonté de se partager les 197.000 km2, qui constituent la superficie du Sénégal. Selon lui, la terre appartient à ceux qui la travaillent et ceux qui viennent de l’étranger ne doivent en aucune manière avoir des titres de propriété foncière dans le pays.

Sur les questions d’environnementales, il a affirmé que l’arbre occupe une place primordiale dans la vie de l’individu et c’est pourquoi nul n’a le droit de le détruire. Aujourd’hui, dit-il, la destruction de l’environnement est devenue la règle, à cause seulement de la quête acharnée de l’argent et une grande mafia se meut autour de ce sinistre commerce. Il est même très fréquent de voir un arbre de plus de 300 ans, qui est déraciné en moins de 30 minutes par un homme âgé de moins de 30 ans et avec ce geste, c’est toujours un couvert végétal qui est transformé en véritable désert. Dans ce même sillage, il a insisté sur l’importance des espaces verts, avant de dénoncer la disparition de celui qui se trouvait juste en face de la mosquée Moussanté avec un jet d’eau et bancs publics, mais dont le site abrite aujourd’hui des cantines. Il en est de même dit-il, pour la Place de France juste en face de l’hôtel de ville, avec sa verdure, son jet d’eau, son monument aux morts visible de loin, mais aujourd’hui elle est transformée en espaces de loisirs et de commerces, appartenant à des privés.

L’Imam a également évoqué le problème des gazelles oryx, protégés à travers le monde. Avec cette affaire dit-il, c’est comme si chacun fait ce qu’il veut dans ce pays, au point de pousser la cupidité, la duperie, la perfidie, le vol, l’injustice, l’insouciance, l’indiscipline, l’impunité, la corruption à un niveau jamais égalé. C’est pourquoi à ses yeux, chacun fait ce qu’il veut, malgré les rapports de l’Inspection Général d’Etat (IGE), de l’Office National de lutte contre la Fraude et la Corruption (OFNAC), de la Cour des Comptes, de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI). Les injures proférées dans l’espace public ont également attiré l’attention de Tafsir Babacar Ndiour qui estime qu’elles constituent une réponse, une réaction injurieuse à un acte ou un fait injurieux malveillant et déplaisant. Il a cependant dénoncé ceux qui les ont publiées. Sur un autre registre, il a déclaré : « la présence de la statue de Faidherbe, qui a combattu nos parents et grands-parents ne se justifie plus. L’histoire doit être rangée dans les musées. L’aide au développement apportée aux africains par les européens relève-t-elle d’un problème de conscience, d’une ristourne ou d’une véritable aide ? Si le procès de l’esclavage, de la colonisation avait été fait, l’Europe indemniserait l’Afrique avec des sommes très élevées, qui engloutiraient même la dette du continent. Nous savons tous que les pays riches consacrent une part infime de leurs budgets à l’aide aux pays pauvres, souvent moins de 0,2%. Mais cette aide n’est jamais dénuée d’arrières pensés non louables. Les considérations humanitaires ne sont pas les seuls mobiles à entrer en ligne de compte. C’est souvent des raisons bassement mercantiles, politiques, économiques, monétaires, culturelles ou même de « paternalité », qui déterminent cette aide ».

Pour Imam Tafsir Babacar Ndiour, dans ce contexte de pandémie du coronavirus qui sévit dans le pays et dont personne ne peut prédire la fin, la priorité doit être ailleurs et non à l’usage d’injures pour régler des comptes personnels. Pour lui, la crise sanitaire est telle que tout le monde doit être conscient du danger qui guette, à travers le respect des mesures de prévention. Malheureusement se désole-t-il, le contraire se lit dans le comportement des sénégalais et certains sont même tentés de serrer la main par la force à ceux qui ne veulent pas. Mais selon l’Imam, la vérité est aussi que pour mieux combattre la maladie, il faut d’abord renforcer les capacités de prise en charge dans les structures hospitalières, à travers surtout la mise à disposition de matériels de dernière génération, l’augmentation des lits, l’accroissement du confort. De l’avis de l’Imam, à côté du coronavirus, il y a toujours la menace du paludisme qui fait 450.000 morts par an dans le monde dont 93% d’enfants de moins de 5 ans.

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