Jeu de communication sur un retour improbable : le double langage de Karim, qui conforte la thèse du deal

Depuis son élargissement le 24 juin 2016 par grâce présidentielle, le très taiseux Karim Wade a prononcé trois discours officiels. Pas plus ! Il n’a pas, pour autant, éclairci la lanterne des Sénégalais sur son vrai statut au Qatar et, partant, sur ses chances de se présenter à la présidentielle de 2019. Le fait de dire qu’il a été contrait à l’exil ne l’empêche pas de donner rendez-vous aux Sénégalais pour un retour « à bientôt ». Est-il maître de son agenda? Pour préciser la question, n’a-t-il pas, comme le laissent croire les théories conspirationnistes, signé un protocole secret, comportant une clause additionnelle l’éloignant de la prochaine présidentielle?

La libération de Karim Wade en 2016 a charrié beaucoup de commentaires au sujet d’un protocole supposé secret, sous les auspices du Qatar, préalablement à cet élargissement sur fond d’intrigues politiciennes. Idrissa Seck a parlé de « deal international ».
Jeune Afrique a publié tout un dossier à ce propos, confirmant les théories du complot. Récemment, l’ambassadeur d’Arabie Saoudite au Sénégal, dans un entretien accordé à SEN Tv, a évoqué l’affaire pour enfoncer Dakar et Doha.
La visite de l’émir du Qatar en décembre 2017 dans la capitale sénégalaise n’a pas donné l’occasion à une conférence de presse conjointe des deux États ou à un communiqué pour lever un coin du voile sur le statut de Wade-fils.

Si au lendemain de cet élargissement les protagonistes ont respecté la loi de l’omerta devant couvrir ce mystère, les langues commencent à se délier.

Dès sa première déclaration post-carcérale du 24 juin 2016, Karim Wade lui-même s’adresse à ses souteneurs en des termes qui trahissent le fond de sa pensée. « Mon vœu le plus cher était d’aller, dès ma libération, dans nos villages et dans nos villes, à la rencontre des millions de Sénégalais qui m’ont assuré de leur soutien, m’ont accompagné de leurs prières et qui n’ont jamais douté de mon innocence pour les en remercier. J’imagine leur peine mais, malheureusement, les conditions de ma sortie de prison en ont décidé autrement ». Retenez bien le mot « conditions »! Il vaut son pesant d’or dans le champ lexical du deal.

Deuxième acte dans ce processus de dévoilement de la vérité, Me Abdoulaye Wade, en janvier 2017, présentant ses meilleurs vœux au peuple africain, laisse entendre que Karim « a été contraint à un exil forcé au Qatar ».

Un an plus tard, souhaitant bonne année 2018 aux Sénégalais, l’ex-ministre d’Etat donne rendez-vous pour « bientôt au Sénégal ». Il en parle enfin de vive voix. On commence à croire à ce retour, plusieurs fois différé à Pâques et à la Trinité, d’autant plus que le Parti démocratique sénégalais a prévu de tenir son prochain congrès en juin 2018.

Comme pour ajouter à la confusion, présentant ses condoléances suite au rappel à Dieu du khalife général des Mourides, Karim Wade regrette d’avoir été « expulsé » de son propre pays pour prendre le chemin de l’exil.

Une question se pose dès lors : pourquoi a-t-il annoncé son retour « pour bientôt » tout en soulignant qu’il a perdu tout contrôle sur ce come-back?

A travers toutes les déclarations susmentionnées, le fils de l’ex-chef d’Etat ne fait nullement part de ce qui devrait l’empêcher de revenir au Sénégal, selon un agenda précis.

En définitive, les annonces faites par ses partisans et par Karim lui-même sur ce retour ne participent-elles pas d’une stratégie bien élaborée pour différer l’heure de la désignation du plan B du PDS, relativement à la présidentielle de 2019, à quelques mois de celle-ci ?

Dakaractu

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