Le Ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, Mankeur Ndiaye, s’est rendu dans la matinée du mardi 23 juin 2015 à Bissau, porteur d’un message de Macky Sall à son homologue José Mario Vaz, Président de la République de Guinée Bissau. Une arrivée du chef de la diplomatie sénégalaise qui coïncide avec la montée de sérieuses divergences entre plusieurs leaders de la classe politique hétéroclyte bissau-guinéenne dont le chef de l’Etat, le Premier ministre et le Président de l’Assemblée nationale.
Signe de cette tension, Mankeur Ndiaye est arrivé à Bissau juste quelques minutes après que le ministre d’Etat Baciro Dja a remis sa démission au chef du gouvernement, Domingos Simões Pereira avec qui il entretient les relations les moins amicales du monde. Il y a quelques jours en effet, les deux hommes se sont violemment opposés en Conseil des ministres sur l’organisation du pèlerinage à la Mecque. Le Premier ministre Domingos Simões Pereira qui a alors accusé le ministre d’Etat Baciro Dja d’être une taupe du Parti africain de l’Indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) à la présidence lui a simplement retiré le dossier. Ce qui a étonné tout le cabinet puisque les deux hommes appartiennent au même camp. Leurs bisbilles se sont poursuivis ce week-end lors de la dernière réunion du Comité central du PAIGC provoquant la démission du ministre d’Etat Baciro Dja.
Mais ce clash n’est que la partie visible de l’iceberg puisque tout dernièrement, le Président José Mario Vaz est monté au créneau pour humilier Cipriano Cassamá, le président de l’Assemblée nationale en pleine cérémonie officielle d’installation du Conseil d’Etat bissau-guinéen. José Mario Vaz accusait Cipriano Cassamá d’avoir rabaissé la Guinée-Bissau alors qu’il était en visite à Luanda puisqu’il a présenté des excuses publiques au nom de son pays sur des sujets ne relevant pas de ses compétences et sans en avoir l’autorisation. Une façon pour le Président Vaz de marquer son territoire et sa chasse gardée.
Une semaine auparavant, le Président de l’Assemblée nationale Cipriano Cassama déclarait à la presse que « Le président peut dormir tranquille. Je ne suis pas son rival, car si je voulais être le Président de la République je l’aurai été … Je ne suis pas jaloux, je n’ai rien contre mon collègue et ami, mon premier magistrat de la nation, José Mario Vaz. Mais je suis préoccupé par la stabilité de ce pays « , a-t-il déclaré.
Dans ce contexte, l’agitation débordante du Premier ministre Domingos Simões Pereira avec ses tournées fréquentes à l’intérieur du pays inquiète davantage le président Vaz qui n’est pas du même bord que le patron du parlement encore moins de celui du chef du gouvernement.
D’ailleurs, lors du 47ème sommet des Chefs d’Etat de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest (CEDEAO) le Président José Mario Vaz n’a pu cacher son agacement sur l’étroite marge de manœuvre que lui offre l’actuel régime semi-présidentiel Bissau- guinéen. Le fait que le Président Vaz fasse cette confession est un aveu de sa faible emprise sur la conduite des affaires de son pays. C’est aussi un élément révélateur des difficultés de la classe politique bissau-guinéenne à construire un consensus interne menant à la mise en œuvre de véritables réformes politiques.
Autant de signes que semblent décoder certains pays très attachés à la paix et à la stabilité de la Guinée-Bissau dont les Etats-Unis et le Sénégal. C’est ainsi que le ballet diplomatique a été ouvert au cours du Westende par l’ambassadeur des Etats-Unis, James Zumwalt suivi 48 heures plus tard par Mankeur Ndiaye dont le patron est le président en exercice de la CEDEAO.