Les gagnants et les perdants d’un scrutin

Parmi les personnages qui rivalisaient pour les fauteuils de l’Assemblée, d’autres avaient des ambitions beaucoup plus larges, et portées sur un délai de deux ans. Pour ces gens, comme pour d’autres, la participation aux Législatives a été une sorte de clarification quant à l’amour que leur portent les Sénégalais.

Les Législatives ont au moins déjà aidé à faire la part des ambitions des uns et des autres, parmi la pléthore des « leaders » politiques qui ont voulu tester la légitimité de leurs ambitions présidentielles à l’aune de ces élections de parlementaires. S’il était encore prématuré hier soir pour donner la configuration définitive des travées de l’Assemblée de la Place Soweto, on pouvait déjà percevoir qui risquait de n’en pas faire partie. Parmi les premières et les plus spectaculaires chutes, celle du Parrain de Dagana, Oumar Sarr, aura été remarquable. Voilà quelqu’un qui a littéralement régné sur sa ville depuis plus de 20 ans sans interruption, alors que le pouvoir de Abdou Diouf était omnipotent. Il a confirmé son emprise sur sa cité natale au fil des scrutins, jusqu’à en devenir la figure symbolique. Nul ne s’attendait qu’il tombe au détour d’une Législative mal organisée. Ce qui n’est pas le cas de Abdoul Mbaye.

Voilà quelqu’un qui, au sortir de son séjour à la Primature, où il avait atterri par la seule volonté de Macky Sall, a cru pouvoir bousculer celui qui l’a créé politiquement. Comme pour bien d’autres, ces Législatives devaient être l’occasion de confirmer le manteau présidentiel qu’il voulait se tailler. Dans la soirée d’hier, le verdict était impitoyable : trois bulletins dans son bureau de vote de Ngor. On imagine qu’il s’agit du sien et de celui de sa femme et sa belle-sœur puisque, selon lui, sa sœur n’a pu obtenir sa carte d’identité et d’électrice… Et ces 3 voix étaient le plus gros score obtenu dans un centre pour notre « Soldat du Peuple » autoproclamé. Il sera vraiment difficile de renverser la tendance en moins de deux ans pour se présenter à la Présidentielle.

Un qui n’a pas ces soucis, c’est Me El Hadj Diouf, l’autoproclamé « Député du Peuple ». Rien ne garantissait, hier dans la soirée, qu’il sera encore dans l’Hémicycle lors de la prochaine Législature. Au moins, sa robe d’avocat, il ne l’a vraiment ja mais enlevée. Comme lui, un autre politicien qui pourra se consoler assez facilement, et le maire de la commune de Thiès, Talla Sylla. Avoir dans les faits, fait le jeu du pouvoir contre son ancien allié Idrissa Seck, ne lui a pas porté bonheur. Talla n’est pas parvenu à sortir des profondeurs du vote, et n’a gagné dans aucun bureau de vote. Ce qui montre que le meilleur de ce politicien est déjà derrière lui…

La même chose est peut-être également arrivée à un ancien très célèbre ministre de Wade. Cheikh Tidiane Gadio, contrairement à Abdoul Mbaye, ne s’est pas découvert un destin présidentiel lors de ce scrutin. Depuis que Wade l’avait expulsé de ses bureaux de la Place de l’Indépendance, il s’était convaincu que le Destin l’avait désigné pour remplacer « Gorgui » à la tête du pays. Le faux pas de 2012 surmonté, ces Législatives étaient pour lui l’occasion de commencer par imposer une cohabitation à Macky Sall. Mais à l’arrivée, hélas !…

Eux voulaient carrément changer d’Assemblée, en attendant de changer de pays. Les candidats de la coalition Avenir Sénégal bi niou beugue ne semblent pas avoir convaincu les électeurs avec leur vision du futur. Une occasion nouvelle pour ces anciens piliers de la « société civile » que sont l’avocat Mame Adama Guèye ou le sociologue Cheikh Tidiane Dièye, de comprendre enfin ?que les Sénégalais et eux n’ont pas encore la même vision de l’Avenir de ce pays, et qu’ils devraient enfin accepter de prendre tout le temps nécessaire de convaincre les populations, avant d’ambitionner de les guider comme des moutons.

Difficile à dire pour tous ces politiciens si leur destin est forclos après ce dimanche calamiteux de juillet. Ils n’auront pas eu un sourire des plus larges, mais ils pourraient aussi, comme d’habitude, se réfugier derrière le prétexte que le pouvoir aura « tripatouillé les élections« . L’habituelle rengaine, quoi !

D’autres, par contre, auront le large sourire de ceux qui ont misé et gagné gros. Ceux qui peuvent espérer tirer les plus gros profits de leur victoire, relative dans cette élection.

Aïssata Tall Sall n’était pas donnée gagnante face aux gros moyens de la coalition présidentielle. Même s’il n’est pas certain qu’elle remporte le département, elle pourra se consoler d’être encore la Reine de son terroir. De même que Abdoulaye Baldé, le maire de Ziguinchor, que Macky a voulu voir déposer avec fracas. Non seulement il semble avoir renforcé son emprise sur sa ville, mais il serait même en passe, avec son allié Guirassy, de remporter le département de Kédougou ; ce qui serait un joli pied de nez à ses adversaires.

Celui qui, par contre, s’est réjoui du malheur des autres, en plus de la victoire de sa coalition, c’est le président de l’Assemblée nationale sortante, Moustapha Niasse. Ce qui le met en joie, c’est la défaite de son ancien dauphin, El Hadj Malick Gakou, renversé à Guédiawaye, malgré ses rodomontades.

Au moment où Le Quotidien mettait sous presse, on ne pouvait encore donner aucune garantie en ce qui concerne les résultats du département de Dakar ; sur l’avenir de Amadou Ba et de Diouf Sarr, les deux destins sont encore en suspens.

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