Folie des grandeurs et entourloupes du PSG qatari

Folie des grandeurs et entourloupes du PSG qatari

Depuis son rachat en 2011, la petite boutique du sport business a été propulsée en énorme machine. Qui fait désormais partie de la bande des six clubs les plus riches au monde.

C’était un jour de mars 2013, après un vilain PSG-Nancy, péniblement remporté par les Parisiens. Zlatan Ibrahimovic s’était approché d’un micro pour évoquer les sifflets de mécontentement que les supporteurs avaient fait résonner dans le Parc des princes. «Ils en demandent beaucoup, lançait l’ex-attaquant du club. C’est étrange au regard de ce qu’ils avaient dans le passé. Avant, ils n’avaient rien.» Sous-entendu : avant l’arrivée de Qatar Sports Investments (QSI) comme propriétaire en juin 2011. Comme la plupart des saillies du Suédois, l’affirmation est contestable. Sur le plan économique, elle l’est beaucoup moins.

Avant le temps des grandeurs, le Paris Saint-Germain était une petite boutique du sport business, qui ne figurait pas parmi les 20 clubs les plus riches d’Europe. Sa dernière saison pré-qatarienne, en 2010-2011, il l’avait bouclée sur un petit chiffre d’affaires de 101 millions d’euros – hors transfert. En cinq ans, les revenus ont été multipliés par plus de cinq, pour atteindre 542 millions en 2015-2016. Le PSG fait désormais partie de la bande des six clubs ayant dépassé le demi-milliard de recettes annuelles, avec Manchester United, le Real Madrid, le FC Barcelone, le Bayern Munich et Manchester City.

Haut de gamme

Il n’y a pas que les investissements faramineux du Qatar dans l’achat de stars qui ont payé. Sous la direction du président, Nasser al-Khelaïfi, et de son bras droit, Jean-Claude Blanc, businessman avisé et maître des rouages de l’économie du sport, un intense travail de marketing a été mené pour faire du PSG une «marque» mondialisée au positionnement haut de gamme. Avec un succès remarquable : l’équipe a fait fructifier son audience internationale et ramassé des sponsors à la pelle (23 contrats en cours). Les partenariats lui rapportent désormais 150 millions d’euros par an. Soit une augmentation de 622 % depuis la saison 2010-2011 ! L’arrivée de Neymar ne fera pas fléchir la tendance, au contraire.

Dans le même temps, les recettes liées aux droits audiovisuels, qui découlent en partie des résultats, n’ont progressé «que» de 176 % (pour s’élever à 124 millions) et les revenus de billetterie de 139 % (43 millions). Pour ce dernier poste budgétaire, l’augmentation doit beaucoup à la hausse des abonnements et aux grands travaux menés au Parc, qui ont permis de tripler le nombre de loges VIP. Le chantier, qui a duré trois ans, a coûté 75 millions d’euros au Qatar, pour le plus grand bonheur du propriétaire de l’enceinte, la mairie de Paris, qui n’a pas déboursé un kopeck.

Cette explosion économique ne va pas sans quelques entourloupes. On peut s’émerveiller de l’habileté marketing du PSG. On peut aussi remarquer que, parmi ses quatre «top sponsors», ceux qui remplissent le plus les caisses, deux sont détenus par Doha : la banque QNB et l’opérateur télécoms Ooredoo. Evidemment, au moment de signer le chèque, c’est plus facile. Dans l’opération Neymar, dont on ne connaît pas le montage financier, une autre filiale qatarie, peut-être le fonds QSI lui-même, pourrait selon la rumeur payer les 222 millions d’euros nécessaires au transfert. A moins que la Qatar Tourism Authority ne règle la facture contre le droit d’utiliser l’image de la superstar brésilienne.

Plus gros deal

Depuis 2012, le PSG profite d’un méga-contrat d’image avec cette sorte de ministère du Tourisme de l’émirat, en vertu duquel les joueurs parisiens vont de temps en temps faire un selfie «instagrammable» sur la corniche de Doha. Reconduit à l’été 2016, il rapporte 175 millions d’euros par an, selon le Parisien. C’est tout bonnement le plus gros deal publicitaire jamais signé par un club de foot. A croire que le PSG, même pas cinquante ans d’histoire et jamais vainqueur de la Ligue des champions, a plus d’impact médiatique que les mythiques Real Madrid ou Bayern Munich…

En 2014, l’UEFA, l’organisation qui supervise le foot européen, ne s’était pas laissé berner et l’avait décoté à 100 millions d’euros – ce qui restait sympa – au moment de l’inspection des comptes. Cette réévaluation avait plombé le résultat net du PSG et entraîné sa sanction dans le cadre du fair-play financier (lire page 3), avec une amende de 20 millions d’euros et, entre autres, la mise sous observation pendant trois ans. Cette période s’est achevée le 21 avril, redonnant les mains libres au club en matière économique. Il n’aura pas traîné pour refaire des folies. Qui seront sûrement scrutées de près par l’UEFA, avec le risque d’une sanction plus sévère. Ce serait quand même bête d’être exclu de la Ligue des champions à cause d’un joueur recruté pour la gagner.

Jérôme Lefilliâtre

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