[EDITO DU JOUR] Après l’humiliation, l’affront !

Les sœurs de l’institution Sainte Jeanne d’Arc n’auront décidément rien compris. Il ne leur appartient pas d’imposer un type de voile particulier à leurs élèves musulmanes, mais de les laisser exercer librement leur culte, en enfilant le voile de leur choix et non un « voile chrétien » qui les assimile à des bonnes sœurs. En effet, exclure des jeunes filles voilées était de trop. Les agresser physiquement, les humilier devant leurs camarades, la goutte d’eau de trop. Une humiliation à laquelle vient se greffer, désormais, un affront consistant à imposer aux filles voilées, le port d’un châle qui épouse les contours du voile chrétien porté par les bonnes sœurs.
Cette attitude pour le moins provocatrice relève d’un mépris notoire à l’endroit de la religion musulmane. Or, si ce point s’avère être celui sur lequel le ministère de l’Education nationale s’est accordé avec la direction de l’École pour obtenir la réintégration des filles exclues, en vue d’un règlement « temporaire » du différend, il y a de quoi s’interroger. Et sur la volonté de l’Etat à se faire respecter et sur la capacité de nos autorités à incarner l’autorité. Comment comprendre que le ministère de l’Education nationale donne l’impression de faire la courbette devant un établissement privé, qui plus est financé avec les ressources du contribuable sénégalais ?
Comment admettre que le chef de l’Etat, au lieu de trancher, s’emmure dans un mutisme devant une question aussi cruciale, comme si l’autorité n’avait d’autre choix que de se soumettre au diktat d’une poignée de sœurs catholiques qui prennent trop de liberté et s’estiment toutes puissantes dans un pays où leur religion est très marginale, fortement minoritaire, ce que beaucoup ont tendance à oublier. Sommes-nous toujours en démocratie ? Sommes-nous encore un pays indépendant où la laïcité garantit la liberté de culte ?
Cette attitude de « Jaay doolé » était plus attendue de la majorité musulmane sénégalaise qui jusqu’ici a tout endossé, a fait profil bas, fermant les yeux sur le trop de privilèges et de discrimination positive faits à l’endroit de cette minorité religieuse sous la tutelle des sœurs de St-Joseph de Cluny, qui veulent certes l’argent des musulmans, mais crachent sur leur religion et insultent leur croyance. Auraient-elles dû méditer sur le sort des chrétiens d’Irak et d’Orient en général, qui vivent sous la persécution de l’écrasante majorité musulmane…
 Enfin, la dérogation consistant à autoriser le voile pour cette rentrée seulement, relève d’une compromission qui atteste de la faiblesse d’un ministère de l’Education devenu un acteur figurant et dont la démission s’impose. En somme, Jeanne d’Arc a reculé pour mieux sauter, mais elle n’a pas dérogé à son règlement islamophobe consistant à bannir de son périmètre tout signe distinctif renvoyant à l’islam et à la religion musulmane. Dans un pays où l’autorité s’assume et s’exerce pleinement, l’école serait fermée, son agrément retiré.
 Et Jeanne d’Arc négocierait alors les conditions de sa réouverture. L’Etat, qui a la responsabilité historique d’expédier définitivement cette question, a failli dans son rôle de protéger une partie de ses citoyennes devenues les otages d’un groupe de pression scolaire qui reçoit en coulisses les acclamations de l’Eglise catholique du Sénégal, laquelle ne dit mot, donc consent. Abus de faiblesse ! Demain, lorsque le problème du voile fera une nouvelle fois surface à Jeanne d’Arc, il sera sans doute trop tard pour faire comprendre aux bonnes sœurs, qu’elles ont franchi le rubicond de l’intolérance religieuse.

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