Dr Abdourahmane Diouf porte parole de REWMI : »Un non de conviction… »

10329818_664188786988361_5059046862815329734_oChers amis,

je me permets de partager avec vous mes convictions sur le Référendum de dimanche, en espérant un triomphe du NON.

Bien cordialement!
Abdourahmane

Un NON de Conviction !
Par Dr El Hadji Abdourahmane DIOUF
Porte-Parole de Rewmi

Nous votons NON ! Notre position est nette, claire et limpide !

• Nous votons NON à ce qui est un simulacre de projet de réformes constitutionnelles.
• Nous votons NON parce qu’on nous impose une réponse univoque à des questions hybrides et pas toujours cohérentes.
• Nous votons NON à ce qui est une consultation populaire au rabais, viciée par les fortes suggestions gouvernementales en amont.
• Nous votons NON parce que ceux qui ne sont pas en mesure de respecter leurs engagements d’aujourd’hui ne doivent pas pouvoir nous embarquer dans des promesses pour demain.
• Nous votons NON parce que nous escomptons pouvoir engager de vraies réformes inclusives en dehors de toute manœuvre politicienne.
• Nous votons NON parce qu’en plus des principes généraux énoncés dans la réforme, rien n’interdisait que le fond des lois organiques soit partagé avec les populations. Mais eux seuls savent. Et nous n’y comprenons rien !

1. Un Référendum de dérivation

Comment noyer le non-respect d’un engagement dans une consultation populaire…gratifiante ? En vous dérivant vers d’autres passions. C’est simple, on éteint le feu en en allumant d’autres.

Le format du référendum du 20 Mars 2016 est en lui-même problématique. Si un référendum, par définition, vous confine dans une logique binaire – OUI ou NON -, il doit s’arrimer à une logique pédagogique qui n’empêtre pas le votant dans des contradictions inutiles. Et si vous êtes d’accord sur sept points sans l’être sur les huit autres points, qu’est-ce que vous faites ? Les questions s’annulent-elles les unes les autres ? En choisissant ce format, on abêtit le votant en niant son sens du discernement. Si le gouvernement a décidé de réfléchir et de décider pour nous en usant de ses prérogatives de mandataire, il aurait pu adresser toutes ces questions à la représentation nationale dès lors que seule la question du mandat ne peut pas être tranchée par les députés. Et on aurait échappé à ce simulacre de démocratie populaire qui ne confère aucune marge de manœuvre aux entités non étatiques de la République du Sénégal.

En organisant un tel référendum dans un si court délai après avoir utilisé l’Avis du CC comme paravent, on veut engranger à la fois sur le reniement involontaire victimisant et sur l’empathie populaire. Dans l’entendement du régime actuel, l’Avis du CC est censé le dédouaner de son reniement ; et le référendum est censé lui donner une onction populaire. Solliciter le peuple sur ce qui n’était pas l’objet du RV initial qui lui a été fixé est une manœuvre politicienne destinée à flatter l’égo des populations tout en leur déniant leur droit de sanction positive ou négative sur l’essentiel. On a bien compris !

2. Le Président, sa torche et son impasse

Le Président ne fait face à aucune impossibilité pour le Président de réduire son mandat ! Il s’est mis à la recherche effrénée d’éléments juridiques d’invalidation de son engagement ; et le Conseil Constitutionnel les lui as servis sur un plateau.

Toute analyse, dans le choix du PR, doit partir de sa volonté de réduire son propre mandat. C’est le postulat de base qu’il ne faut jamais oublier.
Le Président a une torche à la main. Il cherche son chemin. Pas tous les chemins. Mais celui qui le mènera à respecter son engagement. C’est un Rendez-vous entre sa volonté et les voies opérationnelles juridiques disponibles.

Si tant est-il que son choix est clair, assumé, sincère, en phase avec les attentes du peuple destinataire de son engagement, et qu’il a sa lampe torche à la main, il a l’obligation de chercher la voie la plus directe, la plus sûre et qui lui offre plus de garantie quant au résultat escompté : Réduire le mandat.

Ce qui ajoute au malaise du reniement, c’est l’impression de sa planification. Un temps de réflexion de quatre ans anormalement long. Un désintérêt manifeste des conclusions de la CNRI. Une certaine exaspération à l’évocation du sujet. Le contournement hautement stratégique de la voie référendaire royale de l’article 103 de la Constitution. La construction laborieuse d’un statut décisionnel à l’avis du conseil constitutionnel et les conséquences juridiques tirées par les cheveux qui s’en sont suivies.

La volonté du PR doit être évaluée sur la base des obstacles réels qui s’imposent à lui ; pas sur la base des pseudos obstacles qu’il s’est proposés à lui-même.

3. Des contorsions juridiques inopérantes

Un tel jeu de contorsions juridiques doit être unique dans l’histoire de notre pays !

Deux possibilités de soumettre sa décision de réduire son mandat à la sanction du peuple existent à travers les articles 51 et 103 de la Constitution. L’article 51 trace la voie de la saisine du Conseil Constitutionnel (CC) et l’article 103 celle de l’alternative entre l’Assemblée nationale et la voie référendaire directe.

En choisissant l’article 51, le PR va chercher une intercession de très mauvais aloi entre son engagement et son peuple. Il va choisir le chemin des embûches qui pourrait briser son élan, tout en lui préservant sa bonne conscience. Il va se mettre dans les conditions tellement laborieuses de respect de son engagement, que son reniement pourrait être récompensé non plus à la mesure du résultat effectif – a t-il respecté son engagement ou non ? – mais à la simple appréciation des efforts fournis. Sa volonté stricte de réduire son mandat ne devait en aucun cas l’emmener à consulter le conseil constitutionnel. C’est se défausser sur une autorité intercédante sous le prétexte du respect de la constitution.

Quand bien même, le PR est allé consulter le conseil constitutionnel, l’Avis qu’il lui donne ne peut pas être une Décision. Il reste un Avis sans aucune valeur juridique contraignante et sans effet sur la soumission de l’engagement de réduction de son mandat au peuple sénégalais. Le Professeur Serigne Diop a rappelé, de fort belle manière d’ailleurs, que l’acte soumis au conseil constitutionnel est un avant-projet de loi qui n’est pas encore dans le commerce juridique et qui ne peut donc faire l’objet d’une décision judiciaire contraignante.

L’article 103 était donc la solution. Elle reste la solution. On a entendu çà et là que cette voie pouvait être obstruée par le fait que le l’Assemblée nationale qui est mentionnée dans la procédure, ne peut pas connaitre de réduction du mandat ; et que donc cette voie devait être écartée. Cela est vraie en partie. Mais seulement en partie. Parce que c’est un raisonnement qui méconnait la double possibilité de saisine offerte par l’article 103. Si le Président saisit l’Assemblée nationale du Projet de révision constitutionnelle, cette procédure exclut de droit le Référendum. En revanche, il peut aller directement au référendum sans s’en référer à l’Assemblée nationale. Soumettre donc le projet de réduction du mandat au référendum à travers l’article 103 est la voie royale qui dessaisit à la fois le conseil constitutionnel et l’Assemblée nationale au profit du peuple. Dès lors, une simple disposition transitoire mentionnant expressément l’application du quinquennat au mandat en cours aurait suffi à régler le problème.

Notre conviction forte est qu’il n’est pas trop tard. Le Président peut encore réduire son mandat, en organisant l’élection présidentielle…en 2017.

4. Le Conseil Constitutionnel, un bouc émissaire…à son corps défendant ?

On est allé demander au CC un Avis. Il a donné un Avis. De son Avis, on a voulu faire une Décision. Et on a créé l’Avis décisionnel du conseil constitutionnel. A son corps défendant.

Pour ceux qui soutiennent que le PR ne pouvait pas « ignorer » l’avis du PR ; que cela réduirait l’autorité du conseil constitutionnel qui est la garante du respect des dispositions constitutionnelles, l faut rappeler que la saisine directe du peuple à travers l’article 103 aurait eu pour effet de réduire le mandat en cours dans l’hypothèse de la victoire du OUI. Le CC se serait-il autosaisi à postériori pour invalider le résultat du référendum et s’opposer à la réduction du mandat ? Non ! Ce scénario impossible qui replace la souveraineté populaire au cœur de la politique constitutionnelle démontre qu’aucun conseil constitutionnel au monde n’est habilité à empêcher un référendum sur quelque sujet que ce soit, à quelque moment que ce soit et sous quelque prétexte que ce soit. Le peuple reste souverain ! Et entre le PR et son peuple, l’article 103 de la Constitution offre toutes les palettes d’effusion de sentiments possibles. C’est ce Rendez-Vous avec son peuple que le PR a raté.

5. Oui, le Mandat est un casus belli !

En s’engageant à réduire son mandat, le Président s’est payé à crédit une notoriété internationale. Et les crédits, ça se paye ! Il a surfé sur une gloire indue. Et la réputation de notre pays en pâtit !

Les évènements du 23 juin 2011, les péripéties de la dernière élection présidentielle de 2012 et les vicissitudes de la dévolution du pouvoir en Afrique ont fait du mandat présidentiel l’élément de bascule ou d’équilibre de nos ordres constitutionnels. Il reste le noyau dur auquel viendront s’agglomérer les autres réformes constitutionnelles. Au Sénégal, un fort consensus autour d’un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois a été observé. Résultats des remous des années 2011 et 2012 et des changements intempestifs de 2008. C’était acté, accepté, consensuel, sans que cela n’ait besoin d’aucun texte probant. C’était tacite et résultait implicitement de notre consensus national autour des institutions. La CNRI l’a formalisé sur la base d’une écoute attentive des populations. Tacitement, toute la classe politique l’a adopté. L’engagement antérieur du PR était à mettre dans ce registre. Dès lors, notre commun vouloir constitutionnel commun doit se bâtir autour d’un bloc constitutionnel bâti autour d’un mandat de 5 ans renouvelable une seule fois à partir de 2012.

Au-delà de son engagement personnel, c’est ce PACTE populaire qui a été rompu par le reniement du PR. En démantelant le socle de nos réformes communes envisagées, et en se soustrayant à ce qui était sa part minimale de contribution – la réduction de son mandat – le PR n’a plus la légitimité de nous embarquer, hic et nunc, sur un avenir dont il n’est pas un acteur indispensable. Si le père de famille, par moult contorsions, se soustrait à sa part personnelle de sacrifices pour offrir un avenir meilleur à ses enfants, il n’a plus la légitimité de leur indiquer un avenir au façonnement duquel il n’est pas indispensable.

6. Engagements verbaux non contraignants

Ce n’est que de la politique ? Oui, mais la politique peut être sobre…et vertueuse !

Les dimensions éthique et morale du reniement nous interpellent. Nous devons fonder une République et une nation en nous adossant à des valeurs communes réelles, partagées, assumées, intangibles. Des valeurs tellement fortes qu’elles peuvent ne pas avoir besoin de supports écrits formalisés. Des valeurs qui fondent notre engagement politique au service de notre pays. Il nous faut travailler, nous hommes politiques, à pouvoir regarder nos électeurs dans les yeux et à assumer nos actes. Le discrédit des hommes politiques est énorme dans ce pays. Les populations n’ont plus confiance en la parole politique. Comment pourront-elles alors se sublimer aux delà de leurs difficultés quotidiennes récurrentes et s’engager auprès des leaders politiques pour relever les défis nationaux ? Qu’est-ce qui pourraient motiver les sacrifices des populations pour un avenir meilleur dès lors que les hommes et femmes politiques qui ont en main leur destinée ne consentent la plus petite renonciation à leur bien être politique et matériel immédiat ?

Le pays ne bruit que d’engagements non tenus par les pouvoirs publics : la réduction du mandat présidentiel, les enseignants qui attendent le respect des accords signés, les classes politiques et civiles dans l’attente d’un dialogue inclusif pré-référendum, les milliards des conseils des ministres décentralisés en souffrance quelque part ; et la vaste promesse d’une émergence que nous scrutons encore au ciel.

7. Un soliloque gouvernemental clivant

Notre Président ne nous parle pas ! Il ne parle pas à son opposition. Il ne parle pas aux forces vives de la nation. Il ne nous implique pas dans le tracé de notre propre destin. Le format et la méthode d’organisation de ce référendum sont les révélateurs d’un soliloque gouvernemental à feu continu, et qui clive la société sénégalaise à l’extrême.

Le dialogue politique n’a jamais été aussi orphelin dans notre pays, après quatre ans de magistère. Nous ne parlons pas de dialogue politicien sous parfum de transhumance à travers la distribution de strapontins pour affaiblir l’opposition. Mais du vrai dialogue politique qui engage les dirigeants d’aujourd’hui et de demain sur les questions clés du pays. Depuis que ce régime est en place, notre pays fait face à des défis énormes qui transcendent les cloisonnements politiques. Il eût été judicieux que le pouvoir impulse un dialogue inclusif sur les réformes de l’éducation et de l’enseignement supérieur, sur l’implication de notre armée dans les conflits internationaux, la laïcité et notre rapport à la religion, la sécurité et les menaces terroristes. Aucune main tendue et des opportunités de consensus nationaux ratées. Et qu’on ne demande pas à l’opposition de s’inviter au palais pour entamer des discussions. Elle n’est pas maîtresse de l’agenda et cela ne s’inscrirait pas dans l’ordre naturel de la République.

La même erreur a été commise avec le PSE. On peut s’accommoder d’un PR qui essaie d’avoir une vision économique à long terme qui enjambe son propre magistère. Mais il est difficile de s’accommoder du même PR qui vous trace un avenir lointain sans se soucier de vous associer à l’écriture de votre propre destin. Cela a été une faute politique de n’avoir pas eu un PSE inclusif ; comme c’est une faute politique aujourd’hui de vouloir nous enferrer dans des clauses d’éternité sans discussions préalables. Les clauses économiques et les clauses constitutionnelles ne pourront pas être éternelles sans de larges consensus qui n’ouvrent aucune porte à une remise en cause ultérieure. Il est assez illogique et insensé de ne pas pouvoir respecter sa propre promesse d’aujourd’hui et d’être le garant du respect de la promesse de tout un peuple pour demain.

8. Des réformes confondantes…et surtout pas consolidantes

Le peuple sénégalais méritait d’être consulté pour des réformes plus substantielles que cela. Ce qu’on nous propose n’est toujours pas digeste !

• On nous propose la protection et la consécration des droits des partis d’opposition dans un référendum à l’occasion duquel l’expression de sa position de NON est obstruée par les interdictions de rassemblements et un « boycott » systématique de la télévision publique. Cette opposition brimée, chahutée, est sur la ligne de mire du chef de l’Etat qui tient à « la réduire à sa plus simple expression ». Et c’est le même régime qui nous promet la protection. Quoi croire ? Qui croire ?

• On nous réaffirme la sanction du député qui démissionne de son parti, en sachant que les députés ne sont pas élus par des partis dans notre contexte politique, mais par des coalitions. On n’y touchera pas si on se fait le chantre de la transhumance. C’est logique. Il n’y avait rien à en attendre !

• On nous vend l’idée des ressources naturelles qui appartiendraient au peuple ; ressources de dernière génération ; alors que toutes nos ressources publiques de première génération font l’objet d’une appropriation privative sans aucune perspective de libéralisation qui garantirait les droits des consommateurs. Et nous devons y croire ?

• On nous propose l’augmentation du nombre de membres du CC qui n’apportera aucune valeur ajoutée avec les modes de désignation proposés. La dimension politique y restera déterminante. Ce n’est pas le nombre qui fait la qualité. Ces juges là, il ne faut pas les compter ! Il faut les peser !

• On nous promet des députés de la Diaspora pour mieux représenter leurs intérêts, en contradiction flagrante avec tout mandat impératif nul consacré par la même constitution. On flatte des égos, mais on ne résout pas les problèmes.

• On nous promet une réforme foncière révolutionnaire, alors que les conclusions de la commission de réforme qui s’en occupe ne sont pas encore disponibles…et que le premier président de cette commission a dû démissionner, faute de moyens

• On nous vend la modernisation des partis politiques alors que le dispositif actuel de contrôle est en souffrance. On crée de la redondance législative sans aucune prise sur la réalité politique.

Ce Référendum est aussi un orphelinat, l’antre de toutes ces questions orphelines à fort potentiel de consensus et qui font l’objet d’une omission volontaire. Ce sont, entre autres, la réduction du mandat actuel, l’interdiction au Président de la République d’être chef de parti, le mode d’élection des députés, l’atténuation des pouvoirs du Président de la République, l’élection des maires au suffrage universel direct, la réforme du Conseil supérieur de la magistrature etc.

Pour l’essentiel, la plupart des propositions sont assez fumeuses, pas assez innovantes, sans réel valeur ajoutée pas à la dimension des réformes consensuelles attendues par le peuple sénégalais.

Pour toutes ces raisons, nous votons donc NON et nous appelons à voter NON. Voter et faire Voter ! Nous respectons les partisans du boycott, mais pensons que leur abstention, le plus souvent fondé sur le dépit, pourrait être mise à profit par ceux-là mêmes qui font l’objet de leur courroux. Nous les invitons à rejoindre le camp du NON univoque pour que plus jamais, un homme politique n’ait à l’idée de jouer sur la confiance qui lui est accordée par les citoyens. Et pour qu’ensemble, nous travaillions à réinventer le socle constitutionnel de notre beau pays.

Abdourahmane.

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