Ces onze meurtres qui ont bouleversé les Sénégalais et qui peinent à être élucidés

 Des présumés meurtriers qui courent toujours, pendant que des familles de victimes continuent de guetter désespérément leur arrestation. Des vies détruites, le temps qui tourne dans la douleur pour les proches de victimes qui continuent de réclamer justice. Au nombre de ces crimes et autres curieuses découvertes macabres, «L’Observateur» qui a fait le point retient onze affaires qui, jusqu’ici, sont restées au point mort. Qu’est-ce qui explique une telle lenteur ? Où se situent les facteurs qui bloquent l’action des enquêteurs ? Des éléments de réponse avec un spécialiste des questions de sécurité publique, le Colonel Alioune Ndiaye, ancien patron de la communication de la Police.

La dernière décennie (2009 – 2019) a marqué les esprits des spécialistes des questions de sécurité, non pas parce qu’elle bat un record historique d’un accroissement de la criminalité, mais parce qu’elle dresse un tableau sombre listant une kyrielle de crimes et autres découvertes macabres qui ont indigné les Sénégalais et qui sont, jusque-là, restés non élucidés. Cela, au grand dam des proches des victimes qui espèrent désespérément un miraculeux concours de circonstance à même de «ressuscité» l’enquête empoussiérée par le temps qui moisit dans les tiroirs des enquêteurs. Spécialiste des questions de sécurité, le Colonel Alioune Ndiaye, ancien patron du Bureau des relations publiques de la Police nationale, explicite les facteurs de blocage qui peuvent entraver ce type d’enquêtes dont certaines lui sont restées en travers de la gorge.

DIAMAGUEUNE-SICAP-MBAO – Des agresseurs lui arrachent son sac dans un véhicule, Yacine Sané, tentant de les rattraper, chute mortellement

23 octobre 2019. Lorsque tôt le matin, le véhicule de transport en commun dit «Ndiaga Ndiaye» entame la montée du pont, Yacine Sané et les autres passagers sont surpris par des malfaiteurs qui avaient pris place au marchepied dudit véhicule. L’un d’eux arrache le sac de Yacine Sané et saute du véhicule. Yacine tente de le poursuivre en l’imitant. Hélas, elle chute lourdement sur l’asphalte et sa tête cogne la chaussée. Elle s’évanouit, sombre dans le coma et meurt pendant son évacuation. Le chauffeur arrêté est envoyé en prison pour «accident corporel par circulation devenu mortel». Trois mois après, l’agresseur court toujours. Yacine Sané laisse derrière elle un bébé de 18 mois que sa maman gardait tous les jours en attendant son retour du travail.

MALIKA-MONTAGNE – Jeanne Mendy (3 ans) retrouvée morte le corps caché sous un camion

02 août 2019. Au quartier Ndiago de Malika-Montagne, une gamine de trois ans portée disparue a été retrouvée morte dans la nuit, le corps dissimulé sous un camion. Auparavant, dans l’après-midi, en compagnie d’une autre gamine de son âge, elle avait accompagné sa tante au domicile d’une coiffeuse situé non loin. Hélas, lorsque sa tante a fini de se tresser, Jeanne avait disparu. On craint un enlèvement. Le quartier est fouillé jusque tard dans la nuit. Au moment de suspendre les recherches, la nouvelle tombe : Jeanne est retrouvée non loin de la décharge de Mbeubeuss, le corps caché sous un camion. Pourquoi elle et pas l’autre gamine ? Pourquoi elle a été retrouvée à un endroit très éloigné du domicile de la coiffeuse ? Un trajet qu’elle ne peut parcourir seule. Elle a suivi son ravisseur sous la contrainte ou alors parce qu’elle le connaît et l’a suivi volontairement ? Des questions restées jusque-là sans réponse. Entendue à la police, la tante a finalement été relâchée. Rien n’indique qu’elle est mêlée à la disparition de sa nièce. L’auteur (ou les) court encore. Le père appelé hier au téléphone s’interroge encore.

OUAKAM – Amy Diouf découverte morte au marché «Salagne-Salagne»

Ce fut l’horreur ce dimanche matin 20 mai 2019. A Ouakam, c’est la ruée vers le marché «Salagne-Salagne» où le corps en état de décomposition d’une dame a été découvert. Âgée d’environ 40 ans, elle a finalement été inhumée le même jour aux cimetières de Yoff. Trente jours plus tard, elle est enfin identifiée. Elle répondait de son vivant au nom de Amy Diouf. Originaire de la région de Thiès, elle s’était installée à Dakar depuis quelques années pour travailler comme femme de ménage et aider à nourrir sa famille. Selon les premiers éléments de l’enquête, elle a été entraînée dans ce marché (sous la contrainte ?), abusée avant d’être tuée. Depuis, aucune arrestation.

MARISTES – Un corps dans le lac, crime ou noyade ?

Le 05 mai 2019, dans le lac niché au cœur des Maristes, le corps d’un homme d’âge mûr est repêché. Mort par noyade, Crime ou suicide ? Les supputations continuent, car jusque-là il n’a pas été identifié et aucune communication sur le rapport d’autopsie.

AFFE DJOLOFF – Djila Bâ refuse de revenir au domicile conjugal, son époux la tue et disparaît

Le 04 mai 2019. Une mort atroce, l’auteur identifié mais court toujours. Voilà huit mois que l’époux de Djila Bâ n’est toujours pas tombé. Un mari violent. Une épouse qui craint pour sa vie et qui quitte le ménage pour se réfugier au domicile de ses parents. Hélas, l’époux qui a vainement tenté de la faire revenir va l’attendre sur le chemin qui mène au puits. Dans ses mains, un coupe-coupe. C’était le crépuscule, six coups de coupe-coupe pour en finir avec Djila Bâ. L’époux identifié court toujours.

PARCELLES ASSAINIES – Une beuverie mortelle, l’émigré sénégalais Insa Sané pris à partie meurt

C’était dans la nuit du 23 au 24 juillet 2018. Insa Sané revenu d’Angleterre où il s’est établi, séjourne aux Parcelles Assainies dans la maison familiale. Après une virée nocturne où la soirée a été bien arrosée, il est pris à partie par des jeunes. Grièvement blessé, il est abandonné dans un état critique, presque mourant avec de graves blessures. Il ne va se relever, ni retourner en Angleterre. Une mort jusque-là non éclairée, malgré l’arrivée de son épouse qui s’est impliquée dans la traque des auteurs.

DIMAGUEUNE-SICAP-MBAO – Le vieil homme tout nu découvert dans le bassin de rétention

25 mars 2018. Dans un bassin de rétention, du nom de ces ouvrages construits au plus fort des inondations pour contenir le trop plein d’eau de pluie, le corps d’un homme flotte. On croit à une noyade, mais beaucoup retiennent la thèse du crime maquillé car le vieil homme a été découvert le corps tout nu. Des individus qui n’avaient plus revu leur pater depuis plusieurs semaines se sont spontanément présentés à la Police pour voir s’il ne s’agit pas de lui. Ils ont été orientés vers la structure sanitaire où le corps du vieil homme avait été acheminé.

LOUGA – Le taximan Pape Ndiaye tué à coups de coupe-coupe, aucune arrestation

17 août 2016. Au quartier Keur-Serigne Louga, dans la nuit, Pape Ndiaye, taximen  plongé dans un sommeil léger, entend des voix l’appeler et l’inviter à les rejoindre dehors. Il reconnaît bien ces voix et se porte immédiatement dehors. Hélas, c’était une grosse erreur. Dès qu’il met le nez dehors, des coups de coupe-coupe s’abattent sur lui. Il s’affale et est découvert baignant dans une mare de sang. Encore vivant, il a été vite évacué à l’hôpital où il décède dès son arrivée. Une affaire qui pue le règlement de comptes selon ses voisins. Des gens ont été soupçonnés mais depuis, ils n’ont plus été revus dans le quartier. Aucune arrestation.

GUEOUL – Un pompiste et un vigile égorgés, sept individus arrêtés puis acquittés

14 novembre 2009 à la station d’essence de Guéoul, le pompiste Badara Ndir et le vigile El Hadji Mbodj ont été surpris, neutralisés, puis froidement égorgés. L’enquête ouverte avait permis à l’époque de mettre la main sur sept individus. Neuf ans plus tard, le 12 janvier 2018, ils sont présentés à la Chambre criminelle. Le verdict a sonné comme une gifle pour les familles du pompiste et du vigile. La bande des 12 recouvre la liberté. Ils sont acquittés. Un double meurtre sans auteurs ! Une affaire qui continue de révolter les familles des victimes qui n’ont cessé de réclamer la réouverture du dossier. Peu de chance que leurs vœux soient exaucés, car depuis l’année dernière (2019), la prescription frappe ce dossier.

DAKAR – Un crime d’une rare barbarie, Fama Niane (30 ans) a été découpée en sept parties et des organes ont disparu

C’était en 2009. Le 12 mars, sur la plage de Koussoum. Au petit matin, sept parties d’un corps découpé ont été retrouvées non loin du littoral. Ce fut un énorme choc pour les habitués de cette plage prise d’assaut par une foule monstre. Plus tard, grâce à la Police scientifique et technique et à la Division des investigations criminelles, le corps a été identifié. C’est celui d’une dame du nom de Fama Niane âgée d’une trentaine d’années. Les sapeurs-pompiers qui ont tenté de reconstituer le corps découvrent qu’il manque «les seins et le cœur». L’enquête conduit la Police à la gare routière « Petersen » de Dakar où, selon les témoignages recueillis auprès des pensionnaires de la gare, la victime Fama Niane menait une double vie. Mariée, elle était également la concubine d’un féticheur du nom de Kandé. Elle ne rejoignait son époux que le week-end, alors que la semaine, elle la passait dans une cantine en zinc du féticheur Kandé. La piste du crime rituel a été privilégiée par les enquêteurs qui n’ont pas réussi à mettre la main sur Kandé. Depuis, il est demeuré introuvable.

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