Babacar Justin Ndiaye « démolit »Idrissa Seck

 Les observateurs n’ont point besoin de scruter longuement ou de secouer vigoureusement la typologie des gouvernements, pour classer l’équipe de la Toussaint du Président Macky Sall dans la catégorie des attelages les plus visiblement politiques.

Car, en effet, cet Exécutif installé et coiffé par le Président de la république (absence toujours persistante de Premier ministre) n’a pas les caractéristiques d’un gouvernement de salut public ou de sauvegarde nationale – Dieu merci, le Sénégal n’est pas en guerre ! –, n’affiche pas les profils de magiciens de l’économie habituellement cooptés dans un gouvernement de toutes les urgences et de toutes les priorités dictées par la lutte contre la paupérisation.

Il s’agit alors d’un gouvernement de projections et de perspectives éminemment politiques qui est échafaudé à la hauteur du reliquat de l’actuel mandat. Suivez mon regard en direction de 2024 ! Une échéance que la nomination du chef de Parti Idrissa Seck à la tête Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) gonfle de toutes les lectures et de toutes les possibilités. En d’autres termes, le Sénégal a, depuis le week-end dernier, amorcé un tournant institutionnellement programmé par Macky Sall et pour l’après-Macky Sall. 

Disons – sans pinailler ni tarder – que l’ancien Premier ministre, Idrissa Seck, ne peut pas sauter le pas bêtement. L’expérience n’est-elle pas le nom par lequel l’homme baptise ses erreurs ? Cette fois-ci, Idrissa Seck n’a pas franchi le Rubicon pour revenir bredouille. D’ailleurs, le Rubicon n’est pas une rivière qu’on franchit en sens inverse. Du reste, Idrissa Seck – au regard de ses déclarations antérieures et carrées – ne peut pas avaler, aujourd’hui, une couleuvre aussi grosse qu’un tronc d’arbre sans être sûr de la digérer et la transformer en une montagne de vitamines…politiques.

Chez le très politique Idrissa Seck, la contradiction n’est pas un fossé mais un pont. Voire une corde avec laquelle on grimpe et/ou sur laquelle on glisse, en fonction des situations. Dans sa conception de la lutte pour le pouvoir, la tortuosité est un tremplin, tandis que la sinuosité représente une passerelle. Comme quoi, les chemins de la politique ne sont pas rectilignes. Peut-être que le champion des sourates (Idrissa Seck) a également lu le Cardinal de Retz : « En politique, on meurt dès qu’on sort de son ambiguïté ». Normal donc que l’homme politique reste engoncé dans le manteau de l’équivoque.       

Même s’il n’est pas aisé de faire une épure nette du « deal », pour emprunter le mot de Cheikh Yérim Seck, l’analyste peut se convaincre que l’arrangement au sommet entre les Présidents Sall et Seck, accouchera d’une dévolution peu ou prou démocratique du Pouvoir. Car, dans le Sénégal farouchement attaché à ses acquis démocratiques et fermement cabré sur ses avancées politiques, les combinaisons, les collusions et les échafaudages devront être impérativement validés par le suffrage universel. Donc le corps électoral.

Au chapitre des explications du rapprochement spectaculaire entre les deux leaders longtemps opposés, les intermédiations religieuses et l’implication des « intelligences » sont mises en avant. Les « intelligences » étant un euphémisme qui, à la fois, désigne et cache des puissances extérieures, en général, et la France, en particulier. L’objectif joliment avoué est la stabilité du Sénégal. L’agenda évidemment non avouable est triple : effacer le futur de Khalifa Sall, enfouir le devenir de Karim Wade et casser le destin d’Ousmane Sonko. Moralité : les gladiateurs (sans pitié) sont dans l’arène politique. Les enfants de chœur sont, eux, sur la touche ou expédiés au presbytère.  

En attendant l’ultime étape, constatons que le Président Macky Sall a bien joué sa partition à travers un remaniement ministériel savamment émaillé de purges et de promotions. Tous ceux qui, par leurs ambitions légitimes ou leurs envergures réelles, peuvent gêner ou altérer la manœuvre, ont été écartés du gouvernement. Non seulement écartés mais, aussi, épiés. Par conséquent, les Amadou Ba, Aly Ngouille Ndiaye, Matar Cissé ont intérêt à se tenir à carreaux. En effet, la nomination du Robespierre de la CREI (Antoine-Félix Abdoulaye Diome) au Ministère de l’Intérieur ne découle pas du hasard. Elle est illustrative de l’épée de Damoclès judiciaire au-dessus de quelques têtes.

La plus malheureuse des suppliciés de la Toussaint est évidemment Aminata Mimi Touré. La Jeanne d’Arc de la traque des biens mal acquis a fait le boulot. Un boulot applaudi, au départ, puis maudit, à l’arrivée. Aujourd’hui, elle est abandonnée, seule, face à un destin incertain, une somme d’animosités certaines et une haie de haines…recuites et requinquées.

Par Babacar Justin Ndiaye      

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