Aulnay-sous-Bois : le terrible témoignage de Théo

Le récit que Théo a confié de son lit d’hôpital à un proche qui l’a enregistré et que nous avons écouté est terrifiant. Le jeune homme y livre en détail sa version des faits qui se sont déroulés, jeudi dernier, à Aulnay-sous-Bois lors d’un contrôle d’identité. Un récit contesté par les quatre policiers mis en examen et suspendus par le ministre de l’Intérieur dans l’attente des conclusions de l’enquête. Le gardien de la paix poursuivi pour «viol» plaide un coup accidentel. Les trois autres sont soupçonnés de «violences volontaires». Le jeune homme, qui s’est vu prescrire soixante jours d’ITT après une opération consécutive à une déchirure à l’anus de 10 cm de long, reste, lui, toujours hospitalisé.

Ce jour-là, alors qu’il se rend auprès d’une amie de sa sœur pour lui remettre un sac de chaussures, Théo, 22 ans, aperçoit des amis du quartier. «Je vais pour leur serrer la main comme d’habitude et lorsque j’arrive, les policiers arrivent aussi et disent : Tous contre le mur. A leur façon de parler, j’ai compris qu’ils n’étaient pas là pour rigoler.» Rapidement, le climat de ce qui démarrait comme un contrôle d’identité s’envenime. A un jeune qui demande pourquoi un des agents le menace d’une amende de 450 €, ce dernier aurait répliqué par une «grosse gifle». C’est en prenant la défense de ce jeune que Théo est alors accusé d’être un provocateur par l’un des fonctionnaires. «Il me met un coup, et là je savais que, dans ce coin, il n’y avait pas de caméra et qu’il fallait que je me débatte pour que j’aille devant les caméras. J’ai réussi à me débattre. Ils me saisissent à trois, ils me tirent. Que des insultes, des insultes, tous les noms. Un policier tire sur tout ce qui est là avec du gaz lacrymogène, il revient vers moi et il m’insulte.

A lui aussi je dis : Mais pourquoi faites-vous ça, monsieur ? Le policier, là, il me regarde. Moi, j’étais de dos, de trois quarts, donc je voyais ce qu’il faisait derrière moi. Je l’ai vu prendre sa matraque et il me l’a enfoncée dans les fesses, volontairement. Dès qu’il m’a fait ça, je suis tombé sur le ventre et là ils m’ont dit : Assieds-toi maintenant. J’ai dit : J’arrive pas à m’asseoir, je ne sens plus mes fesses. Et ils m’ont mis du gaz lacrymogène sur la tête, dans la bouche. Un coup de matraque en pleine tête. J’entends un policier dire : Attends, ici y a les caméras, on va l’emmener derrière le mur, on va lui faire sa fête. Mon pantalon était baissé. Ils m’emmènent derrière le mur et ils commencent à me passer à tabac encore. Ils me frappent, ils me frappent.» Théo raconte alors qu’un jeune du quartier tente de s’interposer et refuse de partir et qu’à ce moment-là les policiers décident de l’embarquer.

Théo est alors emmené vers le véhicule des forces de l’ordre. «J’avais du mal à marcher, je croyais que j’allais mourir. Dans la voiture, ils me poussent, me mettent au milieu. Les deux policiers sur les côtés me mettent des coups, ils me traitent de tous les noms : Espèce de salope, Bamboula, T’as voulu faire le malin, regarde maintenant comment tu es. Le policier qui est à ma gauche m’assène des coups sur le crâne, il me met plein de patates, le policier à ma droite, il (inaudible) mes parties intimes. J’essaie de me débattre avec mes jambes comme je peux. Les deux policiers m’attrapent les épaules alors que je suis menotté, et le policier devant, il me met des patates dans la tête. Un policier avait dit : Je crois qu’il saigne du fion en rigolant. Et là, le policier dit : Ça mérite un petit snap, ça (NDLR : sans doute une photo via l’application Snapchat). Et le policier qui est assis devant côté passager, il me fait un snap. Là, ils se sont mis à me cracher dessus, et frapper, frapper. Et moi, j’avais tellement mal aux fesses.»

«Quand on descend de la voiture, poursuit le jeune homme, un policier dit : T’as raison, il saigne des fesses, mais d’un ton moqueur et le policier qui conduisait, il dit : Regarde dans quel état t’es, espèce de salope. Moi, je réponds toujours pas, j’ai juste l’impression que je suis en train de mourir. Au commissariat, le policier dit : Assieds-toi. J’arrive pas à m’asseoir, monsieur. Un collègue du commissariat dit : Ben écoute, allonge-toi, si t’arrives à t’allonger, on va quand même t’attacher au banc parce que c’est la procédure. Je m’allonge au sol, ils m’attachent au banc. Et le policier du commissariat, il a vu que j’étais vraiment mal et il a dit : Faut l’emmener, c’est grave. Les policiers qui m’ont frappé, ils disent : Mais non, il fait du cinéma. Il a voulu faire le grand. Lorsque le Samu arrive, conclut Théo, il regarde la plaie et il dit : C’est très grave, il faut l’opérer le plus rapidement possible.»

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