Adji Sarr : La parole d’une jeune femme brisée ? (Par Oumou Wane)

Adji Sarr
Adji Sarr

Depuis que Adji Sarr a parlé et apporté des détails sur son accusation de viols à l’encontre du député Ousmane Sonko, la pauvre est accusée de mensonge, de manipulation, d’affabulation, quand elle n’est pas traitée de tous les noms par les partisans et soutiens de l’homme politique. Selon eux, les femmes n’aimeraient rien de mieux que d’accuser malicieusement de viol des hommes honnêtes et respectueux de la loi.

Il n’est pas question ici de prendre position dans une affaire en cours d’instruction, mais si je tiens à respecter la présomption d’innocence du jeune député, je ne veux point participer à cette part de la couverture médiatique qui tendrait à nous convaincre que les hommes sont des cibles faciles pour des femmes dont le fantasme serait de détruire leur vie.

J’ai vu cette jeune femme revenir sur les faits de son agression présumée, son regard perdu et fatigué, si lointain qu’on a l’impression qu’elle conjugue désormais son avenir au passé. Dans le doute inhérent à l’enquête, je ne me permettrai pas de dire qu’elle récite ou que c’est une mise en scène.

Car si cette affaire, aussi dramatique soit-elle, peut aider notre société à avancer, alors profitons-en pour faire changer les choses, pour nous, pour nos enfants.

D’abord, soyons tous solidaires face au viol ! Il est toujours bon de rappeler que le silence, la peur de déposer plainte servent toujours aux agresseurs et aux violeurs. Il ne faut absolument pas garder ces actes odieux pour soi et au fond de nous et il faut à tout prix que les victimes déposent plainte.

Or, il est encore très dur de déposer plainte. Oui, on a peur de ne pas être cru. Oui, il faut faire face à son agresseur. Bien sûr les fausses accusations de viol existent mais elles sont rares. Et non, les femmes ne sont pas intrinsèquement malhonnêtes ou fabulatrices.

La réalité du viol au contraire, est que les femmes qui signalent une agression sexuelle sont beaucoup plus susceptibles d’être jugées et blâmées que les hommes qu’elles accusent. C’est le vieux mythe des femmes qui utilisent leur sexualité pour obtenir des biens ou des services face à des hommes victimes, vulnérables. Il reste donc beaucoup de travail pour que la honte change de camp et que toutes les victimes de violences sexuelles puissent déposer plainte sans être confrontées à la culpabilité et la stigmatisation qui sont les principales causes de ce silence.

Les victimes craignent le manque de considération de la personne à qui elles se confient. Elles le font les yeux sont baissés. Comme un rideau sur leurs souffrances.

Aujourd’hui dans notre pays, c’est bel et bien la question des viols, des féminicides et des violences faites aux femmes qui devrait être au centre de l’attention. Car il faut aussi penser à la plaignante, victime présumée, et à toutes les femmes victimes de viols, dont les vies sont détruites, dans un parcours toujours très difficile du traitement des plaintes pour violences sexuelles, aussi long qu’incertain.

C’est même révélateur d’une certaine omerta. Les violences envers les femmes recouvrent diverses formes, verbales, psychologiques, physiques, sexuelles, économiques. La politique publique de prévention et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles ne doit pas rester à la traîne car l’on ne comprendrait pas que nos dirigeants aient manqué d’agir face à de telles priorités.

En attendant, laissons la justice faire son travail dans la transparence la plus totale et permettons à chaque partie de s’expliquer dans ce dossier. Qu’il y ait eu viol, des relations consenties ou même rien du tout, nous n’en savons rien encore. C’est l’enquête du juge d’instruction qui le déterminera et non nous autres qui n’y étions pas.

Il y va de la stabilité de notre société, de l’équilibre de notre vivre ensemble.

Vive la République !

Vive le Sénégal !

Oumou Wane

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