A SON EXCELLENCE, MACKY SALL. « Dire la vérité et tenir parole constituent des épreuves difficiles pour les esprits retors adeptes du « ndiouth.»

Excellence, vous venez tout juste d’organiser un conseil présidentiel dédié à l’emploi des jeunes. Une telle initiative a été décidée suites aux violentes manifestations du 08 mars qui, malheureusement, ont enregistré plus d’une dizaine de morts sur l’ensemble du pays dont la plupart est tombée sous les balles des forces de défense et de sécurité. Toutefois, bien que difficile à admettre, les forces de défense et de sécurité ont fait montre globalement  d’un certain professionnalisme, sinon le bilan macabre aurait pu etre plus lourd. Compte tenu de la gravité des faits, il faut impérativement diligenter une enquête sérieuse, objective et exhaustive pour situer les responsabilités pour que les auteurs de ces meurtres volontaires ou involontaires soient identifiés et sanctionnés.
C’est incongru, à la limite saugrenu, de se parer des plumes du paon pour revendiquer un mérite qui revient aux forces de défense et de sécurité et non à une prétendue démocratie majeure dont les observateurs savent qu’elle n’existe que dans la tête de ceux qui s’en réclament.
Excellence, moins ou pire qu’une rencontre sérieuse, utile, efficace et judicieuse pour trouver de vraies solutions à la lancinante problématique de l’emploi des jeunes, le conseil présidentiel a eu les allures et les relents d’un raout  ayant regroupé des jeunes militants de votre coalition politique. Les différents  représentants des régions et autres structures invités, se sont employés à discourir, quelquefois superficiellement et maladroitement et, le plus souvent, avec  une légèreté déconcertante, sur les questions de l’emploi qui, en aucun cas, ne peut trouver de solution dans le cadre d’une telle rencontre. Je ne saurais, outre mesure, m’attarder sur la question d’autant que des voix plus qualifiées et plus autorisées que la mienne ont fait des commentaires et des analyses très pertinentes. Certains d’entre eux ont affirmé que votre démarche relève plutôt de la politique politicienne et davantage de la démagogie que d’une prise de conscience réelle des véritables enjeux de l’emploi des jeunes. Je me pose la question de savoir, comment en un laps de temps aussi court, vous avez pu évaluer et déterminé le montant de 450 milliards nécessaires pour régler la problématique de l’emploi Vous nous avez habitués à ces messes partisanes qui servent souvent, sans l’air d’y paraitre, de tribunes pour étaler un narcissisme ou pour affirmer une autorité qui, malheureusement vous fait dramatiquement défaut.
Excellence, l’occasion-vous était donnée, au cours de cette rencontre avec les jeunes de votre coalition qui, malgré tout, n’en demeurent pas moins des jeunes, d’aller dans le sens du renforcement de l’apaisement politique et social qui prévaut présentement dans le pays. Vous auriez dû tenir un discours pour davantage concilier et réconcilier vos concitoyens et rassurer la jeunesse ; vous seriez ainsi en phase avec les recommandations du Khalife Général des mourides qui a souhaité l’observation d’une trêve. Et cela aurait  été plus judicieux, plus intelligent et plus approprié  d’autant que nous sommes en plein ramadan, un mois béni de pardon et de retour vers Le Tout-Puissant. Au contraire, vous avez délibérément choisi de remuer le couteau dans la plaie et ce, devant des jeunes à peine sortis de l’adolescence qui attendaient un discours solennel et magistral, de haute portée pédagogique et surtout rassembleur de toutes les couches sociales, de tous les âges, de toutes les contées et de toutes les diversités de notre nation. Malheureusement, vous n’avez pas pu cacher votre véritable personnalité et votre irritabilité qui, parce qu’incompressible et viscérale, s’est manifestée spontanément et s’est clairement exprimée à travers vos propos belliqueux et comminatoires. Quelle tristesse, quelle désolation ! Les Sénégalais attendaient de vous un esprit de dépassement, une générosité de cœur, une grandeur d’âme, une noblesse de cœur et, surtout et par-dessus tout, une formidable capacité à transcender les clivages pour montrer et démontrer que vous êtes à la hauteur de vos éminentes fonctions de Président de la République. Malheureusement, comme d’habitude, vous avez versé dans le prosaïsme et la trivialité, toutes choses qui ne vous honorent pas. Cessez vos menaces qui ne peuvent pas prospérer auprès des Sénégalais qui ont eu le privilège d’avoir connu des Présidents qui avaient plus de carrure, plus d’aura, plus de notoriété et plus de qualités que vous. Le peuple a su leur résister quand il le fallait. Alors !
Excellence, Allah Le Tout-Puissant, Le Véridique, Le Juste, Le Sage Sait réagir au bon moment. Il a choisi l’opportunité de votre rencontre solennelle et publique pour faire éclater la vérité. L’affaire des « jakaarta », à la fois cocasse et humiliante, a mis à nu une caractéristique de votre régime, le mensonge d’Etat que vous avez érigé en élément paradigmatique de gouvernance des affaires publiques. Le ministre responsable de cette situation honteuse et qui se trouve etre votre beau-frère devrait etre limogé pour vous avoir fait dire une contre-vérité , et de surcroit devant des jeunes censés voir en vous des modèles de droiture, d’honnêteté. Dire la vérité pour certains d’entre vous relève d’une difficile épreuve.
Excellence, votre attitude n’est guère surprenante pour ceux qui vous connaissent. Dans une de mes contributions j’avais dit que n’aviez reculé que pour mieux sauter, c’est à dire essayer de relever ce que vous avez, à n’en point douter, considéré comme un affront, un défi personnel. Beaucoup de vos compatriotes, à l’analyse de votre idiosyncrasie, vous qualifient d’etre un homme grincheux, intolérant, revanchard et rancunier qui semble en vouloir à la société. Vous seriez animé et habité par une animosité permanente qui apparait et transparait dans votre visage toujours renfermé et renfrogné.
Excellence, vous ne cessez de faire montre d’un autoritarisme de mauvais aloi qui vous empêche d’avoir une grande capacité d’écoute et qui, malheureusement, vous amène souvent à tenir un discours belliqueux et comminatoire à l’encontre de vos propres concitoyens. Une telle attitude jure d’avec le comportement d’un grand chef, surtout d’un Président de la République supposé etre le «  Père de la nation ». Une chose est sure, les récentes manifestations  vous sont restées en travers de la gorge et vous êtes en train de ruminer  la forme de représailles à appliquer.
Excellence, je suis parfaitement d’accord avec vous pour dire que l’Etat est fort et restera fort ; mais permettez-moi de rétorquer que le peuple est plus fort et restera toujours plus fort. En votre qualité de chef de l’Etat, vous n’êtes que le modeste et humble serviteur du peuple souverain dont vous n’êtes que le simple, provisoire et temporaire délégataire. Vous avez l’obligation constitutionnelle de le servir, de l’écouter et de le protéger et non de l’apeurer encore moins de le brimer ; soyons clair, cela ne voudrait nullement dire  que vous ne devez pas assumer et assurer vos responsabilités régaliennes qu’on vous demande d’exercer dans le respect de la constitution, des lois et règlements sans abus.
Excellence, je suis totalement en phase avec vous en ce qui concerne votre politique de  faire monter en puissance nos forces de défense et de sécurité par l’augmentation des effectifs et le renforcement des équipements ;seulement, il est à souhaiter que cela n’ait pas pour seul objectif de disposer d’un arsenal répressif pour affronter et brimer le peuple. Le cas échéant ce serait un mauvais choix, une mauvaise orientation et une erreur stratégique. Aucune force publique, aussi puissamment armée et équipée soit-elle, ne peut contenir la furie massive et déferlante d’un vaillant peuple déterminé à se débarrasser du joug de l’oppression, de retrouver sa dignité longtemps bafouée, son honneur de tout temps piétiné et sa liberté éternellement confisquée.
A nos forces de défense et de sécurité dont vous êtes le chef suprême et qui ont le droit voire le devoir de refuser d’exécuter un ordre manifestement illégal, je soumets, une fois encore, en espérant qu’elles en feront un sujet de réflexion et de méditation, ces propos du Général Mark MILLER du Pentagone qui, devant les frasques de Donald Trump disait :
«  Nous ne prêtons pas un serment d’allégeance ni à une religion, ni à un clan, ni à une personne ; Nous prêtons un serment d’allégeance à la Constitution »
L’une des missions fondamentales de nos forces de défense et de sécurité, hormis la défense de l’intégrité territoriale qui en est la principale, est de veiller à ce que la Constitution ne soit point violée par qui que ce soit, fut-il, le Président de la République.
Et la Constitution, présentement en vigueur dans la république du Sénégal, sans jamais évoquer ni mentionner une quelconque clause transitoire, rendant ainsi ses dispositions d’application immédiate, stipule clairement et de manière précise et sans équivoque, en son article 27 que « Nul ne peut faire plus de deux mandatsconsécutifs. »
Sauf à vouloir se faire consciemment et délibérément complice d’une grave forfaiture préjudiciable à la stabilité du pays et à la paix sociale, tout citoyen, tout patriote et toute institution, militaire ou civile, doit s’ériger en bouclier et s’opposer farouchement à la violation de notre Chartre fondamentale.

QUE VIVE LA CONSTITUTION !
Dakar le 24 Avril 2021.    Boubacar SADIO Commissaire divisionnaire de police de classe exceptionnelle à la retraite.

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