Yahya Jammeh, l’anti-héros, Par Alassane Diawara

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La Cedeao est sur le point d’exercer un droit d’ingérence en Gambie pour le respect du choix souverain exprimé par la majorité des électeurs lors d’un scrutin libre et démocratique.

La diplomatie sous-régionale et internationale a épuisé toutes ses capacités de négociation avec, entre autres mesures, le Parlement nigérian qui a voté une motion encourageant le gouvernement Buhari à offrir à Jammeh l’asile et le royaume du Maroc qui continue à lui proposer un exil royal, au moment où tout l’édifice institutionnel gambien s’effondre par pans entiers.

Il a été abandonné successivement par le président de la Commission électorale, des ministres, des ambassadeurs, des juges et, le clou, le président de la Cour suprême qui se rétracte, refusant de bloquer l’investiture d’Adama Barrow  à la veille de la fin de mandat de Yahya Jammeh.

Rien n’est parvenu à dissuader le soldat, marabout-charlatan de Banjul.  Jammeh cherche plutôt à se poser en martyr. C’est, sans doute, ne pas trop avoir le sens des réalités, car il ne saurait y avoir d’ héroisme dans le jusqu’au-boutisme pour un chef d’Etat parmi tant d’autres à travers le monde trainant  un actif et un passif à assumer devant les hommes et surtout devant l’Histoire.

Pour le cas Jammeh, beaucoup est à mettre à son actif dans ce petit pays qui ne dispose d’aucune ressource minière, énergétique ou agricole. Bilan obtenu avec un passif lourd en matière de respect des droits de l’Homme.

Avoir félicité, dans un premier temps, son vainqueur l’a grandi et aurait, sans doute, contribué à atténuer le jugement sur le non-respect des droits humains de son régime. Par ailleurs, il est resté dans la légalité constitutionnelle en déposant un recours pour un nouveau décompte du scrutin.

Mais, ce qui a trahi ses intentions, c’est d’avoir empiété sur les prérogatives de la Cour suprême en demandant de nouvelles élections, puis  des négociations qui auraient comme effet immédiat de lui permettre de garder le pouvoir et lâcher un peu de lest, le temps de se réajuster pour consolider son pouvoir.

L’alibi de l’attente d’un complément d’effectif de la Cour suprême pour statuer sur son recours ne saurait prospérer, parce que tout aurait du être mis en œuvre pour qu’un maillon aussi essentiel dans la marche normal d’un pays soit au complet avant des élections aussi cruciales.

La prolongation de son mandat, par l’Assemblée nationale, ne saurait tromper non plus, la question étant de savoir de quelle marge de manœuvre les députés disposent face au refus du chef de l’Etat, chef des Armées, de céder le pouvoir et le risque d’un enlisement institutionnel encore plus profond.

Le patriotisme de mauvais aloi dans lequel il se drape aurait dû lui dicter d’épargner à son pays et son peuple une épreuve de force dans laquelle il n’a rien à gagner.

John Dramani Mahama a perdu le pouvoir au Ghana il y a quelques semaines par une courte défaite. Il ne manque pas au Ghana de jeunes désœuvrés ou nihilistes qu’il aurait pu manipuler pour semer des troubles et obtenir des négociations au nom de l’impératif de maintenir la paix et la stabilité nécessaires au pays.

Il est parti héroïquement et, ironie du sort, il fait encore partie du quatuor qui négocie une transition pacifique conforme à la volonté exprimée librement par la majorité des Gambiens.

C’est justement à partir du Ghana, l’un des porte-drapeaux de la démocratie en Afrique, que le président Barack Obama rappelait aux chefs d’Etat africains qu’en démocratie les institutions doivent transcender et les hommes et les partis politiques.

Dans ce sillage, viennent à l’esprit les élections présidentielles américaines de 2000 entre le président sortant George Bush et Al Gore et le fameux litige sur le décompte des voix en Floride, Etat dirigé par Jeb Bush, le jeune frère, même père et même mère du président comme on dirait chez nous.

La reprise du comptage des voix a démontré qu’il y avait eu fraude, et chaque nouveau décompte permettait à Al Gore de réduire le faible écart qui le séparait de George Bush.

Lorsque les constitutionnalistes ont attiré l’attention sur le fait que la poursuite des décomptes risque d’empiéter sur l’investiture du futur président prévu à la date immuable du 20 janvier, Al Gore a demandé, au nom du respect du calendrier républicain, un arrêt des opérations, mettant du coup un arrêt à sa course vers la Maison Blanche et à sa carrière politique.

Il a fini par s’investir avec brio dans la lutte pour la préservation du climat. Une leçon qui aurait dû inspirer beaucoup de dirigeants africains, particulièrement Yahya Jammeh. Mais, c’est à croire qu’il veut partir comme un anti-héros.

 

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