OPPOSITION DES PARENTS AUX MARIAGES DE LEURS ENFANTS

Nombreux sont les parents qui s’opposent de plus en plus aux mariages de leurs enfants, pour des raisons qu’ils jugent importantes à leurs yeux et aux yeux de leurs familles. Certains des enfants se révoltent pour sauver leur amour, mais ne tardent pas à payer les pots cassés d’une telle désobéissance. Car, cela pousse souvent la famille à les abandonner et à leur couper les vivres.

Malgré le 21e siècle et la vie moderne qu’incarnent les jeunes, les parents sont toujours attachés à des jugements de valeur qu’ils pensent nécessaires. Ceci par respect pour la tradition ou la pensée de leurs proches à leur égard. Parce que le choix de leurs enfants, pour prendre une épouse, peut leur faire du tort aux yeux de la société.

La décision qui est la plus importante et la moins négligée dans les familles sénégalaises, c’est quand leurs enfants deviennent grands et pensent à épouser leurs compagnons. À ce moment, c’est la mère qui mène son enquête avant l’action finale qui doit être accomplie par le père pour le mariage.

La mère a recours à son griot pour savoir la famille d’origine du jeune homme ou de la jeune famille. La famille est-elle pauvre ? Est-ce une famille  castée ? Quelle est sa religion ? Voilà le début du calvaire des amoureux, et les parents qui feront tout pour les séparer.

La famille « sous-estimée » par manque de moyens, le fameux « xeebaaté »

Les deux parents peuvent refuser de donner leurs enfants en mariage prétextant que l’autre famille n’a pas de moyens. Celle de la fille peut refuser de la marier à n’importe quelle famille, surtout si cette dernière est pauvre. Alors, ils ne vont pas la marier au garçon et l’envoyer ainsi vivre dans la précarité. Surtout pour une fille qui a vécu dans de bonnes conditions et reçu une bonne éducation.

La mère se verra couverte de honte au sein de la famille et devant ses proches. Car, pour certaines mères, pensent ne pas mériter ce qu’elles considèrent comme de l’opprobre, pour avoir vécu et supporté beaucoup de chose dans la maison de leur époux. Raison pour laquelle, sa fille doit avoir le meilleur des maris qui pourra subvenir à ses besoins et à ceux de ses parents, en guise de récompense à toutes ses sacrifices.

Le fait le plus récurrent, c’est quand la famille du garçon, et surtout sa mère, s’oppose au mariage du fils au motif que les parents de la fille n’ont pas de moyens nécessaires pour couvrir de cadeaux la belle-famille. Comme la tradition la demande, une belle fille de la famille doit faire le «téral», comme appelé chez nous, si elle donne naissance à un enfant. Ce baptême sera l’occasion pour la mère d’étaler toutes ses largesses et tous ses moyens pour faire honneur à la famille de l’époux de sa fille.

Khady est une jeune fille de la ville, tombée très amoureuse d’un garçon de son âge et de la banlieue. «Celle qui est devenue aujourd’hui mon épouse, raconte-t-elle. Au début, ma belle-mère avait refusé que son fils m’épousât. C’est parce que, lors de son enquête pour connaître ma famille d’origine, une dame lui a fait savoir que ma mère ne fait pas de téranga». Alors, commence son refus parce que la dame est très matérialiste. On a dû faire monts et merveilles avec mon mari avant qu’on puisse se marier. Quand j’ai eu mon premier enfant, ma mère n’avait pas fait grand-chose, elle n’a donné que de l’argent. C’est à la naissance de mon deuxième enfant que ma mère, pourtant contre ces pratiques consistant à étaler tous ses moyens, couvrit de cadeaux de valeur toute la famille. Rien que pour faire taire les mauvaises langues. Maintenant, je fais partie des préférées de ma belle-mère».

Problème de caste 

Si les enfants n’y accordent aucune importance, les parents croient encore aux castes. C’est un phénomène très présent au Sénégal, même si certains prétendent qu’il commence à disparaître. De nombreux jeunes vivent le grand amour jusqu’au jour où ils prennent l’importante décision de s’unir. C’est en ce moment que commencent les préjugés et l’œil de la tradition envers une relation.

Il y a quelques années, Awa Thiam s’était mariée à un jeune homme. Sans arrière-pensée, le couple croyait qu’il allait vivre le grand amour. Car, même si la mère du garçon était contre leur mariage, prétendant que la fille est castée. Elle ne l’a jamais manifesté, parce qu’elle préférait recourir au marabout. Et c’est après la naissance de leur deuxième enfant qu’Awa entend des rumeurs, selon laquelle sa belle-mère, n’a jamais été d’accord avec son mariage. Elle en parle alors à son mari qui la dissuade en lui faisant comprendre que ce n’est que des rumeurs non-fondées. Mais, quelques mois après la naissance de leur garçon, la belle-mère a enfin réussi son vœu en les séparant sans raison, grâce au pouvoir mystique. Et le couple commence à se disputer pour rien. Et il s’en suit le divorce.

Maintenant que chacun s’est remarié, la fille du couple et l’homonyme de sa grand-mère nourrit une haine tenace contre cette dernière. Selon la fille, la vieille a gâché sa vie et celle de sa mère, car  étant au centre de toutes les difficultés qu’elle a rencontrées à chaque étape de sa vie. Pour avoir séparé ses parents sans penser à elle et à son frère.

Saliou, lui, vit en ce moment en France : «Je n’ai jamais pensé que mon père, un religieux et si fervent musulman, aurait des préjugés sur les castes. J’ai été déçu et surpris, car il connaît bien ce que dit la religion et voyage partout dans le monde pour l’enseigner. La fille et moi, nous sommes tous les deux en Europe. Je suis sorti avec elle pendant un an et j’ai même fait, à son père, la promesse de l’épouser. Quand mon père a voulu me marier à une cousine, je lui ai parlé de ma fiancée. Sa première question a été de savoir si la fille était castée. Je ne savais même pas ces détails et quand ça s’est avéré positif, il a refusé catégoriquement. Toute ma famille, même ma mère, m’a tourné le dos. Elle me menace d’abandon, si jamais je désobéis à mon père. Je suis angoissé et ne sais pas quoi faire, car c’est une gentille fille et je l’aime. De l’autre côté, il y’a ma famille qui m’a déçu et que j’aime aussi. Mais, jamais de la vie je ne vais me marier avec une cousine.»

Le cas de Doudou est plus sérieux car au moment d’apporter la dot après cinq ans d’idylle et de faire les présentations la famille, il découvre avoir affaire à une casté. Aussi se heurte-t-il à un refus des parents de la jeune fille. Le gars s’est marié et a eu deux enfants. Différente de la fille qui l’attend toujours et refuse de se marier à un autre, par amour fou pour Doudou.

La religion de la fille

Les parents sont contre le mariage de leurs enfants pour la simple raison que la jeune fille est soit musulmane ou chrétienne. Et que leurs petits-enfants doivent avoir une mère de la même religion que la famille de son père.

La religion musulmane n’interdit pas à un garçon d’épouser une fille d’une autre religion. Il n’empêche que les parents sont là pour faire la police et n’accepteront jamais une telle union. Pareilles pour certaines familles chrétiennes chez lesquelles il n’y a pas de place pour une fille d’une autre religion dans leur maison. Ces pratiques sont fréquentes, même si les Sénégalais véhiculent des messages pour dire que nous sommes tous des parents, pour une bonne cohabitation dans le pays.

«Patricia a été l’amour de ma vie, même si notre idylle n’a pas duré longtemps, avant de prendre la décision de nous marier. Mes parents ont opposé un refus catégorique pour la simple raison qu’elle est musulmane. D’après ma mère, ses petits-fils peuvent suivre la religion de leur mère. Et dans notre famille, il n’y avait jamais eu auparavant une fille musulmane. Alors, elle ne sera pas la première à la tolérer pour essuyer après les critiques de sa famille qui est très stricte sur la religion.»

Chacun a son histoire quand il s’agit de prendre la décision la plus importante de sa vie. Car, les parents sont très influents et ont leur mot à dire pour sauvegarder, d’après eux leur dignité.

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