Leçons d’un scrutin : « sans grandeur, sans hauteur et sans gloire » (Par Aly khoudia Diaw)

Leçons d’un scrutin : « sans grandeur, sans hauteur et sans gloire » (Par Aly khoudia Diaw)

 

Ainsi donc les rideaux sont tombés. Les législatives sont passées et tout le monde retourne à ses occupations habituelles. Il restera encore les eternels débats d’après élection ou chacun essaiera de se justifier pour se donner bonne conscience, expliquer sa défaite ou sa victoire, d’autres tenterons de donner des explications à leurs contre performances. C’est connu, s’il y’a un terroir dans la terre des humains ou la parlotte est la chose la mieux partagée, c’est bien dans une république que l’on appelle le Sénégal, pays d’Afrique de l’ouest le plus avancé sur l’atlantique. Il faut souhaiter que ça dure. Il faut surtout féliciter le peuple sénégalais qui, malgré tout, est allé faire son devoir civique. N’empêche il est bon, de s’arrêter pour tirer quelques enseignements de ce scrutin qui à mon avis n’honore pas le Sénégal, ni les sénégalais. Nous ne ferons pas de la philosophie, mais évoquer des évidences que tout le monde a constaté. Quelques points seront simplement visés et explicités.
Les couacs habituels
Au Sénégal les élections se suivent et se ressemblent, la même administration, la même classe politique, le même matériel électoral, les mêmes votants et bien sur toujours les mêmes impaires. Problèmes de bulletins insuffisants ou absents dans les bureaux de vote, cette année problèmes de pièces d’identité et surtout de localisation de son bureau de vote, ou à défaut d’avoir son récépissé, de savoir ou est- ce qu’on va voter. Il s’y ajoute un problème d’acheminement de matériels, problème du fichier électoral,  brefs des récriminations qui ont deux fois notre âge et qu’on ne parvient toujours pas à régler. Mais cette fois, on ne fera pas l’impasse sur la problématique des cartes d’identités ou tout le monde reconnait que 50 milliards ont été débloqués pour la confection. S’il s’agit de la personne dont je connais le nom, entremetteur des Malaisiens et que tout le monde connait depuis le régime de Wade pour n’avoir terminé aucun chantier de jaxxay, ni même les chantiers de Touba, alors croyez bien qu’il ne faudrait pas insister. Il n’en fera rien et personne ne lui posera aucuns problèmes. On signalera simplement que c’est une honte pour l’administration sénégalaise de devoir être à la remorque d’un homme politico- affairiste et sur lequel elle n’a aucune prise. Mais là aussi rien de nouveau car même sous wade, ministres, députés, politiciens étaient devenus des promoteurs économiques.
Les 47 listes et la problématique des indépendants
Il ne faut pas s’en faire, à la prochaine élection on aura 200 listes pour la présidentielle. Je dis toujours qu’au Sénégal, il est interdit d’avoir une ambition politique à l’intérieur d’un parti. Que ce soit AFP, APR, PDS, PS, et tous les autres partis politiques, le créateur en fait un patrimoine personnel. Le discours sur la démocratie interne, les questions d’idéologie, le débat interne est de la poudre aux yeux, un discours que l’on aime refréner à longueur de journée pour leurrer les gens. Mais tout le monde sait que ce n’est pas vrai. Abdoulaye wade léguera son parti à son fils, Gakou n’aura pas l’AFP à cause de ses ambitions politiques, Khalifa Sall n’aura pas le PS sauf si tanor revient à la raison, à l’APR Macky sera omniprésent, etc. donc l’alternance démocratique au sein des partis au Sénégal n’est pas une réalité. Ensuite, les créatures de Abdoulaye wade sont une parfaite illustration  de l’illusion de destin factice. Beaucoup de personnes, politiciens ou autres ont cru, parce qu’ils ont été ministre, député, DG, à un destin national. Ils se sont cru investi d’un devoir divin, se sont découvert de vertus parfois surnaturels alors qu’en réalité rien dans leur cursus politique, administratif, sur le plan de l’expérience et de la compétence, ne vient corroborer une telle croyance. Il va falloir sérieusement réfléchir sur la qualité des hommes qui nous gouvernent ou qui gèrent notre administration. Sous le régime de diouf, pour être directeur national, il fallait être de la hiérarchie A, mais surtout faire 8 année dans une direction, passer dans un service, une division, parfois même faire le cabinet pour espérer être nommé directeur. C’est avec wade que l’on a vu que pour certains politiciens grand chômeur, le premier poste de travail peut être ministre, député ou DG. Ce sont ce genre de personne qui ont cru devoir demander le suffrage des sénégalais. La majeure partie des créatures de wade ont formé leur propre parti politique (droite parallèle au PDS). Mais que voulez vous, le règne de wade a été le règne de tous les possibles. Enfin il y’a l’intrusion de plus en plus marquée des fonctionnaires, universitaires, société civile, personnalité indépendant qui commencent à envahir le champ politique. Ce dernier aspect est à encouragé dans la mesure où nous devons nous engager pour que le discours que nous tenons en dehors des partis politiques, nous puissions le tenir à l’intérieur et éviter de dire « je suis apolitique ».  L’apolitisme n’existe pas, c’est une position de lâcheté, d’impuissance, parfois de cautionnement de l’innommable, parfois de complicité, bref le rôle d’un intellectuel c’est de prêter le concours de sa pensée, en tout temps et en tout lieu, c’est un devoir moral, c’est un devoir civique. Je soutiens que toute personne douée d’un minimum de savoir, d’éthique et de moral, d’une vision claire et d’une indépendance financière doit s’engager politiquement pour apporter son expérience et son concours dans la formation des jeunes, dans le renforcement de l’idéologie dans les partis, dans l’enseignement des valeurs civiques, dans l’animation des partis.
Mais s’il y’a    une chose que les sénégalais ont assimilé, c’est toujours l’élection de personnalité politique connue. Dans les années 90 Mademba sock sort de prison après que Diouf l’ait enfermé à cause d’une violente coupure d’électricité. Le monsieur sort et est presque accompagné chez lui par tout Dakar avec un cortège impressionnant. Certains scandaient « Mademba président ». Il était devenu un héros et cru bon d’aller solliciter le suffrage des sénégalais. Il n’obtient rien du tout. Alioune petit Mbaye pensait que l’espace politique sénégalais était essentiellement composé de lutteur. Après ses succès retentissants dans l’organisation de combat de haute facture, lui aussi cru bon d’aller solliciter le suffrage des sénégalais. Il n’obtient rien du tout. On peut citer les exemples de Mame Adama Gueye, d’Ibrahima fall, Moussa Touré, etc. Les sénégalais n’élisent pas des aventuriers  depuis l’aube des temps.
Les surprises du siècle, « Ku wéet, kham sa Bopp »
Le président Macky Sall doit certainement rire sous cape car en ce qui concerne les sénégalais, surprise ne peut pas être plus grande, je parle même d’hécatombe, de victoire de la raison sur la roublardise, le populisme, la démagogie, la vengeance, la rancœur. Abdoul Mbaye, Gadio, Baldé, Maitre El Hadji Diouf, Amsatou Sow Sidibé, Tounkara, Sonko, Mboup et farba, Jules Ndéné, Mame Makhtar Gueye de RDS, Aida Mbodj, Gakou pour ne citer que ceux là doivent bien se demander si les résultats sont sortis, à la manière de nos lutteurs qui se demandent toujours pourquoi l’arbitre ne siffle pas le début du combat alors qu’il est déjà fini par K.O. je pense qu’il y’a erreur car en toute sincérité, certains de ses leaders méritent quand même d’avoir une représentation à l’assemblée. Mais en attendant et au cas contraire, chers messieurs, il faut se rendre à l’évidence, la rationalité a gagné désormais le vote des sénégalais. On a toujours cru que le vote était affectif, c’est vrai, on a aussi cru que les sénégalais pouvaient voter pour de l’argent d’autant plus qu’à chaque élection, les partis les plus riches sont toujours en tête. C’est aussi vrai. Mais il va falloir désormais penser que la carte des sénégalais n’est plus pour les aventuriers, les occasionalistes, les opportunistes de tout bord qui pensent qu’ils peuvent se servir des sénégalais pour assouvir des ambitions personnelles. Autrement dit il est difficile de comprendre pourquoi tous ceux que l’on ait cité ne soient même pas nommés dans les résultats proclamés par les radios à cause des zéros qu’ils ont obtenus. On attend avec impatience, les discours qu’ils vont tenir dans les semaines à venir.
Benno, Taxawou Sénégal, watu Sénégal
Il semble que trois pôles ont émergé à l’issue de ce scrutin avec des fortunes diverses. Benno book yakar  devrait avoir le triomphe modeste. Benno ne fera comprendre à personne que Khalifa n’a pas été emprisonné pour des raisons politiques. Quand on est au pouvoir, on lit la réalité à partir de prismes déformés, c’est-à-dire à partir d’évidence que vous êtes le seul à comprendre.
Vous voyez ce que la majorité ne voit pas, vous croyez ce que la majorité ne croit pas et tout devient relatif pour vous. Des gens peuvent être agressés, violentés, parfois même tués, cela ne vous émeut pas, il faut juste dérouler le rituel de circonstance et passer à autre chose. Personne ne vous décrit la réalité telle qu’elle se présente, on ne vous informe jamais de la profondeur des choses, jusqu’au moment ou les choses franchissent le point de non retour. Abdoulaye Wade lui-même en est la parfaite illustration. Lorsqu’il a proposé le ticket présidentiel un mardi matin, on le voit le soir fanfaronner devant la télévision pour dire ceci : «  j’ai entendu que lorsque l’opposition a entendu la proposition, elle est restée groggy et abasourdie » et tout son entourage d’applaudir.  Deux jours plus tard le Sénégal tout entier lui fit comprendre que sa grille de lecture était déformée. C’est ça le pouvoir au Sénégal. Une fois installé, vous vous reniez. On se demandera toujours qu’est ce qui lui a fait croire que le Sénégal acceptera que son fils lui succède, par n’importe quel subterfuge. Des choses que tout le monde voyait venir, Karim qui prenait de jour en jour plus d’importance dans l’appareil étatique, Karim qui utilisait l’avion présidentiel pour un oui ou pour un non, Karim placé 3éme sur la liste des futures conseillers pour les locales de 2009, bref des choses tellement « téléphonées » comme disent les jeunes qu’on se demandait si réellement ce vieux respectait les sénégalais. Je pense que c’est à peu prés ce qui arrive encore au peuple sénégalais. Comme si l’histoire se répétait. Le pétrole, l’omniprésence de la France dans l’économie sénégalaise, Cité Tobago, Tivaouane Peulh, incarcération, exclusion de compétences avérées dans l’administration, etc., tout y passe. Il ne faut jamais oublier,  que ce n’est pas l’absence de réalisations et de politique qui ont fait partir Wade. Les sociologues comme moi pensent que c’est le contentieux social, plus sournois, plus insidieux qui braque les populations contre vous. Nous sénégalais, nous ne demandons pas beaucoup, juste nous respecter, en tant que citoyen. Quand à Khalifa Sall, nous évoquons son cas comme on l’a fait pour l’affaire Sonko, et d’ailleurs comme des milliers de sénégalais l’avaient fait pour l’actuel président lorsque le régime libéral vous a accusé de blanchiment d’argent et à voulu vous arrêter. Et c’est Cheikh Tidiane Sy qui réveille tout le Sénégal à 1 heure du matin pour porter la nouvelle. Cette nuit là, on a juste écouté, rigolé et on s’est endormi. Tout le monde savait que c’était une machination pour terrasser l’actuel président et le lendemain, interrogé sur walfadjiri, j’ai personnellement dénoncé, avec beaucoup d’autres intervenants, cette machination grotesque. Hier c’était le PDS qui voulait  nuire à un homme juste parce qu’il avait convoqué Karim Wade, aujourd’hui c’est l’actuel régime qui tente de nuire à Khalifa, à Sonko, à Thierno Alassane Sall, Bamba fall, etc. C’est pourquoi vous président, vous n’avez pas le droit de faire comme Wade car on n’attend de vous un arbitrage et une position à équidistance des personnes et des situations. En définitive cette victoire de Benno dans la capitale n’a aucune grandeur, aucune hauteur et est sans gloire. Parce que Benno a « coupé les mains » à Khalifa Sall, d’abord, ensuite Benno l’a retourné et s’est placé derrière lui, et enfin lui « a tiré  une balle » dans  le dos. Ou est la grandeur, ou est la gloire, ou est la hauteur ? Le 08 janvier 1996, François Mitterrand décède. Quelques heures après l’hommage de la France à son président, François Mitterrand frappe aux portes du paradis et c’est le général De Gaule qui vient ouvrir. Il le salue et lui dit : «  Bonjour François et bienvenue. Tous mes vœux d’éternité ». Et oui, l’éternité et la grandeur, et non pas seulement l’histoire, caractéristique des grands hommes, « les hommes premiers » comme dirait Hegel.

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