Samba Ndao ne fait certainement pas la fierté des « Serigne Daaras …. Maître coranique de son état, il a, en 2016 à Yeumbeul, mortellement battu son talibé de 12 ans, Ameth Dame Niang, avec une cravache dont on se sert pour les ânes et les chevaux. Poursuivi pour coups et blessures volontaires commis sur un enfant de moins de 15 par une personne ayant autorité sur lui, le procureur a requis à son encontre 15 ans de travaux forcés.
Dans un contexte où les maîtres coraniques sont jetés en pâture du fait que beaucoup de talibés sont battus à mort, les 4 enseignants Cheikh Syll, Moustapha Syll alias Tapha Khouma, Aliou Guèye alias Bada Guèye, Ousmane Syll et Samba Ndao risquent gros. Parmi les 10 maîtres coraniques de cette école de 140 apprenants, ils ont été traduits devant la Chambre criminelle de Dakar pour la mort du talibé Ameth Dame Niang âgé alors de 12 ans. Ces faits de coups mortels commis sur un enfant de moins de 15 ans par une personne ayant autorité sur lui, de coups et blessures volontaires commis sur un enfant de moins de 15 ans, et de non-assistance à une personne en danger remontent au 26 janvier 2016, à Yeumbeul.
Le jeune talibé battu et abandonné agonisant
L’enquête ouverte a permis d’auditionner certains élèves du daara qui ont été unanimes à dire que Samba Ndao avait violemment donné des coups de cravache au talibé Ameth Dame Niang. Mais, pire que ça, lorsque son collègue Cheikh Syll est intervenu pour arracher la cravache quand il le bastonnait, il a utilisé ses poings pour donner de violents coups au défunt et un autre coup de coude au dos. Sous le poids des coups, le talibé s’est affalé au sol. Et au lieu de le secourir, son présumé meurtrier ainsi que les autres l’ont laissé à même le sol durant 1h30mn alors qu’il agonisait. Le frère du défunt talibé a soutenu qu’il saignait des narines lorsque le maître coranique le battait. Et c’est lui qui a utilisé un mouchoir pour nettoyer les narines de son frangin.
Le Talibé est frappé pour qu’il maîtrise ses versets du Coran
Interpellé sur les coups qui ont abouti à la mort du talibé, son maître coranique Samba Ndao les a reconnus. Et pour se justifier, il a soutenu qu’il il a frappé Ameth Dame Niang juste pour qu’il maîtrise ses versets du Coran. Sur les blessures corporelles constatées sur le corps de la victime, les talibés ont unanimement déclaré qu’elles ont été causées par les maîtres coraniques de ladite école. Et pourtant, les investigations avaient révélé que le directeur de cette institution coranique, Mactar Sylla, avait interdit aux maîtres coraniques d’infliger des corrections aux talibés de son daara.
Samba Ndao : «Je voulais juste qu’il maîtrise le Coran, mais je n’avais pas l’intention de le tuer»
Après plus de 3 ans de détention préventive, Cheikh Syll, Moustapha Syll dit Tapha Khouma, Aliou Guèye alias Bada Guèye et Samba Ndao ont été traduits devant le juge de la Chambre criminelle de Dakar, où ils répondaient de ces crimes précités. Auteur présumé des faits qui ont conduit à la mort de Ameth Dame Niang, le maître coranique Samba Ndao a déclaré : «j’ai fait 10 mois dans cette école. J’ai frappé la victime Ameth 2 fois. Une fois avec le fil sur le corps. Aussi, je lui ai donné un violent coup sur le dos avec mon coude. Le jour des faits, les coups que je lui ai infligés n’avaient pas duré. »
Cheikh Syll : «il lui arrivait de bastonner les talibés avec une cravache qu’on utilise pour les ânes et les chevaux»
Interrogé, Cheikh Syll, responsable dans le daara, a enfoncé Samba Ndao, le présumé meurtrier du talibé. «Ce que Aliou Guèye alias Bada a dit est vrai ; si le talibé est têtu, il le renvoie. Mais, ça lui arrive de bastonner les talibés avec une cravache qu’on utilise pour les ânes et les chevaux. J’avoue qu’il m’arrivait de frapper les talibés mais pas ceux qui sont cités à la barre. Quand Samba frappait Ameth Dame Niang, j’étais dans la salle de classe. C’est lorsque j’ai senti que les coups étaient violents que je suis intervenu pour le raisonner afin qu’il arrête. C’est moi qui ai arraché la cravache de ses mains. Mais, il continuait à le frapper», explique-t-il.
Le procureur requiert 15 ans de travaux forcés
Le procureur a souligné que tous les accusés ont reconnu qu’ils utilisaient un «khiir» pour asséner des coups aux enfants lorsqu’ils ne maîtrisaient pas leurs versets du Coran, requérant de ce fait des peines diverses contres eux. S’agissant de Aliou Guèye qui a nié tout au long de la procédure ces faits, le parquetier a sollicité son acquittement pur et simple. Pour l’auteur principal des faits, Samba Ndao, il a requis qu’il soit condamné à 15 ans de travaux forcés. Une réclusion criminelle de 3 ans a été requise contre Cheikh Syll et 5 ans pour Moustapha Syll alias Tapha Khouma et Ousmane Syll.
Mon client n’est pas un meurtrier
La défense de Samba Ndao, assurée par Me Aboubacry Barro, a confié à la Chambre que son client était juste animé de bonne foi. «Je ne pense pas qu’il soit un meurtrier. Le but poursuivi à l’origine était de lui inculquer une bonne éducation, mais au final, le résultat escompté ne s’est pas réalisé. Je sollicite votre clémence à son endroit», a plaidé Me Barro. Mes Abdou Dialy Kane, Henry Valentin Gomis et Cie ont demandé l’acquittement des autres. Délibéré le 10 mars prochain.