“Baayi lamb balalaa lamba bayi”, arrêter la lutte avant que la lutte ne te lâche, pour mieux comprendre cette maxime. De manière générale, toutes les couches sociales du Sénégal ne prennent pas du recul ou arrêtent de manière définitive leurs activités respectives. Que ce soit en politique, en sport ou une autre activité. Les derniers des mohicans ne veulent pas abdiquer de sitôt.
La lutte fait état de la retraite de beaucoup de ses acteurs qui n’ont plus leurs jambes de 20 ans. Les force -t-on à jeter leur nguimb ou leur veut-on du bien? La récente chute de Yekini a ravivé les débats et la plupart de ses collègues pensent qu’ils peuvent tenir encore. Mais jusqu’à quand?
Baboye: “binde bi moo baakh”
Balla Bèye 2 est l’un des rares papys de l’arène à avoir une bonne plastique. Son corps n’est pas affecté par le mois de l’âge du fait de son centre de gravité très bas. Il a des muscles secs, ce qui favorise une bonne maîtrise de ses moyens, mais aussi, il a une bonne hygiène de vie. Avec son résultat mitigé dans un premier temps contre Tapha Guèye, Baboye s’exile en Italie, mais revient au Sénégal, poussé par ses innombrables supporters. En moins de cinq ans, il dispute plus de combats qu’il n’en a jamais fait en une dizaine de carrière.
Cerise sur le gâteau, il s’offre Bombardier et Gris Bordeaux, dans des combats qu’on lui donnait comme perdus d’avance. Vingt ans (20) après, ce dernier est toujours là et il vient de battre récemment Baye Mandione dans un combat intense, physique et technique. Comme le vin se bonfie avec l’âge, Baboye va s’offrir en novembre un nouveau challenge, contre Rocky Balboa, celui qui reste encore une énigme pour les amateurs sénégalais.
Mohamed Ndao Tyson: “un Cheik” en argile?
C’est le seul lutteur qui n’a jamais disputé de combats préliminaires et son premier cachet a été de cent mille (100.000 F CFA), organisé par Mor Fadam. Mohamed Ndao Tyson ravageait tout sur son passage, alignant dix (10) victoires d’affilée avant de s’enliser devant Bombardier en 2002. Deux ans plus tard, il (re) bat Moustapha Guèye et depuis 12 ans, Tyson n’a battu aucun lutteur. Défait à deux reprises par Yekini, par Bombardier, une fois par Balla Gaye 2 et Gris Bordeaux, “Iron Mike” est au crépuscule de son art. Nommé Cheikh entre temps, il passe le plus clair de son temps entre prières et zikr. A 42 ans (l’âge qui est sur sa licence), il lui reste trois (3) ans à tirer, mais ira-t-il jusqu’au bout?
Yekini: un champion à la rancune tenace?
A force de s’entêter, Yekini peut bien avoir d’autres surprises. Même s’il n’a pas annoncé officiellement qu’il arrête sa carrière, il n’a pas dit aussi le contraire. En 1996, quand Zale Lô le battait lors de la finale du Chef de l’Etat, personne n’imaginait que Yekini allait faire un règne sans partage dans la lutte avec frappe pendant 16 ans. De 1997 à 2011, Yahya Diop a tout fait dans cette discipline, sans compter ses exploits en Afrique avec l’équipe nationale. Il a même poussé l’Etat Nigérien à dissoudre sa fédération après la défaite historique de leur champion, qui a plié devant un Yekini aux mille facettes techniques.
2012 sonne la première alerte avec sa première défaite devant Balla Gaye 2. Quatre (4) ans après, il retrouve l’enceinte maudite de Demba Diop et se fait plaquer par un autre jeune impertinent, Lac de Guiers 2. Le doute s’installe depuis dans l’esprit de l’enfant de Bassoul qui peine à ses retrouver ses sensations d’antan. A 42 ans (c’est l’âge qui est sur sa licence), ce retour s’annonçait difficile d’autant qu’il a perdu des repères et ne pesait pas lourd par rapport à l’attelage physique de Lac de Guiers 2.
Hormis Baboye, ces deux mohicans ont-ils maintenant le choix des adversaires? Ont-ils les moyens de revenir, ne serait-ce qu’en l’espace d’un combat? Avec la force physique de la jeune génération, les risques sont énormes. Et Tyson est mieux placé car il a édenté Mor Fadam, alors que de sa génération, ce géant était un redoutable puncheur.