Ministre Yakham Mbaye, Directeur général du «Soleil»
«Ousmane Sonko est un menteur, le député paye chaque mois 54 567 FCfa d’impôts et non 1 500 FCfa»
Tard dans la nuit, après le face-à-face télévisée entre Ousmane Sonko et le journaliste Pape Alé Niang sur la SenTv, le ministre Yakham Mbaye, Directeur général du quotidien national «Le Soleil», manifestement indigné par les propos du parlementaire, est monté au créneau pour, dit-il, démonter les mensonges de ce dernier. Entretien.
Vous semblez indigné par les propos tenus par le leader de Pastef, le député Ousmane Sonko, hier, lors d’une prestation télévisée. Pourquoi ?
En ce qui concerne Ousmane Sonko, j’avais cru avoir épuisé ma capacité d’indignation, à force de l’entendre depuis des années aligner, qu’on me passe le terme, mensonge sur mensonge. Définitivement, depuis des années, j’ai compris que ce monsieur est prêt à tout pour parvenir à ses fins. Et aujourd’hui, à l’entendre affirmer, de manière péremptoire, certaines grossièretés, je me suis dit que ce monsieur assimile les Sénégalais à un troupeau d’incultes.
Qu’a-t-il exactement dit qui vous exaspère à ce point ?
Enormément de choses !
Mais, je vais me limiter à un exemple. Tous ceux qui ont suivi Ousmane Sonko, au Sénégal et au-delà de nos frontières, l’ont entendu dire : «Au Sénégal, les députés paient mille cinq cents francs Cfa d’impôts.» Comment un homme tenté de devenir Président de la République, qui a poussé la pédanterie jusqu’à s’autoproclamer gardien du patriotisme sénégalais, qui adore se positionner en héraut de l’éthique, peut-il mentir avec une telle audace ?
Donc, c’est inexact ce qu’il a dit ?
C’est pire ! C’est un énorme mensonge. Le député sénégalais paie trente-six fois plus d’impôts que ce que Ousmane Sonko dit.
Ah bon ?
Mais absolument !
Le montant brut imposable du salaire d’un député sénégalais est de huit cent vingt deux mille cinq cent quatre (822 504) francs Cfa. Et il est soumis à trois types d’impôts : un «Minimum fiscal» de 1 500 FCfa ; un «Impôt sur le revenu» de 17 067 FCfa ; une contribution à la «Caisse pour la retraite des députés de l’Assemblée nationale» de 36 000 FCfa. Ces montants sont inscrits noir sur blanc sur le bulletin de salaire de Ousmane Sonko et des autres députés.
Au total, chaque député sénégalais se voit imposer mensuellement cinquante quatre cinq cent soixante sept (54 567) francs Cfa. C’est-à-dire, comme je le disais plus haut, plus de trente-six fois le montant que Ousmane Sonko a balancé à l’opinion pour ternir l’image d’une institution à laquelle il appartient. C’est infâme ! Car, un homme qui chante l’éthique, la bonne gouvernance, le patriotisme, qui appelle l’enterrement de première classe d’un «système» qui aurait organisé le pillage des ressources du Sénégal depuis l’indépendance, et je ne sais quoi encore, doit avoir honte d’user de la pire des armes : le mensonge, jusqu’à être pris en flagrant délit continu depuis des années.
Dans le cas d’espèce, vous comprendrez qu’il a sciemment occulté deux des trois rubriques qui renseignent sur l’imposition du député (l’«Impôt sur le revenu» et la contribution à la «Caisse pour la retraite des députés de l’Assemblée nationale») pour agiter le «Minimum fiscal» qui monte à 1 500 FCfa.
Selon vous, quel est l’effet recherché ?
Il est clair et machiavélique : monter de nombreux «goorgoorlu» (ndlr : Sénégalais qui peinent à joindre les deux bouts) contre ceux que lui Ousmane Sonko représente comme les animateurs d’un «système» honni. Avec le message suivant : «Vous peinez à avoir 1 500 FCfa pour assurer la dépense quotidienne, au moment où ces gens qui gagnent des centaines de milliers de francs Cfa paient le même montant en impôts.» Ceci peut révolter tout Sénégalais qui ignore qu’il a en face de lui un sacré menteur.
Ousmane Sonko peut s’acharner contre les Institutions de la République, en dénigrant injustement leurs représentants, mais, ces derniers valent mieux que lui. Depuis près de trente mois, en plus de moult avantages, comme député, il perçoit mensuellement plus d’un demi million de francs Cfa au titre de «Complément d’indemnité de représentation». Une somme qu’il encaisse toute honte bue pour ensuite aller «représenter» cette institution à sa manière : en l’insultant.