Médina rue 22×17. Dans ce populeux quartier de Dakar, se trouve Sinthiap Ndakarou.
Médina rue 22×17. Dans ce populeux quartier de Dakar, se trouve Sinthiap Ndakarou. Dans une grande maison en baraques, Keur « Ndey ji Reew » (dans l’organisation léboue, c’est en quelque sorte chez le dignitaire qui fait office de Premier ministre du Grand Serigne, chef suprême de la collectivité), la chambre qui se trouve à l’extrême droite de l’entrée principale est hermétiquement fermée. A l’intérieur, se trouve une boite à trésor. Un trésor qui date plus d’un siècle. Elle contient un secret précieux sur le fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba, que les Lébous conservent, jalousement.
Il s’agit d’une pierre sur laquelle Cheikh Ahmadou Bamba s’asseyait pour faire ses ablutions, lors de son séjour à Dakar suite à son retour d’exil au Gabon, en 1902. Ce bloc de pierre est, aujourd’hui, minutieusement, gardé au siège de l’actuel « Ndey ji Reew » de la communauté lébou. Il est bien gardé et protégé dans la chambre du vieux Moussé Diagne, ancien Ndey ji Reew. La sécurité du lieu est assurée par Alassane Diallo. Des objets anciens décorent la chambre où trône un moyenâgeux lit en fer. Des photos en noir et blanc sont postées dans les différents coins de la piaule. « Personne n’y passe la nuit. Cette chambre est tout le temps fermée. Elle n’est ouverte qu’en cas de visite », informe Alassane Diallo, non sans fierté.
Actuel grand Serigne de Dakar et non moins député à l’Assemblée nationale, Abdoulaye Makhtar Diop est notre guide du jour. Il revient sur l’histoire de ce bloc de pierre. A l’en croire, en partant au Gabon en 1895, Cheikh Ahmadou Bamba était resté à Dakar plus longtemps que prévu parce que, le voilier qui devait le transporter était en panne.
Sept années après, c’est-à-dire en 1902, le Cheikh revient de son exil. Il était accueilli encore par les dignitaires de la collectivité léboue parmi lesquels l’un des « Ndey ji Reew » à l’époque, Moussé Diagne avec Assane Ndoye, Amadou Sy entre autres. Ces derniers l’ont reçu au « Penc de Santhiaba » qui se trouvait aux angles de l’avenue Lamine Gueye et de l’avenue Faidherbe. « Nos ancêtres ont recueilli le bloc de pierre sur lequel était assis pendant un moment le Cheikh pour faire ses ablutions », a expliqué le Grand Serigne de Dakar.
Selon Abdoulaye Makhtar Diop, c’est connaissant la ferveur et l’enthousiasme des mourides que ce bloc de pierre n’a jamais été exposé au grand public. « Il faut qu’on s’organise pour que ça devient un lieu de visite », prévoit-il. Qui indique que les dignitaires de la communauté léboue vont s’organiser pour essayer de voir comment le Khalife, si son agenda le lui permet, pourrait bien passer voir le bloc de pierre. « La pierre n’est pas un objet d’adoration mais ça fait partie des reliques », précise-t-il.
Cependant, Abdoulaye Makhtar Diop ne semble pas être contre la restitution de ce bien précieux à la confrérie mouride. Selon lui, tout dépend de l’entente qui naîtra des communautés. « Nous avons Massalikoul Jinaan à Dakar et, on prévoit d’y mettre une salle de conservation d’œuvres appartenant à Cheikh Ahmadou Bamba. Je crois que Massilkoul Jinaan peut être un lieu sûr pour garder cette pierre. En sus, la mosquée pourra être un lieu du tourisme religieux », a soutenu le grand Serigne de Dakar qui pense que c’est même plus opportun que cet objet précieux soit mis à la disposition des mourides. « Nous allons y travailler », s’engage-t-il.