Un Magistrat se confie: « Ce que Deme a dit tout haut, ses collègues le pensent tout bas… »

La polémique fait rage au sein de la magistrature. La dernière en date remonte à celle de la démission de Ibrahima Hamidou Deme, substitut général près de la Cour d’appelle de Dakar, du Conseil supérieur de la magistrature, instance dirigée par le président de la République. Senego s’est entretenu avec un haut magistrat sous couvert de l’anonymat afin qu’il nous fasse part des dessous de cette affaire qui continue de défrayer la polémique, au sein de cette instance suprême. 

« Je pense que ceux qui disent qu’au sein de la magistrature il y a des difficultés, ils ne savent pas ce qu’il en est« , souligne d’emblée, notre interlocuteur qui a tenu à préciser que les magistrats, depuis l’indépendance du Sénégal, de la justice, partent à la retraite à l’âge de 65 ans. Pour revenir au cas de M. Ibrahima Deme, notre source de confier qu’il faudrait que les gens comprennent qu’il y a deux malaises au sein de la magistrature sénégalaise.

« Le premier, c’est le cas de Mamadou Badio Camara, premier président de la Cour suprême, qui est désavoué par toute la magistrature, car en annonçant ce projet, il avait demandé qu’il y ait des primaires au sein de la Cour suprême. Parmi ces 30 hauts magistrats qui devaient statuer, 25 ont voté non, ils n’ont pas voulu de ce projet. Mais nous, nous savons, qu’à partir du mois d’avril, M. Mamadou Badio Camara part à la retraite« , précise-t-il.

Et pour qu’il n’y ait plus de dégâts au sein de la magistrature, il serait important, d’après lui, que l’autorité en personne en prenne compte. En quoi faisant, « soit qu’il nomme Mamadou Badio Camara ambassadeur ou qu’il quitte la magistrature », confie-t-il. Pour ainsi dire que le malaise c’est M. Badio Camara.

Le second aspect, c’est le Garde des Sceaux ministre de la Justice. Ainsi, il trouve qu’ « En tant que ministre de la Justice, son rôle étant de fédérer, de massifier, rencontrer tous les magistrats et d’échanger avec eux. Mais, ce que M. Deme a eu à dire en tant que juge, tous les magistrats le disent. Etant membre du Conseil supérieur de la Magistrature, après la rentrée solennelle des Cours et Tribunaux, il est important que l’autorité en personne consulte les membres afin de voir l’état d’avancement des magistrats. Soit ceux qui doivent partir à la retraite, ceux qui doivent être promus« .

« Vous savez qu’au sein de la magistrature, avance notre interlocuteur, c’est comme à l’armée. Ce qu’ils oublient, c’est que M. Dème, comme il l’a si bien dit, avant de démissionner, en tant que membre du Conseil supérieur de la magistrature, s’est concerté avec le collège qui l’a élu. Ce collège même, au sein de cette instance, constitue plus de 80% de la magistrature sénégalaise. Nous parler de magistrats qui partent à la retraite, pour ça il n’y a pas de soucis. Mais, il y a des choses que nous ne saurons cautionner », peste-t-il.

Selon toujours notre source, au moment de faire des nominations, au moment de faire des consultations à domicile pour des postes aussi importants au sein de la magistrature, il ne faut pas oublier que c’est les juges qui proclament les résultats lors des élections. Pour ainsi dire que la magistrature c’est la souveraineté, la transparence. Donc à ceux là qui disent que M. Deme peut être sanctionné, notre interlocuteur est d’avis qu’ils se trompent sur toute la ligne. Car, le président du conseil constitutionnel est à la retraite. Son mandat a expiré depuis plus d’un an.

« Les gens n’en parlent pas. La date des législatives est prévue pour le 30 juillet prochain. Mais jusqu’à preuve du contraire, M. Pape Omar Sakho, premier président du Conseil constitutionnel est à la retraite. Quand les Sénégalais ont voté une loi par rapport au Référendum, c’était pour ajouter deux membres du Conseil constitutionnel proposés par le président l’Assemblée nationale. Et jusqu’à présent, aucun membre n’a été choisi. Que le président de la République prenne ses responsabilités. Les gens ne veulent plus de Me Sidiki Kaba« , renchérit-il.

Il s’y ajoute que,  « le premier président de la Cour suprême, Mamadou Badio Camara, je le rappelle, ses propres collègues, au sein de cette instance, lors des élections, ont voté contre lui. Sur ce nous demandons au président de la République de se séparer de ces deux corps. Vu qu’il a des collaborateurs, des juristes au Palais en occurrence Me Oumar Youm et Ismaïla Madior Fall qui peuvent le conseiller la-dessus« . Et dans un contexte des Législatives qui approchent, notre magistrat trouve qu’il est important que le président de la République nomme un tout nouveau président du Conseil Constitutionnel.

Car, il trouve extrêmement grave que celui qui doit proclamer les résultats, lors de ces élections, soit à la fin de son mandat. « Ainsi, si plus de 95% des magistrats tournent le dos à l’Autorité, c’est extrêmement grave. Car, Macky Sall est le président du Conseil supérieur de la magistrature. Il doit ainsi se séparer de Me Sidiki Kaba qui est en train de bousiller le travail de la magistrature sénégalaise. Maintenant, s’il parle de conseil de discipline pour nous rebelles, ils n’ont qu’à le faire pour ces 95% de magistrats qui sont contre cette loi« , martèle-t-il.

« Deme n’est pas le seul, d’autres ne sont peut être pas en mesure de parler, mais le moment venu, tous vont parler. Nous avions fait une assemblée générale, cette fois-ci nous avons convoqué tous les magistrats du Sénégal qui viendrons lors d’une assemblée générale, et cette fois encore, ils n’hésiteront pas à parler. Nous ne reculerons plus« , conclut-il.

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