Puisqu’il est question d’histoire, il est important et impératif de commencer par nous situer. Bien nous situer.
Hier, Mardi 10 mai 2016, était célébrée la journée de commémoration de l’abolition de l’esclavage. Cet événement a été l’occasion, pour la grande chaîne de télévision française France2, de diffuser en première mondiale, le film Bois d’ébène du cinéaste sénégalais Moussa Touré dans lequel l’acteur Sa Nekh joue, qui retrace le destin d’un village guinéen né libre, et devenu esclave.
Un film essentiel, une production majeure annoncée par la dite chaîne en début de l’année 2016.
Nous sommes en 1825, deux décennies avant l’abolition de l’esclavage en France. Tout un village guinéen se fait voler sa liberté par un groupe de négriers. Parmi eux Yanka et Toriki. Ainsi, commence le documentaire-fiction de Moussa Touré.
Au-delà du chiffre effroyable de 12 millions d’esclaves vendus et exploités, cité au début du film, le réalisateur choisit de s’attacher au destin de ces personnages pour mieux tâter l’enfer de la traite humaine. Arrachés de leur terre, ils seront emmenés par bateaux jusque de l’autre côté de l’Atlantique pour travailler sur les plantations du Nouveau Monde. On suit le tri de ces femmes, hommes et enfants, avec des critères similaires à une sélection de bestiaux. Il les faut être solides, eux qui vont devoir survivre à la traversée et à une vie de forçat en Amérique.
Pour adoucir l’horreur relatée dans ce film, d’une histoire de l’humanité à la couleur ébène, le réalisateur fait appel à un traitement cinématographique très poétique de par les images et le rythme. Mais cela ne lui ôte aucunement le caractère heurtant et insultant de la passivité d’un peuple « désorganisé », bête de par « ses autorités » qui se laisse asservir en esclave sans réaction aucune. Reflet certain d’une histoire telle qu’on a voulu le faire croire aux africains du temps colonial et d’aujourd’hui.
La non-résistance des noirs d’Afrique face à cet asservissement est un mensonge. Le répéter et le transmettre à l’humanité et à la postérité à travers ce film est une grossièreté.
Nous savons que la résistance à la traite des Noirs, aux enlèvements de captifs a existé en Afrique: les gens s’évadaient des caravanes d’esclaves, ils opposaient une résistance au moment du chargement dans les navires. Des voyageurs ont rapporté qu’ils avaient vu des villages entourés de palissades de bois très hautes, capables de protéger contre les raids des chasseurs d’esclaves.
Si le geste de France 2, de produire ce documentaire-fiction sur l’esclavage en en confiant la réalisation à un africain, est louable, il est à noter que l’Afrique et sa jeunesse attendaient de ce film, une notification notoire de cette résistance de ses aïeules, aussi minime soit-elle.
« Peu importe la forme. Le fond doit savoir répondre à un certain nombre d’attente pour bannir tout invraisemblance fictionnelle ou historique.
La passivité de genre «Noir» ainsi que sa traitrise historique sont les pires mensonges généralisables et généralisé…
Mais je refuse et refuserai encore et toujours » que l’histoire factice, fictive et mensongère de mon peuple soit ainsi conté à mes paires, enfants et petits enfants. #CoupDeGueule » pour reprendre un coup de gueule d’un jeune sénégalais à propos du film dont il est question.
Cheikh Omar NDIONE