Le Sénégal et le Fmi trouveront-ils facilement un accord dans la gestion macroéconomique du pays notamment en matière budgétaire ? Tout porte à croire que les négociations seront difficiles et pourraient parfois buter sur un point d’achoppement comme la subvention à l’énergie. Le Fmi qui tient beaucoup à la réduction de cette enveloppe n’a jamais raté une occasion pour le rappeler.
Or, dans la loi de finance initiale 2025 (votée sans débat), les autorités n’ont pas tenu compte des injonctions du Fmi. Dans les dépenses de transferts courants qui connaîtront une hausse de 20,9%, il est prévu « la prise en compte de la subvention pour le secteur de l’énergie à hauteur de 450 milliards de FCFA, montant conforme au niveau réel des subventions consenties au cours de l’année 2024 ». Autrement dit, le montant réel de l’année dernière a été reconduit, donc pas de baisse.
Une décision que regrette Majdi Debbich, représentant résident du Fonds monétaire international (Fmi) à Dakar. Interrogé par le journal Le Soleil, il déclare : «Nous notons, par ailleurs, l’absence de réforme des subventions à l’énergie dont le niveau demeure inchangé par rapport aux réalisations de 2024. Or, nous savons que ces subventions sont très coûteuses et qu’il est généralement plus efficace de soutenir directement les ménages les plus vulnérables avec des aides ciblées.»
De son côté, l’Etat annonce des ‘’mutations majeures’’ dans le secteur de l’énergie avec par exemple « d’importantes réformes structurelles en 2025 avec notamment, le renforcement du cadre sectoriel, avec la finalisation et la promulgation du nouveau Code de l’Électricité, accompagné de ses textes d’application ».
La Senelec sera aussi restructurée. L’Etat annonce également la révision de la structure des prix des produits pétroliers, sans plus de détails sur les résultats attendus et les délais. Une batterie de mesures qui, au vu de la sortie de Majdi Debbich, ne satisfait pas l’institution de Bretton woods.
Mais le gouvernement est sans doute conscient qu’une hausse sur le prix du carburant ou de l’électricité aura des conséquences douloureuses du fait du caractère transversal de l’énergie dans la production et les services. Dans ce contexte de forte attente d’une baisse du coût de la vie, une majoration des prix de l’énergie serait suicidaire pour le tandem Diomaye-Sonko.
D’ailleurs, le gouvernement a promis au Sénégalais de travailler pour une baisse des prix des produits énergétiques, sans fixer de délai. Pendant ce temps, le projet ‘’gas to power’’ est plus une idée qu’une réalité, bien annoncé depuis des années. On en est encore à la construction de pipeline reliant les lieux d’exploitation du gaz et les centrales électriques. Dans ce contexte, il est peu probable que les deux parties aient des visions convergentes.
Déjà, le Fmi a suspendu son accord avec le Sénégal reportant ainsi son dernier décaissement, suite à une mauvaise gestion révélée par un audit initié par les nouvelles autorités. D’après l’agence Reuters, citée par beaucoup de médias sénégalais, Dakar « devra patienter au moins jusqu’en juin (2025) pour obtenir une quelconque résolution de son programme de prêts avec le FMI, ce qui pourrait conduire à de nouveaux décaissements ».
Aux résultats des audits s’ajoute un eurobond de 450 milliards levé en juillet dernier. Une sortie sur le marché qui avait suscité l’incompréhension du Fmi. Or, dans la stratégie des gestions de la dette (2025-2027), il est prévu, pour 2025, deux eurobonds (avec, le cas échéant, composante Diaspora Bonds), l’un en dollars et l’autre en euro et représentant au total 50% du financement extérieur, soit 20,5% des besoins de financement du pays. Si une partie doit être couverte par le diaspora-bond, comme prévu, l’autre pourrait être une dette commerciale. Pas évident que cela soit au goût de Debbich et de ses patrons.