La baisse de l’action de l’entreprise californienne pourrait s’amplifier avec la fin de la période qui empêchait les employés de vendre leurs titres.
Cette spirale baissière pourrait encore s’amplifier au cours des prochains jours, avec l’expiration, ce lundi, de la période de lock-up, qui empêchait les employés de la société de Venice Beach (Californie) de vendre les actions qu’ils détiennent. Historiquement, cela entraîne un afflux de titres en vente, ce qui tend mécaniquement à faire baisser le cours. En 2014, Twitter avait ainsi plongé de 18 % en une seule séance.
Evan Spiegel et Bobby Murphy, les deux cofondateurs de l’application qui permet d’envoyer des photos et des vidéos éphémères, se sont engagés à conserver l’intégralité de leurs actions cette année. « Nous sommes fermement convaincus du succès à long terme », justifient-ils. Suffisant pour rassurer les salariés, qui ont vu la valeur de leur portefeuille fondre depuis le mois de mars ? Cela dépendra de leur degré de confiance sur la capacité de Snap à satisfaire les attentes des marchés.
La perte nette a triplé
Pour le moment, l’entreprise souffre du précédent Twitter, qui n’a jamais justifié les espoirs suscités lors de son entrée en Bourse en novembre 2013. Au cours des premiers mois, l’action du réseau aux 140 caractères avait en effet fortement progressé, grimpant de 26 à 69 dollars. Mais elle ne vaut aujourd’hui plus que 16 dollars, alors que la croissance a disparu et que les pertes s’accumulent.
Or, les performances financières de Snap semblent suivre la même trajectoire que celles de Twitter. S’il reste encore élevé, le taux de croissance de l’activité continue de nettement ralentir. Dans le même temps, les dépenses poursuivent leur hausse. Entre avril et juin, elles se sont élevées à 631 millions de dollars (533 millions d’euros), pour un chiffre d’affaires de 182 millions de dollars. Conséquence : la perte nette a triplé par rapport à l’an passé, à 443 millions de dollars.
Comme Twitter, Snap peine également à séduire de nouveaux adeptes. Au deuxième trimestre, l’application comptait en moyenne 173 millions d’utilisateurs actifs par jour, soit un gain d’à peine sept millions en trois mois. Le recrutement de nouveaux usagers a nettement baissé depuis l’été 2016. Cette décélération coïncide avec les efforts répétés de Facebook pour copier les options les plus populaires de son rival.
Instagram, la plate-forme de photos et de vidéos détenue par Facebook, a ainsi ajouté une nouvelle fonctionnalité, qui permet de créer des « histoires » regroupant des photos et de courtes vidéos. Son succès ne se dément pas : plus de 250 millions de personnes l’utilisent chaque jour. C’est 100 millions de plus qu’en début d’année. Par ailleurs, la société de Mark Zuckerberg développe des outils de réalité augmentée, qui permettent de superposer divers éléments sur le monde réel grâce à la caméra d’un smartphone. Une menace de plus pour Snap.
Flou sur le processus de diversification
L’application de messagerie paie aussi le flou entretenu sur son processus de diversification, promis lors du processus d’introduction en Bourse. L’an passé, elle a bien lancé des lunettes équipées d’une caméra, les Spectacles. Mais les ventes restent très faibles : moins de 41 000 exemplaires au deuxième trimestre, malgré le lancement en juin dans plusieurs pays européens, dont la France. Selon la presse américaine, Snap aurait racheté deux fabricants de drones, un marché jugé prometteur mais aussi très compétitif.
Malgré les doutes, les responsables de l’entreprise maintiennent un discours optimiste. « Le processus de monétisation n’en est encore qu’à ses débuts », promet ainsi M. Spiegel, son directeur général. Le revenu moyen par utilisateur est en effet dix fois moins élevé que celui de Facebook aux Etats-Unis, et seize fois moins en Europe. Face à la domination de Google et de Facebook dans le domaine de la publicité en ligne, l’application assure qu’elle permet de toucher un public plus jeune, offrant davantage de moyens créatifs pour interagir avec lui, comme des animations et des filtres personnalisés.
En outre, Snap s’est récemment dotée d’une plate-forme publicitaire automatisée, qui « va permettre d’attirer des nouveaux annonceurs de plus petite taille », souligne Debra Aho Williamson, du cabinet eMarketer. « Si les performances sont moins bonnes qu’espéré, il est encore beaucoup trop tôt pour remettre en cause les prévisions à long terme », estime ainsi Mark Mahaney, analyste chez RBC Capital.