Darou-Mouhty se prépare à commémorer le Jeudi 12/11/2015 la mémoire de l’une des plus illustres figures du Mouridisme Serigne Modou Awa Balla Mbacké, Fils aîné et successeur de Mame Thierno Birahim Mbacké, dont il a assuré le « Khalifat » pendant quarante ans.
Serigne Modou Awa Balla Mbacke a eu le rare privilège de faire partie des personnes, qui ont grâce à une fréquentation assidue de Cheikh Ahmadou Bamba directement bénéficié de ses enseignements. Le statut dont il jouit au sein de la confrérie mouride lui a été en grande partie conféré par cette proximité avec Cheikh Ahmadou Bamba et l’affection que ce dernier lui a toujours manifesté. Affection illustrée par ces propos que Cheikh Ahmadou Bamba lui a tenu en présence de son père : « Modou, sache que je t’ai balisé ton chemin. Tous tes désirs seront exaucés et tes craintes éloignées à jamais ».
Les enseignements et la formation religieuse qui lui ont été inculqués très tôt lui ont permis de synthétiser les trois dimensions spirituelles que doit réunir tout « mouride sadikh » à savoir le Tarbiya (Dévotion du talibé), le Tarkhiya (Acquisition des nobles qualités) et le Tasfiya (Aspiration vers Dieu par l’évocation).
Un parallélisme de cette proximité avec Serigne Touba peut être fait avec les liens particuliers qui unissaient son père, Mame Thierno Birahim, aux fils les plus âgés de Cheikh Ahmadou Bamba. Il les a, en effet, éduqué et initié à toutes les sciences religieuses, en particulier Serigne Modou Moustapha Mbacke, Serigne Falou et Serigne Mouhamadou Lamine Bara Mbacke, père de l’actuel Khalif Général des Mourides Serigne Sidy Moctar Mbacké. Comme le disait, Serigne Falilou Mbacké, deuxième khalif de Khadimou Rassoul : « Notre père Thierno Birahim nous a inculqué un enseignement savant et nous a gratifié d’une éducation irréprochable ».
La dimension spirituelle de Serigne Modou Awa Balla n’a pas entamée son esprit pionnier et visionnaire ainsi que son ardeur au travail. Ces qualités lui ont permis de doter Darou-Mouhty de la plupart des infrastructures socio-économiques indispensables à la vie décente et au bien-être des populations. Ses nombreuses réalisations ont largement contribué à faire de cette localité la seconde ville des mourides après Touba et le pôle de développement qu’il est devenu. En effet, à la disparition de Mame Thierno Birahim Mbacke en 1943, il réussit dans des conditions très difficiles à doter la localité qui manquait cruellement d’eau potable d’un forage. Ce problème était tellement crucial à l’époque que le célèbre écrivain Abdoulaye Sadji avait dans un article paru le 20 juillet 1946,dans le « Paris-Dakar évoqué la question. Il affirme : « la ville, de Darou Mouhty étant donné sa position charnière entre les cercles de Louga et Diourbel, son niveau de production arachidière, l’intensité de la traite, le nombre de commerces libano-syriennes installées et la qualité de ses habitants, mourides rangés, disciplinés, travailleurs et amis du progrès, pourrait rapidement se développer si le problème de l’eau était résolu ».portaient sur la question à savoir comment la ville a pu naître et prospérer à un endroit si aride.
Les autres infrastructures suivirent rapidement. Il s’agit entre autres du lotissement de la ville avec l’attribution des premiers permis d’occuper, de la création d’un poste télégraphique et téléphonique, d’un service postal (en 1952) desservi par du courrier régulier dont la distribution était assurée par un véhicule qu’il avait mis gracieusement à la disposition de l’administration, d’un marché équipé de cantines en 1954, et d’une gendarmerie implantée sur sa demande pour assurer la sécurité des habitants ainsi que d’un centre vétérinaire.
Il entreprit à partir de mai 1966, l’édification de la grande mosquée de Darou Mouhty qui aura coûté au moment de sa première inauguration plus d’un milliard Fcfa entièrement financé par la communauté mouride. Sot l’équivalant de plusieurs milliards de francs actuels.
Sa contribution dans le domaine de l’éducation aura été déterminante avec l’implantation de « Daraas » réputés pour la qualité de leur enseignement et la philosophie de travail inculquée aux disciples qui les ont fréquentés. On peut citer comme exemples : « Madina » et « Yabal » (dirigés par Serigne Moustapha Absatou Diakhaté Mbacké), « Karatièle » (confié à son fils Serigne Bassirou Astou Lô), « Darou-Rahmane » en 1944 (fief de Serigne Fallou Astou Dieye Mbacke), « Sarsara » (village rendu célèbre par Serigne Kosso Astou Lô), « Ndiarème Yabal »(village de Serigne Kosso Ganar ).
Mieux que toutes ces réalisations matérielles, Serigne Modou Awa Balla a su se mettre au service de la communauté avec altruisme. Il a toujours vécu dans la simplicité la plus totale avec un attachement profond aux valeurs originelles du mouridisme fondées sur la diptyque amour du travail et soumission profonde à Dieu. Et c’est sa synthèse réussie des dimensionnements temporelle et spirituelle de l’homme qui fait de lui un des plus dignes héritiers spirituels de Cheikh Ahmadou Bamba.
Ceci justifie largement le fait que son œuvre mérite d’être présentée aux générations actuelles pour qu’il s’en inspire afin de se demander « ce qu’elles peuvent faire pour leur pays et non ce que leur pays peut faire pour elles ».
Abdoukhadre Djily Sall
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