« Libération » s’est procuré le statut de la société montée par Pape Mamadou Pouye au Canada pour l’achat d’un appartement. Mis au courant de l’enquête mondiale concernant la « filière africaine », le prête-nom présumé de Karim Wade selon un arrêté de la CREI, a procédé à une modification des statuts pour mettre en avant son… épouse.
Selon les statuts obtenus par « Libération », la société montée par Papa Mamadou Pouye a été immatriculée au Québec sous le numéro d’entreprise 9259-7087 QUÉBEC INC avec commeadresse404-950AV, le siège social étant Champagneur, Québec H2V3R3 Canada, là où se trouve l’appartement acheté par le présumé prête-nom de Karim Wade.
Comme plusieurs dignitaires tchadiens, Papa Mamadou Pouye est passé par son avocate canadienne préférée: Me Hélène Mathieu qui vit à Dubaï. C’est d’ailleurs celle-ci qui a fait monter au Panama et à la demande de Pouye, Seabury et Latvae Group les deux structures mises en cause dans le scandale des « Panama papers ».
Au Canada d’ailleurs, Hélène Mathieu est au cœur du scandale depuis qu’il a été́ découvert qu’elle a même monté des sociétéś pour le compte de criminels. Associé à l’enquête mondiale, le journal Toronto Star écrivait à ce propos : « De toutes les compagnies pour lesquelles la firme d’Héĺèǹe Mathieu a fourni des services, trois ont piqué notre curiosité : Pangates International Corporation Limited, Maxima Middle East Trading Co, Morgan Additives Manufacturing Co.
Les trois affichent une adresse aux Eḿirats arabes unis, avec une incorporation aux Seychelles. Toutes trois font l’objet de sanctions économiques internationales. Cette mise à l’index est venue de l’organisme de contrôle des avoirs étrangers qui relève du département américain du Trésor, l’Office of Foreign Assets Control (OFAC).
Washington affirme que Pangates a livré divers produits pétroliers au régime syrien de Bachar Al-Assad, notamment des centaines de tonnes de carburant pour avion, en 2013 et en 2014. » Grâce à l’entregent de cette avocate sulfureuse, M. Pouye a pu acheter son « condo » en toute tranquillité. Mais pour se faire discret et comme le révèle les statuts, le bien a été enregistré au nom de Mandy Moodley comme adresse 3, Rue de Ziguinchor, immeuble Bassari, Point E Dakar Sénégal.
C’est la même adresse qu’il a utilisé pour monter Latvae et Seabury. Épouse de Papa Mamadou Pouye depuis octobre 2010, Mandy Moodley avait été interrogée par la CREI sur des virements de 1,3 milliard reçu de son époux entre 2006 et 2013. L’appartement du Canada a été acheté pendant cet intervalle, vers mars 2012.
Elle détenait aussi des parts dans la société 3Ag qui a accouché de la « pieuvre » ayant permis à Pouye et Bibo Bourgi de faire main basse sur AHS et Black Pearl Finance, entre autres. Mais le plus drôle est que Papa Mamadou Pouye qui avait mis son nom et celui de son épouse dans les statuts, s’est fait «effacer » le jour où il a su que des journalistes s’intéressaient à l’affaire. En effet, les statuts de la société ont été modifiés le 16 mars 2017.
Le 15 mars, des confrères canadiens avaient passé des coups de fil pour en savoir plus sur cette structure… Si les Sénégalais ont découvert Mandy Moodley avec le procès de Karim Wade et de son épouse, cette dernière était pourtant au cœur de la Fondation de Viviane Wade dans laquelle elle a occupé les fonctions d’auditrice interne. C’est d’ailleurs elle qui avait brièvement fait écrouer l’ancien administrateur français Sébastien Couasnet, avec la complicité de… Karim Wade.
Cheikh Mbacké Guissé (Libération)