(Reportage) Au Sénégal, on répare l’hymen, pour sauver l’honneur d’une famille : Aida Faye « J’ai été vierge, naturellement, quand je me …

L’hymen est considéré dans la société sénégalaise comme un inépuisable trésor qu’une fille puisse offrir à son chocolat doré, lors de leur première nuit de noces. Garder sa virginité jusqu’au jour du mariage, est une preuve assez révélatrice pour une fille qu’elle est de bonnes moeurs.

Tout comme, ça permet de ne pas faire profil bas devant son époux. Qui, en cas d’accès de colère, peut, si la fille n’est pas vierge, lui rabâcher, à chaque fois que l’envie l’en démange, qu’il ne l’a pas trouvée jeune.  

Aussi, sous le poids de la tradition et des pressions sociales, c’est très souvent l’honneur de toute la famille de la nouvelle mariée qui peut en pâtir. C’est pourquoi, quand certaines filles perdent leur virginité avant le mariage et éprouvent le dur désir de sauver leur honneur et celui de la famille, elles ne cherchent pas l’explication au ciel.

Elles se font, tout simplement, réparer l’hymen. Comme un chauffard peut aller dans un garage de mécaniciens, aux fins de se faire rafistoler sa caisse.

Cette pratique permet à la femme de redevenir vierge. Pour mieux appréhender cette pratique, Actusen.com est allé à la rencontre des Sénégalais, leur a tendu son micro, pour qu’elles puissent livrer leurs impressions sur ce recours à la plastie de l’hymen. Reportage!

Le doute n’est plus permis : la réparation de l’hymen (petit rebord de tissu qui est généralement présent comme une sorte de collerette autour de l’entrée du vagin des jeunes filles (vierges) aussi appelée hymenoplastie ou plastie de l’hymen est une dure réalité sous nos tropiques. Mais cette pratique taboue est ô combien actuelle chez certaines filles, dont la volonté inébranlable de mener la belle vie a souvent « volé » la virginité.

On n’en parle presque jamais. Ou très rarement. Actusen.com, dans le cadre de ses reportages sociétaux, s’est baladé dans quelques rues de Dakar, capitale sénégalaise. Pour interroger les citoyens sur le sujet. Ce, dans un contexte surréaliste marqué par une sorte de libertinage sexuel auquel s’adonnent certaines filles, avant même de goutter au mariage.

Trouvée dans sa boutique au moment où elle s’apprêtait à baisser ses rideaux, pour rentrer chez elle, une commerçante, sous le couvert de l’anonymat, a accepté ce que beaucoup rechignent à faire : ergoter sur le sujet qui fâche. Qui gêne et qui indispose, mais qui est une dure réalité.

La soixantaine, la dame, qui est une mère de famille et qui s’active dans les affaires nuptiales a, en effet, entendu parler de l’hyménoplastie.

Seule dans sa boutique, assise sur un tabouret en bois, vêtue d’une tunique en soie imprimée en fleurs roses et blanches, un voile  sur la tête et un chapelet à la main, elle venait juste de terminer sa prière de «gewe» (après celle du crépuscule).

Habituée du « laabaan », une dame raconte : «il m’est arrivé que des mamans me demandent conseils sur comment frauder pour que leurs filles soient considérées comme vierges… »

A la simple évocation du sujet, elle répond aisément : «j’ai beaucoup entendu parler de cette pratique et j’avoue que ce fut choquant. J’étais scandalisée. Je suis active dans la pratique du «laabaan» (festivité sur fond de tam-tams, au lendemain de la noce nuptiale du couple, si la fille est déclarée vierge).

Avec des termes un peu saccadés, elle poursuit : «il m’est arrivé que des mamans me demandent conseils sur comment frauder pour que leurs filles soient considérées comme vierges. Et en tant que mère de trois jeunes nubiles, j’accepte par compassion ».

Même si, explique-t-elle : « je n’ai jamais eu recours à cette chirurgie réparatrice, il n’en demeure pas moins qu’aujourd’hui, à y voir de près, je ne serais pas contre une telle pratique du moment que ça permet de sauver l’honneur de toute une famille ». Cela dit, « je n’encourage pas les filles à s’adonner aux pratiques sexuelles avant le mariage. Une fille doit s’abstenir, c’est très important pour sa vie de couple».

« J’ai été vierge, naturellement, quand je me suis mariée »

Rencontrée dans la rue, tenant par la main sa petite fille de deux ans, la jeune dame Aida Faye ne s’est pas fait prier pour répondre à nos questions. Toute svelte dans une robe «taille mame» en wax (coupe traditionnelle originellement portée par les grand-mères), elle s’y donne à cœur joie. «Je me demande pourquoi les jeunes filles se font opérer pour tromper les gens. Y’a pas plus malhonnête que ça », débine-t-elle.

Dans un réquisitoire de feu contre les filles qui se font chiper leur virginité avant le mariage, Aïda Faye embraie en ces termes : « quand on choisit d’avoir des relations sexuelles avant le mariage, on doit l’assumer parce que personne n’a à juger. Pour moi, le fait d’assumer ses actes est plus important que de recourir à cette supercherie».

Du haut de son mètre soixante-dix, elle renchérit avec fierté : «avant notre mariage, mon mari m’a fait savoir que ça lui importait peu que je sois vierge ou pas. Tout ce qu’il me demandait c’est d’être une épouse remarquable. J’étais vierge, naturellement, quand je me suis mariée ». Mais, dit-elle, « même si je ne l’étais pas, je me serais gardée de recourir à une quelconque opération. En plus, ça coûte cher ».

« Si je le sais, ma future épouse n’aura pas besoin de se faire opérer »

Quand on parle de reconstitution de l’hymen, il est tout à fait naturel de penser aux hommes. Ils sont tout aussi concernés. A cet effet, Actusen.com a tendu son micro à L. W, un jeune homme, célibataire, grand de taille, teint un peu clair. Casques à l’oreille, il répond, de façon catégorique et instantanée à nos questions : « mon point de vue sur ce sujet est simple : je suis contre cette pratique ».

Selon lui,  « non seulement elle vise à nous tromper, nous les hommes, mais aussi c’est injuste. A l’ère où nous sommes, on ne devrait pas imposer cela aux filles. Surtout que maintenant, les filles se marient de plus en plus tard».  

Ne voulant pas s’attarder sur le sujet, au début de l’entretien, il finit par s’asseoir sur un banc, non loin de l’endroit où se déroule l’interview en posant le sac de son ordinateur portable sur ses genoux. «Moi, je n’exigerai pas de ma future épouse d’être vierge. J’ai connu des femmes avant et ce serait injuste de ma part d’exiger cela », tranche-t-il net.

Très détaché de certaines contingences sociales, L.W en rajoute cette couche : « à moins que je ne le sache pas, ma future épouse n’aura pas à se faire opérer pour me prouver quoi que ce soit. Ce n’est pas parce qu’une fille n’est pas vierge qu’elle est mauvaise. Et il parait que l’opération coûte cher, en plus».

« Même les femmes, qui se remarient, le font sous prétexte de donner plus de satisfaction à leurs époux « 

Un peu plus loin nous apercevons un autre jeune homme qui accepte de se prononcer sur le sujet. Mais à une seule condition : c’est tout en gardant l’anonymat. Vêtu d’une chemise à carreaux, il réagit dans le même sens que L.W: «les filles qui le font, ne sont, peut-être, pas mauvaises. Mais veulent juste réparer leurs erreurs et ne pas subir des jugements». Poursuivant, il ajoute : «ce ne sont pas seulement les jeunes filles qui le font. Même les femmes qui se remarient le font sous prétexte de donner plus de satisfaction à leurs maris ».

Mécanicien de son état au quartier Gueule Tapée de Dakar, dans sa tenue de travail, Diagne semble intéressé par le sujet et interrompt son travail pour donner son avis là-dessus. La trentaine, teint noir, il joue à se faire peur : «si ma femme me fait croire qu’elle est vierge alors qu’elle a perdu puis réparé sa virginité, je divorce d’elle parce que c’est une trahison. Et puis, ça prouve qu’elle n’est pas une bonne femme », dit-il. Bref, « pour moi il n’est pas question de marier une femme qui n’est pas vierge», résume-t-il sa pensée.

Fatou Sarr : «en tant que fille, c’est honteux de ne pas être vierge, pendant sa nuit de noce »

Une fille, 27 ans, toujours célibataire sans enfant, accepte de jeter son grain de sel dans la marmite à idées qui entourent ce sujet tabou. Vu la nature de celui-ci, elle préfère, elle aussi, garder l’anonymat. Mais Actusen.com lui colle le nom de Fatou Sarr.

Sa position est, cependant, sans équivoque : «en tant que fille, c’est honteux de ne pas être vierge, pendant sa nuit de noce. Notre société incrimine les relations sexuelles avant le mariage donc on a qu’à s’abstenir », dit-elle.

« Et heureusement », fait remarquer F.S, « qu’il y a, désormais, pour les filles qui n’en disposent plus, la possibilité de recourir à la chirurgie, qui permet au moins de sauver l’honneur de la jeune femme ».

A la question de savoir quelle posture adopteriez-vous, si vous perdiez votre virginité, elle rétorque de manière brute : « personnellement, si un jour, je perdais ma virginité avant le mariage, je me ferais reconstruire l’hymen. Pour sauver mon honneur et celui de ma mère».

Awa Diop : « L’hymen est sacré pour une femme, c’est son seul trésor. On a beau croire qu’on peut réparer l’hymen, mais les filles, qui s’adonnent à cette intervention chirurgicale, se trompent lourdement « 

Il est 11H40, le soleil darde ses rayons qui tapent plutôt fort sur Dakar. La réparation de l’hymen constitue, tout de même, une pratique difficile à concevoir chez les personnes âgées. Surtout chez les femmes d’un certain âge. En attestent ces deux Mamies rencontrées par Actusen.com et qui manifestent toute leur rage à la simple évocation du sujet.

L’une d’elles, 55 ans, qu’Actusen.com rebaptise Awa Diop, est vendeuse de friperie au marché de Gueule-Tapée. Pour elle, l’expression se perçoit mal.

Assise par terre, elle prend tranquillement son petit-déjeuner. Habillée en boubou fleurette de couleur rouge et jaune, elle indique : «à notre époque, on n’entendait jamais ça, les filles d’aujourd’hui sont trop osées. L’hymen est sacré pour une femme, c’est son seul trésor. On ne peut pas réparer l’hymen. Car une fois perdu, il l’est pour de bon ».

« Une femme vierge sera toujours respectée par son époux« 

Puis dans son réquisitoire à charge, elle explique : « on a beau croire qu’on peut réparer l’hymen, mais les filles qui s’adonnent à cette intervention chirurgicale, se trompent lourdement. L’hymen, on ne l’a qu’une seule fois dans la vie ».

Et Awa Diop de pousser un grand ouf de soulagement : « heureusement pour moi, mes filles sont toutes mariées et leurs époux respectifs ont tous été fiers et contents d’elles, de même que moi et leurs tantes. Une femme déflorée par son mari sera toujours respectée par celui-ci».

Selon elle, «l’hymen qu’on tente de réparer ne peut ressembler à l’hymen inné en une fille. Et puis, ce n’est même pas religieux de créer un hymen artificiel».

« Lorsqu’une fille, après sa première nuit avec son mari, se balade dans la maison, comme si de rien n’était, ça éveille les soupçons« 

A force de gratter le vernis qui recouvre la réparation de l’hymen, certains s’en prennent, de prime abord, aux parents. « Ils (ndlr : ces derniers) ne sont plus vigilants avec leurs enfants ». C’est l’avis de l’autre dame interpellée à Gueule-Tapée, après notre entretien avec Awa Diop.

La soixantaine, Sokhna Fall (nom d’emprunt) vend de la vaisselle, au marché de Sahm. Dans son boubou violet, sous son parasol, elle affirme : «les parents ne surveillent plus les enfants et les laissent faire ce qu’ils veulent. Les gens entrent et sortent comme ils veulent chez eux ».

Elle fait remarquer : « après, le résultat se passe de commentaire : leurs filles remuent ciel et terre, pour se taper un hymen artificiel, histoire de sauver leur honneur et celui de leurs familles. Mais c’est peine perdue », dit-elle.

Car, selon Sokhna Fall, « lorsqu’une fille, après sa première nuit avec son mari, se balade dans la maison, comme si de rien n’était, ça éveille les soupçons. Une première nuit sur le lit avec son époux ne peut ressembler à aucune autre nuit».

Autant Actusen.com a cherché à s’entretenir avec un gynécologue pour mieux appréhender les contours de l’intervention chirurgicale, son coût et le profil des filles qui s’adonnent à la réparation de leur hymen, autant votre site a buté sur un rocher. Un dur rocher ! En effet, le sujet étant sensible et la pratique ô combien condamnable, nul ne veut disserter là-dessus. Tout comme, par pudeur, beaucoup de personnes interpellées ont préféré passer la main, plutôt que de s’épancher sur ce sujet tabou, aux yeux de certains Sénégalais.

« Il faut, au moins, casquer entre 200 et 300 mille francs pour se faire réparer l’hymen »

Toutefois, selon certaines confidences faites par des hommes de l’art, l’intervention chirurgicale de l’hymen coûte souvent excessivement cher. Et, ajoutent nos interlocuteurs, les filles, qui s’adonnent à cette réparation de l’hymen, doivent, au moins, casquer entre 200 et 300 mille francs. Car non seulement, les blouses blanches, qui réalisent cette reconstruction, ne courent pas les rues, mais aussi, c’est une pratique qui pourrait être contraire aux textes en vigueur dans notre pays. Donc, qui pourrait s’avérer répressive !

« L’intervention doit se faire 1 mois à 6 semaines avant le mariage, afin que les sutures internes, disparaissent complètement »

Des investigations effectuées sur Internet nous permettent de savoir que, « contrairement à ce que l’on croit, l’hymen n’est pas une membrane. Les organes sexuels externes se développent avec l’embryon, entre la 7e et la 12e semaine de la grossesse.

Les parois génitales fusionnent et forment le scrotum chez les hommes (les testicules) et les grandes et petites lèvres de la vulve (lèvres vaginales ou génitales) chez les femmes. Le pli de la muqueuse, qui subsiste avec l’ouverture au milieu, est appelé hymen. Il peut prendre selon les femmes et l’âge des formes et des ouvertures très variées ».

A cet effet, « la reconstruction de l’hymen consiste à rassembler les restes de l’hymen et à le refermer. C’est un procédé simple qui doit être fait 1 mois à 6 semaines avant le mariage, afin que les sutures internes, disparaissent complètement. L’opération se passe sous anesthésie locale.

« Pour une réparation définitive, il faut une grande habileté du chirurgien ; elle doit être réalisée quelques mois avant le mariage »

« Une membrane artificielle peut être insérée peu avant le mariage. Quand les restes de la membrane de l’hymen sont insuffisants, une réparation définitive est envisagée en rapprochant les restes de l’hymen et l’épithélium du vagin », apprend toujours Actusen.com de l’Internet.

Et cette opération reconstructive demande une grande habileté du chirurgien. Cette intervention doit être réalisée quelques mois avant le mariage ». La procédure peut se pratiquer sous sédation intraveineuse. C’est une intervention de jour. Vous entrez à la clinique le matin, et vous pouvez regagner votre domicile quelques heures après l’intervention.

L’opération dure une à deux heures, et en général les patientes peuvent reprendre leurs activités socioprofessionnelles le jour suivant. Les points de sutures sont solubles.

Toutefois, des confidences faites à Actusen.com sous le couvert de l’anonymat, il ressort que les hommes, qui ont une certaine expérience sexuelle, peuvent, quand leurs épouses saignent, savoir s’il s’agit ou non d’un hymen artificiel.

Ce, dans la mesure où, confie-t-on à Actusen.com, au moment de la nuit de noces, chez la fille ayant subi une intervention chirurgicale, la membrane est très fragile et pète plus vite que quand il s’agit de l’hymen naturel. Dans la seconde partie de ce reportage, Actusen.com vous livrera ce qu’en pensent les religions musulmane et chrétienne.

Anna Alberta Mendez & Ndèye Aminata Diaham, Stagiaires Actusen.com

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