Tabaski, appelé aussi Aïd El Kébir, qui signifie littéralement « la grande fête » est la fête la plus importante de l’islam, après l’Aïd El Fitr (la fête qui célèbre la fin du ramadan).
C’est l’importance qu’elle représente pour les musulmans qui les motive à la préparer en grande pompe. L’affluence au marché des HLM, en est la preuve, même si la dame Khady Fall (trouvée en plein marchandage) venue acheter les tenues de fête pour sa famille, invoque la dureté des temps « les temps sont durs et les hommes ne nous aident plus assez, mais tout de même, c’est une grande fête pour nous musulmans, et c’est la meilleure occasion de réunir et de rendre heureuse toute la famille, donc on s’efforce de faire le maximum…»
Du côté des hommes aussi, la fête nécessite des efforts financiers puisqu’il leur incombe d’acheter le mouton du sacrifice pour la famille, une tâche que ces derniers peinent à accomplir de nos jours à cause de leurs maigres revenus : « il faut savoir qu’au Sénégal même les plus pauvres se sentent obligés d’acheter un mouton, certains vont même jusqu’à s’endetter voire se ruiner parce que les prix flambent jusqu’à atteindre le million, « mais moi je ne compte pas dépasser mes 50.000 FCFA », affirme Malick N’diaye, un quinquagénaire, en pleine discussion, « il ne faut pas tomber dans le gaspillage non plus », rajoutera t-il.
L’air inquiet et grave, Cheikh Fall, un habitant de la zone de captage, venu vendre ses moutons aux Hlm nous confie : « les moutons sont chers parce que nous les achetons cher, sans compter les dépenses pour leur entretien et leur nourriture, mais il faut aussi croire qu’il y a 3 catégories de mouton en ce qui me concerne qui vont de 65.ooo à 500.000 FCFA, donc on tient compte des moyens de tout le monde. Cependant, avec moins de 65.000 FCFA, je ne céderai même pas une corne, parce que je risquerais de ne pas avoir un retour sur investissement, j’ai investi tout ce que j’avais dans cette opération pour espérer m’en sortir; j’ai investi ma vie, et je n’ai toujours pas vu l’ombre d’un seul acheteur, les gens vont et viennent, mais il n’y a aucune vente conclue pour l’instant. »
Vendeur de moutons de son état, habitant Pikine, l’homme s’appelle Malick Ly. Il est éleveur et tient un discours tout à fait différent, « moi mes moutons varient entre 95.000 et 1 million de F CFA, et si je souhaite que tous aient leur mouton, je ne suis pas prêt à baisser mes prix, quitte à les ramener à l’enclos si je n’arrivais pas à vendre et c’est ce qui risque d’arriver puisqu’en 15 jours, j’ai dépensé 150.OOO FCFA et je n’ai toujours aucun client », tout sourire le jeune monsieur de continuer dans son argumentaire « je ferais comme l’année dernière ».
La clientèle, se faisant rare, Malick N’diaye tente de faire une analyse de la situation : « il faut croire que nous n’avons pas les moyens de nous procurer le mouton en ce moment, on attend que la Tabaski s’approche davantage et ce faisant, les vendeurs, de peur de ramener leurs moutons, se verront dans l’obligation de baisser les prix, alors on en profitera, et en plus nous n’avons pas de place dans nos maisons. Pour finir, il y a aussi le risque de se faire voler son mouton, ce qui pousse certains à attendre le plus tard possible pour s’en procurer. »
La fête du mouton c’est aussi la fête des enfants, ils ne sont pas en reste et vont même jusqu’à avoir leur mot à dire, comme le démontre ce petit garçon venu avec son père se faire confectionner son boubou de fête; Mohamed de lancer, tout content « mon papa va m’acheter un très gros mouton… », le ton est donc donné, aux papas de jouer !