RDC : le sang coule à flot et le président s’isole par crainte d’un coup d’Etat.

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Violences. Au moins dix-sept personnes sont mortes lundi à Kinshasa lors d’un rassemblement contre le maintien au pouvoir de Joseph Kabila, autocrate au pouvoir depuis 2001. Ils réclamaient la convocation d’une élection présidentielle.

Des corps portés sur des civières par des jeunes levant le poing en signe de vengeance. Un trottoir éclaboussé de sang sur lequel gît une femme, regard à jamais perdu vers le ciel. Et puis encore un autre homme à terre avec une immense tache rouge sur la poitrine : lundi, dès la fin de la matinée, les réseaux sociaux ont été inondés d’images en provenance de Kinshasa, la capitale de la république démocratique du Congo (RDC) où l’opposition avait prévu une marche pour protester contre le report des élections présidentielles. Une marche qui a vite tourné au carnage. En fin d’après-midi, le ministère de l’Intérieur reconnaissait un bilan «provisoire» de 17 morts, dont 3 policiers et 14 civils, selon l’AFP. D’autres sources, multiples, mais invérifiables, comptabilisaient, elles, au moins 26 morts et 57 blessés.

  • Que se passe-t-il depuis le 19 septembre ?

Les affrontements entre jeunes et forces de l’ordre se poursuivaient, mercredi 21 septembre, pour la troisième journée de suite à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC), où l’opposition réclame le départ du président Joseph Kabila et la tenue d’une élection présidentielle. Ces violences, les pires depuis janvier 2015, ont commencé lundi 19 septembre au matin, en marge d’une manifestation à l’appel du Rassemblement, une association de partis politiques d’opposition et de forces civiles. Constitué autour du vieil opposant Etienne Tshisekedi, récemment rentré au pays, le Rassemblement a voulu, à travers cette journée de manifestation, signifier symboliquement au président Joseph Kabila le début de son « préavis  », à trois mois de la fin officielle de son second et, théoriquement, dernier mandat.

La marche a rapidement dégénéré en affrontements avec la police. L’opposition et le pouvoir se sont renvoyé la responsabilité des violences, qui ont fait « plus de 100 morts » selon le parti d’opposition Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et 32 selon le porte-parole de la police nationale. Lundi, plusieurs bâtiments de partis de la majorité ont été incendiés. Dans la nuit de lundi à mardi, dans ce que l’opposition perçoit comme des « représailles », trois sièges de partis de l’opposition ont été brûlés. Sont particulièrement concernés les quartiers du centre et du sud de Kinshasa, les plus pauvres de cette mégapole de 10 millions d’habitants. Les Kinois n’ont jamais aimé Joseph Kabila, qu’ils ont toujours considéré comme un « étranger » venu de l’est du pays.

Juste en face de Kinshasa, sur l’autre rive du fleuve, à Brazzaville, capitale de l’autre Congo, les aspirations à la démocratie qui se sont manifestées en mars ont peut-être été étouffées par une répression sanglante. Mais l’inamovible Denis Sassou Nguesso est désormais totalement isolé sur la scène internationale et n’ose pas quitter son pays par crainte d’un coup d’Etat. Et de l’autre côté du Congo-Brazzaville, au Gabon, l’annonce de la réélection, contestée, d’Ali Bongo, a provoqué fin août une flambée de violences inédites. Ces jours-ci, l’opposition y attend sur le pied de guerre le verdict imminent de la Cour constitutionnelle, qui doit se prononcer sur des accusations de fraude formulées contre le camp Bongo. L’Afrique centrale n’a quasiment pas connu la démocratie. Mais jamais depuis les convulsions des années 90 qui ont mis fin aux partis uniques, la contestation n’y a été aussi forte. Notamment grâce à un nouvel allié : les réseaux sociaux, qui répercutent en temps réel les violences subies et encouragent la mobilisation. Même dans un pays aussi immense que la république démocratique du Congo.

  • Quelles réactions internationales ?

Le président français François Hollandea appelé, mardi, au « respect » de la Constitution en République démocratique du Congo et à la tenue des élections prévues.

« Il s’est produit des violences en République démocratique du Congo qui sont inadmissibles, insupportables », a souligné le chef de l’Etat français lors d’une conférence de presse réunie en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, disant ignorer « encore le nombre de morts ». Avant d’enchaîner : « Mais ce qui est incontestable, c’est qu’il y a des victimes et qu’elles ont été provoquées par des exactions venant de l’Etat congolais lui-même. »

Les Etats-Unis ont, eux, une position plus ferme, arrêtée depuis plus longtemps. Thomas Perriello, l’émissaire spécial du gouvernement américain pour l’ Afrique des Grands-Lacs, déclarait ainsi en juin au Monde Afrique : « Nous appuyons et défendons la Constitution, qui dit clairement que des élections doivent se tenir avant la fin de l’année (…) Nous espérons [que M. Kabila] sera à la hauteur de ce moment historique, comme il l’a été par le passé à Sun City [en Afrique du sud, où ont été signés les accords qui ont mis fin à la deuxième guerre du Congo] ou lors de l’adoption de la Constitution. Il est capable d’avoir cette stature d’homme d’Etat ». Et de se retirer.

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