De 2000 à nos jours, plus de dix personnes sont tombées sous le coup de l’article 80 du code pénal dont plus de la moitié interpellée lors des sept dernières années. Cette situation relance le débat sur le maintien dans l’ordonnancement juridique national du délit d’offense au chef de l’Etat réprimé par l’article 80 du code pénal.
La dernière sortie du ministre porte-parole du président de la République, Abdoulatif Coulibaly sur le délit d’offense au chef de l’Etat considéré comme «suranné», relance le débat sur l’article 80 du Code pénal sénégalais.
S’exprimant, le dimanche 21 septembre, lors de son passage à l’émission Grand jury de la radio Futurs médias (Rfm privée) Abdoulatif Coulibaly est même allé plus loin en déclarant que la «suppression de l’article 80 serait une avancée démocratique». Logée dans la rubrique des délits contre la chose publique dont la commission provoque l’autosaisine directe du procureur de la République, cette infraction ne cesse de susciter débat, toutes ces dernières années, tant elle est considérée par beaucoup de défenseurs des droits de l’homme comme un «fourretout», utilisé par le régime pour museler ses opposants politiques. De 2000 à nos jours, elles ne sont ainsi pas moins de dix personnes à être tombées sous le coup de cette disposition.
Arrêtés le plus souvent sur instruction du procureur de la République, ces personnes sont placées sous mandat de dépôt et directement envoyées à la prison centrale de Rebeuss après leur face-à-face avec le maitre des poursuites. Cependant, il est bon de préciser que c’est sous le magistère de l’actuel président de la République, Macky Sall, qu’on a dénombré le plus grand nombre de personnes arrêtées pour le délit d’offense au chef de l’Etat depuis 2000.
En effet, en sept ans d’exercice, l’actuel procureur de la République, Serigne Bassirou Guèye s’est bien illustré dans la traque de supposés «offenseurs» du chef de l’Etat parmi lesquels, on note des hommes politiques mais aussi des journalistes et des artistes. Il est même parvenu à battre le record des arrestations effectuées en douze ans par ses prédécesseurs pour ce même délit. Pour cause, sur la dizaine de personnes interpellées depuis 2000, il compte à lui seul plus de la moitié des arrestations dont la dernière en date est celle du journaliste activiste Adama Gaye.
Pour les autres victimes de l’article 80 sous l’actuel régime, il s’agit entre autres, de Feu Sidy Lamine Niasse, PDG du groupe Walfadjri, des anciens ministres dans le gouvernement libéral, Me Amadou Sall et Samuel Sarr, de Mamadou Massaly et Bara Gaye, ex-SG de l’UJTL mais aussi de la chanteuse Amy Collé Dieng et de la journaliste Ouléye Mané. A cette liste non exhaustive des personnes tombées sous le coup des dispositions de l’article 80 sous l’actuel régime, s’ajoutent également celles interpelées sous l’ancien régime libéral de Me Abdoulaye Wade. Il s’agit entre autres, de Madiambal Diagne, PDG du Groupe Avenir Communication (éditeur du Quotidien), du journaliste El Malick Seck, à l’époque où il était au quotidien «24h chrono» et du Secrétaire général du Bloc des centristes gaïndés (Bcg), Jean-Paul Dias.