Il semblerait que le Sénégal compte la proportion de polygames la plus élevée du continent africain.
Au Sénégal, la polygamie possède un statut légal et une reconnaissance comme régime matrimonial au même titre que la monogamie:
Tout d’abord, la législation prévoit que les conjoints peuvent opter, en se mariant, pour le régime matrimonial de leur choix. Il est évident cependant que certaines femmes s’ interdiront psychologiquement de choisir la monogamie, même si intimement elles la désirent, leur éducation les ayant davantage orientées vers une idée polygame du mariage.
Ensuite, une femme ne peut être forcée à devenir une seconde épouse.
Enfin, si la première femme n’accepte pas une situation de polygamie, elle a le droit de demander le divorce. Il est évident cependant que si elle ne possède aucun moyen de subsistance, son choix reste limitée. De plus, la pression sociale est telle et les coutumes sont si bien ancrées qu’il lui est difficile de prendre une orientation conforme à ses propres désirs personnels.
Les facteurs explicatifs de la polygamie
Qui dit polygamie dit davantage de femmes mariées que d’hommes. Mais, contrairement à des idées encore largement répandues, y compris en Afrique, la polygamie ne résulte pas d’un excédent naturel des femmes au sein de la population et pas davantage d’un célibat définitif d’une partie importante des hommes.
L’explication est ailleurs. Le mariage des femmes est précoce (18- 20 ans), celui des hommes tardif (25- 28ans), l’homme attendant d’avoir des ressources financières suffisantes pour convoler en justes noces. Ce décalage de 5 à 10 ans met en rapport un effectif de jeunes filles à marier qui peut être supérieur de 15 à 30% à celui des hommes cherchant une épouse.
De plus, le Sénégal est, rappelons le, un pays musulman à 90 % dans lequel le célibat des femmes est vécu comme une situation d’attente.
Les normes religieuses, en effet, valorisent le statut d’épouse et le célibat définitif féminin est quasi inexistant Aussi, après divorce ou veuvage, les femmes se remarient d’autant plus aisément que les hommes, même déjà mariés peuvent les épouser ce qui ouvre différentes voies à la polygamie.
Les autres facteurs explicatifs sont à la fois:
– d’ordre économique (valeur productive des femmes et des enfants, surtout en campagne)
– religieux (Islam)
– social (prestige de l’homme)
– politique (pouvoir des hommes et des aînés).
Polygamie et évolution.
Un certain nombre de changements se produit au sein du pays.
Avec l’accentuation des difficultés économiques, l’aspiration à une famille de taille élevée diminue. La solidarité familiale étant la clé de voûte de la famille sénégalaise, plus la taille en est grande, plus ceux qui réussissent à s’en sortir ont des contraintes et des obligations envers ses membres.
Cependant, abandonner la polygamie suppose un autre fonctionnement de la société et une remise en cause du pouvoir des hommes sur les femmes. Ce système matrimonial, en effet, ,est source d’inégalité: il donne plus de droit à l’homme qu’à la femme, plus de pouvoir au riche qu’au pauvre qui pourra avoir plus de femmes et tirer profit de leur travail et de celui de leurs enfants ( surtout en campagne). Il tend à exclure l’enfant né hors mariage.
Réflexions personnelles.
Il est difficile pour une femme occidentale d’exprimer une quelconque opinion dans la mesure où notre société qui fonctionne sur la monogamie ne semble pas toujours être un modèle performant.
Combien de femmes, par exemple , suite à un divorce se retrouvent seules sans moyens de subsistance? Combien d’enfants sont perturbés parce que déchirés entre leurs deux parents? Et combien de pères sont privés de leur progéniture qu’ils aiment? Les séparations sont devenues trop fréquentes et bien des couples à la moindre crise ou anicroche choisissent de se séparer plutôt que d’analyser sereinement la situation et de l’affronter.
Sur ce plan là, il est possible que la société sénégalaise offre davantage de stabilité à la famille et surtout aux enfants (sauf ceux nés hors mariage), mais au détriment de la femme sur qui l’homme exerce toujours une pression par cette possibilité qu’il a d’en prendre une autre à tout moment.
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[Anonyme]