Ville de Dakar, hier lundi, en fin de journée. Dans les rues, les rues, les jeunes, détendus, s’accordent un moment de répit, en attendant la tombée de la nuit. A 19H, plus que deux tours d’horloge avant que les rues ne se vident du fait du couvre-feu. En attendant, les échanges qui portent pour la plupart sur l’affaire Sonko sont trés animés, souvent houleux. Pourtant, la plupart de ces jeunes ignorent que celle qui tout est arrivé, a habité dans le coin. << Faites-vous discret >>, conseille un informateur qui a guidé nos pas vers le domicile des proches d’Adji Sarr du nom de cette fille âgée d’une vingtaine d’années qui accuse Ousmane Sonko de l’avoir violée sous la menace de deux armes. Arrivé au coin d’une rue, une maison étage se dresse. << C’est là-bas, moi je m’arrête ici >> et sans attendre, il nous tourne le dos. dans la maison des Sarr, c’est l’un des garçons qui nous accueille. Une maison bien entretenue où la discussion va se dérouler juste dans le couloir, car avec la pandémie, on hésite à ouvrir son salon à un inconnu. L’objet de la discussion connue, elle va trés vite se dérouler sur les chapeaux de roue. En effet, chez les Sarr qui ont un temps, accordé le gite à Adji, on est surpris de la voir mêlée à une affaire qui secoue la République. Dans la maison, depuis l’éclatement de cette affaire, le téléphone n’a cessé de sonner. << On nous appelle de partout et nous sommes aussi surpris que tout le monde >>, confient-ils. Pour eux, Adji doit bien avoir changé entre-temps. << Elle était joviale, mais également craintive, elle pouvait s’affoler pour un rien >>, souflle M.Sarr qui témoigne que la vie d’Adji Sarr n’a pas toujours été un fleuve tranquille.
Née d’une mère cantatrice dont le talent était unanimement reconnu par les férus de lutte et de Ngoyane (chants populaire), Adji Sarr n’a pas beaucoup vécu avec sa génitrice décécée alors qu’elle venait de souffler ses 6 bougies. << Sa mère était une voix d’or qui avait le don de galvaniser les lutteurs, notemment à Adrien Senghor, l’ex arène de lutte >>, se rappelle la tante d’Adji Sarr, encore sous le choc. Sa mère décédée, vivant éloignée de son père, elle sera ballotée entre plusieurs familles, d’où certainement son instabilité. << Elle venait et partait comme elle voulait >>. Et on souffle que dans l’une des familles qui l’ont accueillie, son passage ne s’est pas déroulé sans heurts. << Elle avait changé entre-temps. Devenue têtue, bagarreuse, elle n’hésitait pas à faire le mur chaque fois qu’elle était punie >>. C’est ce caractère de fille qui ne se laisse pas marcher sur les pieds que la rue va surtout retenir d’Adji Sarr. << On ne veut pas la traîner dans la boue, surtout maintenant qu’elle a des problèmes, mais il faut reconnaître qu’Adji n’est pas une sainte >>, confie un garçon, la vingtaine, croisé dans la rue qui mène au domicile des Sarr. << …Et quand elle a un objectif, elle ne se fixe pas de limites pour l’atteindre, malgré son jeune âge >>, conclut le garçon.
Son pater qui vit également dans la même commune à Pikine, non loin de la maison de ses proches qui l’avaient recueillie, est connu comme un pêcheur. << Un honnête individu ne badine pas avec la rigueur et qui, sans nul doute, doit avoir mal de voir sa fille citée dans une telle affaire, même si elle se dit victime >>, témoignent des garçons. Tous craignent que l’affaire Adji Sarr ne soit une << souillure >> que sa famille va devoir traîner comme un boulet pendant longtemps encore.