Ils ont tenté, au péril de leur vie, de neutraliser le tueur fou qui tirait méthodiquement contre hommes, femmes et enfants dans les mosquées de Christchurch. Au lendemain du drame, la Nouvelle-Zélande leur rend hommage tandis que des familles sans nouvelles cherchent toujours désespérément des informations sur leurs proches.
La douleur de toute la communauté musulmane, mais aussi de tout un pays écoeuré et inconsolable, est immense. Mais au milieu de la tristesse, le courage de certains héros qui ont tenté de mettre fin au massacre redonne espoir. L’un d’eux, Naeem Rashid, a ainsi payé de sa vie sa tentative d’arracher l’arme du tueur: Brenton Tarrant a aussitôt abattu le courageux Pakistanais, qui a succombé un peu plus tard à l’hôpital. Naeem Rashid était employé de banque au Pakistan et était devenu enseignant après son déménagement à Christchurch. Son fils Talha, 21 ans, qui l’avait accompagné pour prier à la mosquée, a lui aussi péri dans l’attaque.
Naeem Rashid et son fils ont été tués © DR.
Si Naeem Rashid s’est élancé sans hésiter sur le tireur australien mais sans succès, la bravoure de Haji Daoud Nabi, 71 ans, doit également être saluée. Le septuagénaire a utilisé son corps comme bouclier pour sauver un jeune ami des balles que tirait sur lui Brenton Tarrant. Son fils Yama, qui était dix minutes en retard pour la prière du vendredi, est arrivé en plein chaos. « Ramazan m’a dit deux fois que mon père lui avait sauvé la vie. J’ai cru comprendre qu’il l’avait aidé à s’échapper, mais je ne l’ai plus jamais retrouvé ».
Vu qu’aucun hôpital ne pouvait lui donner de nouvelles de son père, Nabi a décidé de visionner l’insoutenable vidéo de la fusillade tournée par l’auteur. C’est là qu’il a vu le corps sans vie de son père, criblé de balles. « J’ai dû revoir les images plusieurs fois pour être certain que c’était bien lui », explique son fils éploré.
Le septuagénaire était un ingénieur pensionné originaire d’Afghanistan. En 1977, il avait été l’un des premiers Afghans à émigrer pour la Nouvelle-Zélande. Il avait cinq enfants.
Haji Daoud Nabi © DR.
Quant à Sayyad Milne, il était avec sa mère à la mosquée comme chaque vendredi. L’adolescent de 14 ans faisait partie des portés disparus. « Officiellement, on ne m’avait rien dit, mais finalement quelqu’un est venu me voir pour me dire qu’il avait vu son corps sans vie. Il est sûr et certain que Sayyad est mort ». « Mon bébé avait dû se battre pour survivre toute sa vie, dès la naissance. Mon petit soldat courageux. Qu’il ait été abattu par un tireur qui ne se soucie de rien ni personne est intolérable », a expliqué le père en larmes au New Zealand Herald. L’homme a perdu son épouse simultanément.
Après des heures d’incertitude, un témoin a confirmé au père de Sayyad Milne, 14 ans, que l’enfant n’avait pas survécu © Sayyad Milne.
Husne Ara Parvin, 42 ans, a été tuée en voulant sauver son mari en chaise roulante. « La mosquée est composée d’une zone pour les femmes et pour les hommes. Lorsqu’elle a entendu les tirs, elle a couru vers lui pour lui éviter le pire. Malheureusement, elle n’est pas arrivée jusqu’à lui », raconte son cousin Mahfuz Chowdhury. Son mari, Farid Uddin, a finalement miraculeusement survécu à l’attaque grâce à la solidarité d’autres personnes présentes dans la mosquée qui l’ont mis en sécurité rapidement.
Husne Ara Parvin © DR.
Sans nouvelles de lui, la famille de Lilik Abdul Ahmid a lancé un avis de recherche sur Facebook dans l’espoir que quelqu’un l’ait vu être acheminé vers un hôpital de la ville. Mais finalement, un autre témoin leur a confirmé sur le réseau social l’avoir vu se faire abattre. « Il a été la victime d’un animal terroriste. Tous les musulmans prient pour vous », leur a-t-on confié.
© DR.
Mais bien d’autres familles sont aujourd’hui dans une incertitude morbide. Un imam d’une mosquée de Minneapolis affirme par exemple que des témoins lui ont appris la mort de son cousin de quatre ans. Un imam respecté à Christchurch, trois Egyptiens et trois Jordaniens auraient également trouvé la mort. Mais les proches attendent des confirmations officielles de leur décès.
On ne sait pas non plus ce qu’il est advenu de Mucad Ibrahim, trois ans. Il était à la mosquée avec son grand frère Abdi et son père. Ce dernier a fait le mort pour échapper au tireur, Abdi s’est enfui le plus vite possible de l’édifice religieux et personne n’a vu ce qui était arrivé au petit garçon. « Plus personne ne l’a vu, personne ne sait rien mais nous supposons tous désormais qu’il n’a pas survécu », confient-ils.
Un médecin palestinien qui avait rejoint Christchurch pour s’y installer il y a 23 ans fait également partie des portés disparus. Il était venu en Nouvelle-Zélande se construire un avenir plus doux. « Et maintenant… l’atrocité », sanglote son épouse Hanan.
Personne ne sait où se trouve Mucad Ibrahim, trois ans © DR.
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