Nécrologie : le sculpteur sénégalais Ndary Lô est décédé

Plusieurs fois primé à la biennale de Dakar, collectionné bien au-delà du Sénégal, l’artiste s’est éteint à Lyon le 8 juin des suites d’une longue maladie.

Les bras levés vers le ciel, au pied du Palais des Papes, sous le ciel bleu d’Avignon, l’homme de métal offre à tous les passants, sans distinction, une Prière universelle. « J’ai fait un personnage immense ouvert sur le ciel, ouvert au monde, ouvert à Dieu. Il est en prière, les bras levés, mais je voulais une prière universelle. Dieu sait, je n’ai pas à expliquer », déclarait le sculpteur sénégalais Ndary Lo à Marion Brousse, qui le rencontre en 2002 pour les besoins de son mémoire, à propos de cette monumentale oeuvre en fers à béton exposée aujourd’hui dans le Sud de la France. Musulman pratiquant qui entendait mettre sa sculpture « au service de la religion », l’artiste est décédé le 8 juin 2017 à l’hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon, où il était soigné depuis plusieurs années pour un cancer du foie.

Un homme de prix

Né en 1961 à Tivaouane, Ndary Lo passe une partie de son enfance dans les environ de Thiès puis, après des études d’anglais, suit une formation à l’Ecole nationale des Beaux-Arts de Dakar. Au détour des années 1990, il choisit comme matériau de base le fer et se lance véritablement dans la sculpture – remportant en 1995 le prix du concours des arts du Goethe Institut de Dakar. Ce n’est que le début d’une longue série de récompenses saluant des œuvres élégantes et engagées : Prix de la jeune création contemporaine africaine à la biennale de Dakar en 1996, Grand prix du chef de l’État pour les Arts en 1999, Grand Prix Léopold Sédar Senghor à la Biennale de Dakar en 2002 et en 2008, etc.

Fasciné par le mouvement, Ndary Lo veut « galvaniser l’homme africain ». « Mes sculptures, je les appelle nit (qui signifie personnage en wolof). Je ne sais pas consciemment vers où elles marchent mais ce qui est important pour moi, c’est leur mouvement. Je suis obnubilé par le mouvement, il faut que cela bouge », soutient-il à Marion Brousse. Reconnaissables entre mille, ses silhouettes métalliques ne sont jamais immobiles ou pétrifiés, elles avancent, s’élancent, s’élèvent, s’envolent même parfois.

Ousmane Sow le considérait comme un fils

« Ndary Lo était un artiste, mais aussi un homme merveilleux, affirme Béatrice Soulé, qui fut la compagne d’Ousmane Sow. Depuis ses premiers hommes qui marchent, il avait beaucoup évolué vers des installations qui n’avaient jamais rien de gratuit, telle sa première installation lors de Regards sur cours à Gorée dans les cachots d’une ancienne esclaverie où ses tout petits personnages fourmillaient partout, grimpaient aux murs, créant une impression de malaise. Ousmane l’avait soutenu dès ses débuts, et bien que pratiquant un art très différent, il le considérait comme son fils. Ndary l’appelait père. Il lui a offert généreusement plusieurs de ses œuvres, et fait son portrait. Les dernières larmes d’Ousmane, c’était après le dernier coup de téléphone échangé avec Ndary, qu’il savait condamné, peu de temps avant son propre décès. Je n’ai vu Ousmane pleurer que trois fois en plus de vingt ans… »
Avec Jeune Afrique

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