<< Cana dou bayi >>, << Cana dou khalat >>, << Bandit dou khess >>, << Thiokoli brain >>, << Thiokoto boy >>, << Sama tantaa >>, << Ouscuto, silence >>…Avec ses jeux de mots aussi cocasses qu’insolites dans « Infidèles », on aurait dit qu’il est né pour amuser la galerie. Ce n’est pas tout à fait ça ! Mouhamed Sall alias Capo a plusieurs cordes à son arc. Il est entré dans le cinéma par effraction et son jeu d’acteur, son humour décalé ont fini par prendre le dessus sur toutes ses autres casquettes. Infographe de formation, c’est un passionné du Rap qui a à coeur de défendre son concept selon lequel, << il faut toujours croire en soi >>.
En terminale, exclu définitivement, il vend du café devant la porte de l’école et décroche son Bac en candidat libre
Une fois que les rideaux s’abaissent sur lui, c’est un autre << Capo >> que l’on découvre. Beaucoup plus calme et posé, loin du teigneux mécano couvert de suie qui règne en trouble-fête dans l’atelier mécanique de son oncle. Un rôle qui lui va comme un gant et qui a réussi à le propulser au-devant de la scène. Parmi les acteurs incontournables de la série » Infidèles « , rien ne laissait présager qu’il deviendrait ce personnage attachant et hilirant à la fois. Pas plus qu’il allignerait si bien les blagues potaches et les repliques improbables. Sous ces faux airs de joyeux drille se cache en réalité un homme pas du tout déchainé ou incontrôlable. Du moins cette époque est révolue depuis son enfance. Au temps où il était encore un gamin têtu qui marchait à l’instinct et déjouait l’autorité de ses parents. Plutôt que d’aller à l’école, le natif de Kaolack s’arrangeait toujours pour sécher les cours et aller faire du Roller, du Break-dance ou poser ses lyrics sur les rythmes saisissants du Hip-Hop. Dernier né (en 1991) avec son jumeau d’une fraterie polygame de plusieurs enfants, il avait de bonnes aptitudes en classe. << Même si je n’étais pas assidu et turbulent à l’école, je m’en sortais bien >>, avoue-t-il. Son père affecté à Thies, il a été élevé à la dure par une mère très à cheval sur les principes et a très tôt compris qu’il lui fallait se battre pour réussir dans la vie. Même s’il se prend souvent la tête avec ses professeurs au point de récolter en pleine année scolaire, qui plus est en Terminale, une exclusion définitive. N’empêche, il ne baisse pas les bras lorsqu’il a fallu décrocher son Bac. << J’avais eu un problème avec notre professeur de Maths car, je détestais cette matière. C’est comme ça qu’ils m’ont exclu définitivement. Et, comme l’école venait de commencer, ma mère m’avait remis de l’argent pour que je puisse m’inscrire dans une autre école. C’est comme ça que je suis venu à Dakar acheter des produits pour le commerce de Café. Et je le revendais devant la porte de l’établissement où j’étais exclu. Je m’étais également inscrit à l’Alliance franco sénégalaise de Kaolack où je suivais des cours du soir en Anglais, Philosophie et Français. J’ai eu mon Bac en candidature libre >>, raconte-t-il, le sourire en coin.
Du Break-dance au Rap
En parrallèle à ses cours, le jeune homme avait aussi entamé une carrière de danseur. C’est en 2008 qu’il s’y met véritablement et se construit une petite notoriété qui va grandir 7 ans plus tard avec la sortie d’un Mixtape (Cana dou bayi), qu’il signe en collaboration avec ses acolytes << Malkapone et Mélokan >>. Son nom de scène à lui est MTM ( Mohamed the messenger) et à eux trois, ils forment les << Three M >>. Leur objectif est de faire une musique positive et consciente, histoire d’éveiller les consciences, même si le Rap est un divertissement. Convaincu qu’il va réussir dans ce domaine, le jeune homme persévère avec ses compères et devient une sorte de star locale dans son fief. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir la tête sur les épaules. Il faut dire que son éducation religieuse y a été pour beaucoup. Issu d’une famille Tidiane, c’est un Baye Fall dans l’âme. Séduit par la confrérie Mouride, il va l’adopter et devenir un fervent disciple de Mame Thierno << Borom Darou >>. << J’ai fréquenté Chikory qui avait une cellule à Kaolack. Avec les Baye Fall, j’ai parfais mon éducation religieuse et j’ai aussi beaucoup appris de la vie. J’ai tout fait avec eux, ce qui a contribué à me forger une certaine carapace >>, Révèle Mouhamed. Après l’obtention de son Bac, il suit une formation en Infographie pendant trois ans. En 2018, il débarque à Dakar pour un concert en compagnie de sa bande. Aprés leur show, par le plus grand des hasards, il rencontre le lendemain, au détour d’une rue, des employés d’une chaine télé. << Après le concert, alors que j’avais passé la journée chez ma grande soeur à Sipres, je suis sorti faire le tour du quartier. C’est ainsi que j’ai aperçu l’immeuble de la Sen-Tv. J’ai vu des agents et je leur ai demandé s’il n’avait pas besoin d’infographe et que j’en étais un. J’ai laissé mon contact et, par la suite, ils m’ont appelé pour faire le test que j’ai réussi. J’ai passé là-bas deux années, avant d’attérir à Even Prod, en tant que monteur.
<< Le cinéma pour plus de visibilité >>
A partir de là, tout va s’accélérer pour le bonhomme. Pour mieux booster sa carrière de rappeur, il convaint le directeur d’Even-Prod, Ibou Gueye, de le laisser jouer dans la série « Infidèles « . Sans trop de peine, ce dernier accepte et lui donne le rôle sur mesure de << Capo >>. << J’avais besoin de visibilité. Et quand nous avons lancé » Infidèles », je suis allé personnellement voir le producteur afin qu’il me laisse jouer afin de booster ma carrière de rappeur. Car avant « Infidèles », j’avais certes composé des sons pour la série « Moeurs », mais personne ne savait que c’était moi qui les avais chanté >>, souligne-t-il. Chemin faisant, il devient l’un des acteurs les plus en vue de la fiction. Son style impressionne autant que sa capacité de se fondre dans le personnage. Il est aimé et adulé sur les réseaux sociaux. Ses termes atypiques sont repris par les jeunes. Un tel succés, Mohamed ne s’y attendait pas du tout, il révèle : << J’ai joué naturellement. Et en plus de cela, sur le plateau, la direction artistique et quelqu’un comme Assane que je remercie au passage, m’ont beaucoup aidé à me remettre sur les rails. Je me rapelle, la première fois sur scène, je voulais les impressionner, mais ils m’ont dit de jouer naturellement.>> Au-delà de la visibilité qu’il recherchait, le célibataire sans enfants s’est également fait un nom et découvert un nouveau penchant pour le cinéma. Si bien qu’il compte y interpréter d’autres grands rôles. On attend de voir, ce qu’il adviendra du « Capo »!