Macky Sall : le puéril président et, le péril étatique

  1. « Plus l’espérance est grande, plus la déception est violente » (Franz-Olivier Giesbert). Cependant, à l’opposé de Sénèque pour qui « la déception est bien moins pénible quand on ne s’est point d’avance promis le succès ». C’est sans doute, parce que notre espoir de succès était énorme, que nous avons plus de répugnance à l’égard du président de la République. Puisque, nous ne pouvions penser qu’une fois aux affaires, ses actes seraient aux antipodes de ses promesses et, discours de campagne de candidat.

 

  1. MackySall, élu nous nous attendions à un président souverainiste qui protège notre pays de tout et, qui privilégie l’intérêt général. Car, né après les indépendances, selon l’argument de marketing politique naguère avancé et abandonné depuis, par ses partisans. Il symbolise avec ses reniements, renoncements, et dédits, la désillusion personnifiée pour la majorité de tous ceux qui ont cru en lui, lors des élections présidentielles de l’année 2012. En effet, après ce que nous avions connu, sous les présidences de Senghor, Diouf et Wade, nous pouvions légitimement penser et, espérer que la nouvelle génération de politiciens, dont il est l’archétype, serait plus patriote et plus encline, à la démocratie, à l’équité, à l’éthique, à l’Etat de droit et, au développement du pays.
  1. Ainsi, lorsqu’il nous promettait « un gouvernement sobre et vertueux » ou encore « la patrie avant le parti », il faisait implicitement et, quelque fois explicitement référence à la probité et l’exemplarité, relativement, à la situation politique d’alors. Loin de toute raison c’est-à-dire sans réfléchir, beaucoup, d’entre nous, avaient à juste raison, adhéré au discours tenu et véhiculé, par MackySall candidat. Las, déçus, et pressés de refermer les pages du magistère du Président Abdoulaye Wade, nous avions été conquis, par de telles paroles de rupture, empreintes d’assurance et de franchise, mais encore, prononcées avec beaucoup de verves.

 

  1. Le Sénégal pays du verbe, MackySall nous a pris dans notre propre dialectique du langage. Ainsi, la vertu et la probité souvent prononcées, lorsqu’il était candidat à la présidence de la République et peu après son élection, n’étaient que des éléments de communication, présentement disparues de son lexique politique. Toutefois, sans minimiser ou, minorer, la percussion dont il avait fait l’objet avant les élections présidentielles de l’année 2012, cette situation a décuplé notre empathie pour lui. Au-delà de son discours novateur et porteur, cela a annihilée ou neutralisée notre lucidité et, une partie de notre capacité de discernement, pour avoir trop cru en lui, en lui accordant une confiance immodérée, ceci expliquerait pour beaucoup, la rudesse de notre désespérance.

 

  1. Pour le porter à la tête de l’Etat en 2012, ensemble nous avions vaincu, tant d’anfractuosités, en pensant, que certaines pratiques appartiendraient à jamais à l’histoire, mais encore, notre démocratie allait être consolidée. Mais, entouré et conseillé, par des « diplodocus » de la politique sénégalaise, véritables captateurs de rentes (Moustapha Niass, Ousmane TanorDieng, DjiboLeyti Ka…) ; la gestion douteuse de l’Etat, l’affairisme, le clientélisme, et la corruption vont hélas survivre, volant ainsi au peuple son rêve de changement et, de rentrée dans une nouvelle ère démocratique.

 

  1. MackySall manque substantiellement de vision et, une capacité à prioriser les besoins de la Nation, sans doute, par incompétence notoire, ou pour causes de jeunesse d’esprit et de vision limitée. Avec des investissements et réalisations plutôt somptuaires ou, encore des dépenses irréfléchies et mal engagées, qu’il faudra rembourser durant plusieurs décennies. A titre d’exemples, avec toute la technicité afférente au projet de construction et de réalisation, de l’autoroute entre la ville d’Agadir et celle de Marrakech, puisqu’une partie du tronçon de l’autoroute est un tunnel creusé sous la montagne. Il convient de relever, les 233,5 km dudit autoroute marocain ont couté au Maroc, 471 milliards de francs CFA. Et pendant, le même temps, l’autoroute « Ila Touba », qui est de 133 km, sera payé 418 milliards de francs CFA.

 

  1. De même, le Train à Grande Vitesse (TGV) du Nigéria d’une longueur de 187 km, est payé à 552 milliards de francs CFA, alors que, Train Express Régional (TER) d’une longueur d’au plus 57 km, va coûter au peuple sénégalais, 563 milliards de francs CFA. Sans oublier l’arène de lutte ou tant d’autres réalisations, aucunement nécessaires à la vie des populations. Nul n’aurait à discuter leurs utilités (immédiates) si entre autres, la majorité des jeunes avait une formation, ou un emploi, et que la plupart des sénégalais mange à leur faim, se soigne facilement et, à coût moindre, ou si la sécurité ne faisait cruellement défaut, surtout dans la Région de Dakar. Selon nous, notre pays classé parmi les plus pauvres du monde, devrait hiérarchiser les dépenses à engager, en fonction des réels besoins de la société. Et, cela pourrait découler d’une analyse vraiment pertinente, préalablement réalisée pour tout budget d’investissement, ce qui n’est nullement le cas, avec pareils projets ainsi financés.

 

  1. Contrairement à ce qui est entendu, chez certains après la manifestation du 7 avril 2017, la réussite d’une manifestation ne dépend pas seulement, ou ne doit pas être réduite ou limitée aux nombres de personnes ayant participé à celle-ci, d’autant que le peuple s’est massivement déplacé. Le jugement ou l’appréciation doit aussi porter très objectivement sur les fondamentaux des causes, à savoir la consistance des revendications portées et véhiculées. A notre avis, le mouvement « Y EN A MARRE » a remporté son pari, et le message des amis de Fadel Barro est passé, tout le reste n’est que subterfuge ou enfumage, du pouvoir pour se rassurer.

 

  1. La jeunesse est le baromètre (politique, économique, social…), de toute société, honni soit le dirigeant politique qui n’en fait pas la primauté de ses objectifs. Et la manifestation du 7 avril 2017 tendrait à confirmer, des ressentis très négatifs se traduisant en défiance de la jeunesse, à l’égard de l’Etat/APR. Pourtant, beaucoup de personnes qui ont manifesté leurs mécontentements (le 7 avril 2017), pour dénoncer entre autres, la gabegie, le favoritisme, le clientélisme, ou le népotisme, s’étaient pleinement investies dans le combat pour faire partir le président Abdoulaye Wade en 2012 et porter MackySall à la magistrature suprême. Donc, toute condamnation ou toute critique de cet acte citoyen serait inopérante, d’autant que, les promesses ou, engagements qui les avaient convaincus à le soutenir et, à œuvrer pour son élection en 2012, ont été sciemment violés ou, remisés à jamais.

 

  1. En pré-conclusion, nous voudrions saluer et, se féliciter de la visite rendue à Khalifa Sall à Rebeuss, par le Président Idrissa Seck (le 10 avril 2017). Pour un prétendant à la présidence de la République, sa démarche n’est nullement anodine, pour le pouvoir et, pour la personne visitée. Il nous semble qu’elle (la visite) s’inscrit dans ce que nous avions dénoncé, à savoir l’utilisation de la police et, de la justice à des fins politiciennes, surtout comme outils de répression, de menace ou de persécution au profit de l’exécutif, pour régler des comptes politiques. De même, elle tendrait, implicitement, à montrer que l’arbitraire et, la manipulation n’ont plus place dans notre démocratie. Parce que, de tels faits et actes ne sont nullement acceptables dans un Etat de droit, d’autant que le Chef de l’exécutif se montre dure, avec ses adversaires politiques, mais très compréhensif, voire trop complaisant avec ses partenaires.

 

  1. La seule manière démocratique, de mettre un terme au péril étatique, en limitant ou en freinant les dérives et, nullités de MackySall, serait de donner la majorité (même relative) à l’opposition politique. C’est-à-dire, voter et faire voter massivement au mois de juillet 2017 (aux élections législatives), pour les listes de la coalition de l’opposition, qui ne sont pas des clones de l’APR (Alliance Pour la République) et de ses partenaires. Avec un tel vote, MackySall va devoir cohabiter, seul moyen de préparer démocratiquement sa retraite du pouvoir en 2019, et d’anéantir sa politique clientéliste, affairiste et de recul du pays.

 

 

Daouda N’DIAYE

Juriste/Analyste politique

Article dédié à Papa Samba DIENG

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