Malgré les bonnes prestations du célèbre duo de micros centraux, Hyppo Ngary et Ibou Ndiaye Niokhobaye, la profession a perdu de sa superbe. Les préposés aux louanges des promoteurs et autres célébrités y font légion. Alors qu’à l’époque des anciens champions, les animateurs s’en chargeaient, permettant aux lutteurs de puiser dans leurs dernières réserves.
A l’origine, le micro central n’existait pas d ans la lutte. Les animateurs faisaient de présentateurs, mais sans plus. «Ils citaient juste les noms des lutteurs en opposition. La plupart du temps, c’est à travers leurs chansons qu’on les remarquait. Ils étaient beaucoup intéressés à exhorter les lutteurs à se surpasser qu’à vouloir se faire des sous comme cela se passe aujourd’hui», informe une
vieille gloire de l’animation.
Boy Bambara, ancien champion de lutte estime qu’à son époque, l’accent était plutôt du côté des chants qui les dopaient. «On ne pouvait pas parler de micro central à notre époque, mais les chargés de l’animation avait une culture profonde de la lutte. Ils essayaient de tirer aux lutteurs le meilleur d’eux. En ce qui me concerne, Khar Mbaye Madiaga était ma source d’inspiration. Quand elle entonnait sa chanson fétiche, khaaroo yalla, je ne voyais plus personne devant moi. Aucun lutteur ne pouvait résister à ma puissance», se rappelle-t- il, larmes aux yeux.
A l’en croire, il n’était pas le seul dans cette situation assez complexe entre le lutteur et le préposé au micro. «C’était le cas avec Mbaye Guèye qui, avec Samba Yandé Ngaane, devenait un tigre. Il avait cette rage de vaincre. Maintenant, je n’en vois plus lors des combats et c’est dommage», regrette le manager de l’Ecole de lutte Boy Bambara.
Dupont et Dupond
Les plus mythiques micros centraux de l’arène sont Ibou Ndiaye Niokhobaye et hyppo Ngary. Ils sont plus remarqués sur leurs talents de «comédiens» et de «demandeurs» d’argent, même s’ils se défendent d’être les mieux notés de la classe. «On doit bien vivre de notre art, mais je vous assure que nous, on a un vécu qui nous permet de retracer l’histoire de lutte. On a assisté à tant de choses que, modestie à part, on n’a pas de concurrents. Ceux qui s’y hasarderont laisseront des plumes à coup sûr», réplique Ibou Ndiaye Niokhobaye. La forte emprise de cette paire complice, même en dehors du terrain, ne laisse qu’une miette de place aux autres micros centraux.
Ces derniers sont devenus, à force de louanges et de «wayaane» la tête de turc du public qui n’hésite pas à les siffler. «Hyppo Ngary et Ibou Ndiaye Niokhobaye sont le moindre mal des micros centraux. Au moins ils maîtrisent leur sujet, avec une bonne présentation et une connaissance excellente de l’histoire de la lutte. Les derniers venus sont beaucoup plus griots qu’autre chose. Ils ne font que chanter les louanges des autorités et des organisateurs», se plaint un supporter de Fass, fan des envolées de Niokhobaye, «Aythia, aythia, aythia».
Défis
Cependant, l’un des plus célèbres micros centraux de la place a des ambitions et n’a pas peur de se lancer dans des défis. Amener les cachets de sa profession à hauteur de ce qui se fait le mieux chez les lutteurs. «Vous pensez que c’est normal que l’on gagne des miettes ? Alors que les lutteurs, les promoteurs se tapent des centaines de millions. Nous, on peut ne pas se plaindre car on est les mieux payés, comparés aux autres. Nos cachets varient entre cinquante et cent mille francs, tandis que les autres micros centraux ne touchent qu’entre dix et quinze mille francs. On aimerait à l’avenir gagner beaucoup plus et par rapport aux affiches, revoir le modus opérandi des cachets», dit-il.
Il poursuit, avertissant la relève. «Ceux qui viennent doivent penser d’abord à se documenter, avoir une bonne locution car nous, on a été à l’école d’abord. Avoir ensuite une bonne connaissance de la lutte. A partir de là, l’expérience va s’acquérir d’elle-même», prévient-il.
Le concept
A les regarder se produire lors des combats, petits ou grands, d’aucuns pensent que le boulot de micro central est une partie de plaisir. Niokhobaye étale un parfait plan d’organisation avec une bonne planification. «Après avoir pris langue avec le promoteur pour les modalités financières, l’on demande, outre la grande affiche, les noms des lutteurs pour les combats préliminaires. Là un
travail de fourmi s’impose car on va vers l’information pour connaitre le parcours de chacun de ces lutteurs. Palmarès, origine du lutteur sont indispensables pour parler de lui. On ne peut dire des choses de quelqu’un sans le connaitre. Ensuite, c’est un jeu d’enfant de présenter le lutteur lors de son touss. Mais avec le nombre important de combats, l’on n’a plus assez de temps pour faire une bonne présentation de l’intéressé qui permet au public de savoir des choses sur lui», argue Niokhobaye.