Lettre ouverte au president macky sall

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Sous le régime du Président Abdoulaye Wade, tous les travailleurs de l’administration qui gagnent cent mille francs (100.000) FCFA ou plus, ont été obligés de se bancariser. Les banques ont applaudi et ont sauté sur l’occasion. Depuis lors, elles se sont enrichies de manière exponentielle, pendant que les populations, elles, s’appauvrissent, sans horizons clairs.

Les Sénégalais, lettrés ou illettrés, font, depuis lors, l’objet de vols, d’arnaques ou autres formes de violences financières, sans que ça n’émeuve les autorités qui, logiquement, devaient s’intéresser à la relation banque-travailleurs. Les travailleurs sont laissés à la merci des mauvaises pratiques bancaires qui font des victimes psychologiques et sociales, malgré les instructions de la BCEAO en 2014.

Les prêts, les services, tous les services bancaires, aussi bien les banques classiques que les mutuelles d’épargnes et de crédits, sont payants. Messages, lettres d’informations, documents de mouvements de compte, etc. Des services souvent non rendus. Je ne me souviens pas du dernier message (sms) de ma banque m’informant du virement de mon salaire. Les messages hebdomadaires ont tout simplement déserté mon téléphone. Et portant, mon compte est débité pour ces services. J’imagine que je ne suis pas le seul à en souffrir.

Pour soulager les populations non protégées du « terrorisme financier » des institutions financières, des sSénégalais se sont courageusement constitués autour de l’Association des clients et sociétaires des institutions financières (Acsif). Ils revendiquent la fin de l’exploitation des pauvres sénégalais par les banques. L’Etat est là, regarde sans agir en faveur du peuple ou équilibrer.

L’Acsif défend, comme elle le peut, malgré les menaces, les intimidations, les tentatives de violences morales et psychologiques, les sénégalais bancarisés. Mais le principal défenseur des sénégalais, l’ETAT, semble être du côté des banques et mutuelles. Car l’acsif aurait pu être, si l’Etat était honnête et sincère, une occasion sur laquelle sauter et faire cesser les mauvaises pratiques bancaires. Non. Il l’encourage.

J’en veux pour exemple le dernier essai de sensibilisation de l’Acsif, le 16 novembre 2015, au rond-point cyrnos. L’Etat a tout simplement dispersé les manifestants par « les forces de l’ordre établit », avec des grenades lacrymogènes. L’Etat a interdit à des gens qui se sentent volés, de ne pas dire « halte aux vols des banques ». Les médias l’ont traité comme un fait-divers, insolite. L’alerte est envoyé depuis plus d’un an par l’acsif, sans récepteur de l’autre côté. L’Etat encourage les banques contre le peuple.

« Souffrez, ne criez pas, ne pleurer pas…subissez », semble dire l’Etat à son pauvre peuple, ou « allez dos au mur, si vous protestez, je vous brime ». Le peuple ne se sent pas protéger. Et c’est grave. C’est d’autant plus grave qu’un lapin sans soutien ni solution finit par grimper ou entrer dans un trou, pour ceux qui savent lire entre les lignes. Sinon, j’explique. Quand le peuple ne se sentira plus en sécurité (financière), quand il sentira qu’il ne peut rien attendre de son premier protecteur, l’Etat, il le fera lui-même.

Les attentats de Bamako, que je déplore et condamne, ont fait subitement réagir Macky Sall, après ceux de Paris bien entendu, sans oublier la marche pour Charlie Hebdo. Je comprends le déplacement du président Sall à Bamako pour manifester sa solidarité au peuple malien. Je salue l’acte et je m’y associe. Seulement je ne comprends pas l’indifférence du même président face à la souffrance et aux cris de détresse de sénégalais qui ne réclament qu’une « meilleure justice sociale ».

Demain, quand toutes les pistes de solutions seront épuisées, les clients et sociétaires, laissés à eux-mêmes, livrés aux banques, se défendront par leurs propres moyens. Enseignants, employés d’usines, gardiens, vigiles, commerçants, journalistes… et j’en passe, n’en peuvent plus. Le peuple, désorienté, usera alors de solutions individuelles ou collectives pour se faire entendre.

Pour rappel, en Tunisie, c’est l’expression d’un ras-le-bol d’un seul vendeur de fruits, à l’intérieur du pays, qui a précipité le départ du président Ben Ali. La suite on la connait. Vous me direz que ça n’arrivera pas au Sénégal. Je le souhaite aussi, sous condition. A la condition que l’Etat entreprenne des actions pour arrêter la saignée des citoyens au profit des banques. Au même titre que la réaction face à la menace terroriste. J’applaudis pour les milliards annoncés pour notre sécurité face à une menace qui viendrait d’ailleurs. Il nous faut gagner le combat intérieur, celui d’apaiser les cœurs des citoyens. Et ça ne coute pas des milliards. Une volonté politique.

Si un coup de fil des renseignements généraux français ont conduit à l’arrestation de l’Imam Ndao, les appels au secours internes des victimes des banques doivent être entendus et suivis d’effets réels, concrets. L’insécurité ce n’est pas simplement les menaces de groupes armés, c’est aussi quand le peuple se sent abandonné et qu’il sente la nécessité de se protéger, seul. Et puisque l’argent est le nerf de la guerre, il faut agir en amont pour nous éviter des financements alternatifs parallèles risqués. Et les passerelles ne manquent pas, vous en savez mieux que moi, Excellence. Car si la banque de la justice sociale est en banqueroute, une autre est prête à la racheter.

Mamadou Lamine BA

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