Pour renforcer la stabilité sociale et la performance du secteur du tourisme et des transports aériens, le Gouvernement souhaite signer avec la Fédération des organisations patronales de l’industrie touristique du Sénégal (Fopits) et les Organisations professionnelles des travailleurs (Opt), un pacte national pour une durée de 5 ans. Mais, en entendant la rencontre avec leur ministre de tutelle, prévue dans la semaine, le patronat du tourisme rejette le pacte tel que présenté.
Ils sont à bout de nerfs. Leur mécontentement est général. En concertation, jeudi dernier, pour examiner le «pacte national de stabilité sociale et de relance du secteur du tourisme et des transports aériens», le patronat de l’industrie touristique n’est pas convaincu par ce plan de sauvetage de l’Etat. Au terme d’une chaude rencontre entre professionnels, le patronat de l’industrie touristique a manifesté toute son indignation sur ce projet de relance de leur secteur. La rencontre qui a duré plusieurs heures, a enregistré la présence des icônes du secteur comme Mamadou Racine Sy (président du Conseil sénégalais du tourisme), Mamadou Sow (Vice-président du Fopits), Boubacar Sabaly (Sg du Syndicat d’initiative et de tourisme), Moustapha Kane (Sg du Syndicat patronal de l’industrie hôtelière du Sénégal) et Issa Barro (président des syndicats d’initiative et de tourisme de Fatick), entre autres.
Pour réduire les impacts de la crise sanitaire liée au coronavirus, le Gouvernement du Sénégal ouvre une nouvelle ère dans son appui au secteur privé du tourisme et des transports aériens, en souhaitant conclure un accord avec les acteurs du secteur pour garantir les emplois et les outils de travail. Mais en contrepartie de son appui financier, l’Etat exige aux employeurs de maintenir et sauvegarder tous les emplois pendant toute la durée de mise en œuvre du pacte. Le pacte vise ainsi à renforcer la stabilité sociale et la performance du secteur du tourisme et des transports aériens pour faire du Sénégal une destination touristique de rang mondial et un hub aérien leader dans la sous-région. Mais cela ne semble pas convaincre le patronat du secteur touristique. Sans activité depuis dix mois, le patronat de l’industrie touristique déchire le pacte national de stabilité sociale et de relance du secteur du tourisme et des transports aériens.
«Près de 50 000 emplois menacés»
D’après des informations de L’Observateur, le patronat du secteur du tourisme qui va rencontrer son ministre de tutelle dans la semaine, ne manquera pas de manifester son désaccord sur le pacte. «Comment l’Etat peut nous demander de préserver l’emploi sans se soucier de la relance de l’entreprise. Ce n’est pas raisonnable. L’emploi c’est notre source de productivité, donc c’est à nous de nous battre pour maintenir nos employés. Personne, ni le Gouvernement, n’est mieux placé que nous pour préserver nos employés dont nous connaissons la qualité et la productivité. Mais comment peut-on nous demander d’emprunter pour préserver des emplois, alors qu’on ne se soucie pas de notre productivité. On n’est pas preneur de ce pacte tel que présenté», confie une source de L’Observateur. Au cœur du comité de négociation, notre interlocuteur fait savoir que l’Etat demande à l’employeur de ne pas licencier d’ici à cinq mois pour bénéficier de la ligne de crédit mise à disposition.
L’Etat s’engage, entre autres, à mettre à la disposition des entreprises des secteurs du tourisme et des transports aériens une ligne de crédit domicilié dans les livres d’une banque partenaire d’un montant de 50 milliards de FCfa. Cette allocation vise, entre autres, à renforcer la trésorerie des entreprises pour leur permettre de faire face à leurs charges récurrentes, à soutenir la reprise des activités des entreprises, à travers le financement d’investissements, dans un contexte de relance marqué par une promotion accrue du tourisme interne. Mais pour le patronat du secteur touristique, l’Etat ne prend pas en compte l’entreprise au cœur du dispositif d’accompagnement. Pour eux, l’entreprise doit être au cœur du dispositif de résilience. «On ne peut pas nous demander d’aller emprunter pour financer des charges non productives. C’est absurde. Nous sommes depuis 10 mois sans activité et on ne sait pas pour quand ça va finir. Et maintenant l’Etat nous exige de signer un pacte qui garantit de préserver les emplois pour 5 ans pour pouvoir bénéficier d’un financement. On ne peut pas l’accepter», prévient notre interlocuteur. Non sans faire comprendre que ce sont des centaines de milliers d’emplois qui sont sous menace. «Au Sénégal, dans l’hôtellerie, nous sommes à 915 réceptifs, plus de 1 000 agences de voyage et de tourisme, des milliers de restaurants. C’est donc près de 50 000 emplois qui sont menacés», ajoute-t-il.
«Une dette de 2 milliards FCfa pour l’hébergement des cas Covid»
Durant cette période difficile de crise sanitaire où les réceptifs hôteliers ne voient pas de clients, certains hôtels qui avaient accepté d’héberger des cas Covid peinent à entrer dans leurs fonds. «Dans le cadre de l’hébergement des personnes infectées par le Covid, il y a beaucoup d’hôtels qui ne sont pas encore payés. Le ministère des Finances nous dit qu’il a décaissé, alors que celui de la Santé nous dit qu’il n’a pas encore reçu l’argent. Alors que l’Etat nous doit près de 2 milliards FCfa et personne ne répond à nos appels», déplore un responsable du secteur touristique. En attendant de rencontrer sa tutelle, le patronat de l’industrie du tourisme demande la mise en œuvre des directives présidentielles concernant le mémorandum signé avec le président de la République.
FALLOU FAYE
(L’OBS)