la rivalité entre Youssou N’Dour et Coumba Gawlo ne date pas de 2016, celle de Youssou et Thione Seck a toujours existé

musicinafrica.net Décidément, la star planétaire Youssou N’Dour et la diva Coumba Gawlo Seck semblent condamnés à ne jamais s’entendre. C’est un secret de polichinelle que les deux étoiles de la musique sénégalaise se détestent cordialement ; c’est à peine s’ils se tolèrent quand ils se croisent à l’occasion des grands événements à Dakar. Les deux musiciens nous ont encore donné une illustration de leur grande inimitié.

Radioscopie de LA polémique estivale au sommet de la musique sénégalaise.

S’il est fréquent d’entendre un rappeur sénégalais dire fièrement, avec des allures d’une petite frappe tout droit sorti du Bronx, que le clash fait partie de la culture Hip-hop et que par conséquent sa pratique ne saurait être une mauvaise chose, il est aussi fréquent d’entendre un chanteur Mbalakh, musique nationale sénégalaise, dire tout le bien qu’il ne pense pas de son collègue.

C’est connu, les Mbalakhmen sont plus sensibles à cet art d’arrondir les angles, très utilisé par les Sénégalais dans leur langage : le « Masla », que le docteur es Lettres, spécialiste de la littérature orale Massamba Guèye, définit ainsi : « une attitude positive de bienséance, qui permet à la personne de pouvoir négocier tous les conflits, toutes les situations, […] la capacité de bien vivre avec les gens, de les tolérer et de se faire tolérer », plutôt positif tout ça, non ? même si cette attitude est aujourd’hui prise par certains pour de l’hypocrisie.

Ce que j’en pense, moi ? Je ne saurais dire, je constate seulement, comme vous, que les Sénégalais sont les champions olympiques toutes catégories du « Masla » : s’il y avait eu, cette année à Rio, une épreuve « Masla » il est assuré que nous ne serions pas rentrés bredouilles du Brésil ; Phelps, Bolt et le couple des boxeurs français auraient été battus à plates coutures ! (bref, je me perds là)

Donc, quand une star de la trempe de Coumba Gawlo Seck foule aux pieds cet art national et s’attaque frontalement au roi du Mbalakh, Youssou N’Dour, le tollé est général et les nombreux sites peoples du pays en font leurs choux-gras jusqu’à l’overdose !

Les reproches de Coumba Gawlo

Au Sénégal, le ministère de la Jeunesse, de l’Emploi et de la Construction citoyenne organise pendant les grandes vacances scolaires les « Vacances citoyennes » qui se proposent, selon Mbaye Niang, le ministre de tutelle, de « donner aux jeunes l’opportunité de mettre à profit la période des vacances pour contribuer davantage à l’œuvre de la construction nationale, par la participation à des actions ou prise d’initiatives individuelles et collectives de haute portée citoyenne et républicaine ». Bref tout un programme, doté d’une enveloppe de 350 millions XOF pour la participation d’au minimum 500 000 jeunes. Et avec 8 concerts à travers le Sénégal.

Et pour ces 8 concerts, quelle tête d’affiche ? Je vous le donne en mille : Youssou N’Dour ! (Il faut cependant se rappeler que le ministre Mbaye Niang, s’adressant à l’Assemblée Nationale, avait laissé entendre que la star s’était engagée à accompagner gratuitement le chef de l’État, Macky Sall, dans sa politique en faveur de la jeunesse.)

Mais cela n’empêchera pas Coumba Gawlo Seck de déclarer, lors d’un entretien dans un quotidien : « J’estime que les vacances citoyennes sont mal organisées. Il est inadmissible d’en confier l’animation à une même personne (Youssou N’Dour) deux ans de suite. Ce n’est pas normal ! J’estime que tout un chacun devrait être en mesure d’apporter sa contribution au développement de ce pays. Si j’avais été associée aux vacances citoyennes (…) j’aurais dit aux concernés qu’ils ont adopté une démarche contreproductive et je leur aurais soumis de pertinentes pistes de réflexion. Ce qui aurait éventuellement conduit les autorités à adopter une démarche participative et inclusive ».

La réponse de Youssou N’Dour

Youssou N’Dour, grand seigneur, n’a pas vraiment voulu alimenter la chicane, même s’il a tenu à apporté des éclaircissements et souligné son désintéressement, expliquant que son unique but était de soutenir son ami, le Président Macky Sall pour l’émergence du Sénégal ! « Ne me parlez pas de polémique », dira-t-il à son entourage.

Toutefois, il aura été très difficile de ne pas remarquer que certains employés de la radio et de la télé du Groupe Futurs média, propriétés de Youssou N’Dour avaient déjà, à la place de leur patron, fait la sale besogne en traitant Coumba Gawlo Seck de tous les noms…

Et le ministre lui-même, certainement en tant que grand fan de Youssou N’Dour, s’est cru obligé de défendre la star attaquée par la diva aux griffes dorées.

 

La rivalité « You – Coumba »

Il est de notoriété publique que la rivalité entre Youssou N’Dour et Coumba Gawlo ne date pas de 2016 ; même si elle est latente et moins flagrante que celle de Youssou et Thione Seck, par exemple, elle a toujours existé.

D’ailleurs, comme l’explique Saliou N’Dour dans Industrie musicale au Sénégal, étude d’une évolution, cette tension n’est pas le fait de quelques individus, mais bien plus générale : « Le développement de l’industrie musicale n’a pas favorisé l’entente et l’unité dans le secteur. En effet, en raison des enjeux économiques et sociaux, liés à la rentabilité du secteur et au prestige social, des relations conflictuelles divisent les différents acteurs ».

Et pourtant, on se rappelle avec bonheur, qu’en 2014, à l’occasion de son anniversaire au Grand Théâtre de Dakar, la diva avait invité le roi ; et les personnes présentes ce soir là, avaient eu droit à un duo rarement entendu dans les annales de la musique sénégalaise. Un duo inédit et enchanteur qui intervenait après plusieurs années de brouille entre les deux artistes.

Quoi qu’il en soit, il semble que la guerre froide soit repartie de plus belle entre nos deux artistes. On pourrait même donner raison à ceux qui avançaient que le calumet de la paix fumé en grandes pompes lors de l’anniversaire, n’était que de façade, puisque le cessez-le feu n’a pas tenu vraiment longtemps…

Néanmoins, il n’est pas interdit, à la veille de la fête de la Tabaski, de souhaiter, selon les propres paroles de Youssou N’Dour dans son titre « Tabaski » : « Bou Tabaski jotté, ba niou reddi xaar ya, na nieup nianalanté, keerok beuss beu kepp kou la tonione nanko bale » où il conseillait de faire la paix avec son ennemi, qu’à l’occasion de l’Eid el Adha, deuxième plus importante célébration de la religion musulmane, l’harmonie se rétablissent dans les rapports entre nos deux grandes vedettes nationales.

Je me souviens que Coumba Gawlo Seck également, sur son titre « Cool », conseillait d’adopter la cool-attitude face à l’adversité : « Bou khol bi féssé na nga cool… »

Mettre en pratique sa musique, pour un roi ou pour une diva, ne serait-ce que de temps à autre, ça ne ferait pas de mal, ne pensez-vous pas ?

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