Au delà des péripéties et des rebondissements qui mettent à nu le dessous des cartes et la duplicité des certains acteurs des négociations pour ramener la sérénité, considérons la crise Burkinabé comme un jalon de plus dans le processus de maturation des contradictions post coloniales. L’expression des espérances populaires trahies par les élites qui se succèdent à la tête des États africains dessinés à Berlin, sans la présence d’un seul africain, se précise. Le véritable fond du problème étant que, tant que nous n’aurons par restructuré la carte africaine en fonction des dynamiques historiques et sociales de nos identités véritables, nous continuerons à consolider le dispositif d’asservissement du projet colonial et à ramer à contre courant des aspirations de nos peuples.
Au regard du tollé général soulevé au cœur de la jeunesse africaine, par les péripéties de la crise burkinabé, il est heureux de constater la nette progression d’une conscience de plus en plus aiguë des véritables enjeux qui confinent l’Afrique dans un no man’s land politique et économique . Il est, au demeurant, de plus en plus évident que les idéologies importées, présentées, comme libératrices, étaient en fait partie intégrante du mécanisme d’asservissement intellectuel qui a empêché nos élites de fournir un effort intellectuel conséquent pour concevoir des outils de réaction appropriés. Après cinquante cinq ans d’illusions perdues, le temps du réveil est proche et la désapprobation unanime, de ce énième scénario éculé de bâillonnement du Peuple Burkinabé, est un signe que quelque chose de fondamental est en train de changer.
Le rôle des réseaux sociaux, sous ce rapport, mérite que l’on s’y arrête. Il faut se rendre compte que les réseaux sociaux deviennent une arme qu’il nous faut maîtriser et retourner désormais contre tous les ennemis de l’Afrique. Au regard de l’ampleur de la prise en charge du soutien au Peuple burkinabé par le dévoilement au grand jour de toutes les tentatives de détournement de sa volonté, il apparaît que la guerre de libération de l’Afrique se joue désormais dans ces espaces que ne peuvent brider aucune dictature. Il n’est plus besoin de rentrer dans le maquis pour exprimer son opposition à l’ordre établi et le combattre. Les voix traversent les frontières et peuvent converger pour mutualiser les énergies et les moyens en vue de changer l’ordre établi. Les réseaux sociaux sont un « champ de bataille »qui convoque l’intelligence et la créativité. À nous d’investir ce champ avec talent et panache pour engager la mobilisation des africains, et des véritables amis de l’Afrique, en vue de prendre en mains le destin de notre continent.Nous pouvons y partager les idées et les informations, aménager des espaces de fraternité et d’engagement à l’échelle planétaire, construire à partir de la des synergies inédites. Les réseaux sociaux, et plus généralement internet, sont donc une opportunité pour briser les frontières héritées de la colonisation. Il faut s’en saisir. Plus généralement, les NTIC sont des outils auxquels il faut donner du sens pour la construction de l’unité africaine et son développement. Ce sont des contenants dont nous devons définir les contenus dans le sens de la libération des énergies créatrices des africains ayant une haute idée de l’Afrique et déterminés à lui construire un nouveau destin.
C’est l’une des leçons que je tire des récents événements du Burkina-Faso, pays des hommes intègres qui venge encore et encore, Thomas Sankara, en se mobilisant afin que germe la graine du refus qu’il a plantée dans leurs cœurs.
« La patrie ou la mort! Nous vaincrons! « disait-il…Thomas hantera encore longtemps le sommeil de ses tortionnaires!
Amadou Tidiane WONE
Ancien Ministre