La transparence de l’information financière est une grosse équation au Sénégal. C’est l’une des principales conclusions qui ressort de la restitution de l’étude sur les normes et pratiques en matière de comptabilité et d’audit au Sénégal faite par une équipe de la Banque mondiale. Selon cette étude, il existe au Sénégal, des entreprises qui produisent trois bilans. «Un bilan pour la banque qui montre des profits généreux. Un bilan pour la fiscalité qui montre des pertes et un vrai bilan qui se situe entre les deux», révèle Renaud Seligmann, responsable du département de la gouvernance région Afrique, à la Banque mondiale. Pour l’économiste en chef, «cette situation porte préjudice aux intérêts de la stabilité du secteur financier, à la fiscalité, à la mobilisation des ressources internes ainsi qu’à la qualité de gestion des entreprises et à la création des emplois». Il propose comme solution l’unicité du bilan, ce qui selon lui, permettrait à tout un chacun, en toute transparence de savoir quel est le bilan et les résultats d’une entreprise qui a été auditée par un commissaire aux comptes. Renaud Seligmann propose également, une autre solution, la dématérialisation de la centrale des bilans. Celle-ci, suggère-t-il, «pourra être disponible en ligne pour que chacun puisse connaître la vraie situation financière des entreprises qui produisent ce bilan».
Manque d’ouverture de l’Ordre des comptables
Comme autre faiblesse de l’information financière, l’étude montre qu’il y a des problèmes dans la structure et l’ouverture de la profession de comptable et d’audit au Sénégal et dans d’autres pays francophones aussi. Le Sénégal compte entre 160 et 170 personnes membres de l’Ordre pour environ 14 millions d’habitants, alors qu’au Ghana, on compte 3 800 membres de l’Ordre. Expliquant cet écart, l’économiste en chef à la Banque mondiale pour la région Afrique souligne que dans notre pays, seuls les membres de la profession qui exercent à titre libéral sont membres de l’Ordre. Contrairement au Ghana, où l’Ordre s’ouvre aux membres de la profession d’experts comptables qui exercent dans le secteur privé ou bien dans l’industrie, la finance, les banques ou dans le secteur public. Là aussi, il souhaite l’ouverture de la profession à l’ensemble des personnes qui constituent la chaîne de production de l’information financière. Pour lui, cela renforcerait le poids de la profession et donnerait davantage de ressources financières et une assise plus importante, davantage de crédibilité. Concernant le volet de la formation continue, l’étude révèle qu’il faut pour une profession comptable de qualité que les experts comptables réalisent 40 heures de formation continue par an. Et le Sénégal n’est pas encore à ce niveau.