Le maire de Dakar, Khalifa Sall est en train de se faire violence pour engager un combat politique à visage découvert. Longtemps il a joué à cache-cache avec ses militants et surtout avec lui-même. Raison pour laquelle il a été accusé de manquer de courage et cela lui colle à la peau maintenant : « Khalifa Sall est un poltron », « il n’est pas courageux », « il louvoie » etc. Jusqu’à ce que lui-même, dans ses dernières sorties médiatiques a cru bon d’affirmer qu’il ne « connaissait pas la peur ».
Mais alors pourquoi il se dérobait à chaque fois et repoussait l’affrontement inévitable avec la hiérarchie du PS ?
AC a voulu en savoir un peu plus et a mené l’enquête pour édifier les uns et les autres. Sans parti pris !
Première surprise nous découvrons que le maire de Dakar élu en 2009 et réélu en 2014 était citoyen français jusqu’au 15 février 2016, date à laquelle il a renoncé à sa nationalité française.
Il était détenteur d’une CNI (carte nationale d’identité française) numéro : 051280201374 délivrée le 27 décembre 2005 valable jusqu’au 26 décembre 2015. Et d’un passeport français numéro: 05PK389180 délivrée le 30 décembre 2005 ET valable jusqu’au 29 décembre 2015.
Comment avait-il eu cette nationalité française? Etant né le 1er jour de l’An 1956 à Louga, donc avant l’indépendance du Sénégal il est français de naissance. Ou a-t-il acquis cette nationalité à la suite de son mariage avec Gaelle SAMB dont la mère est française ?
Autre question : pourquoi Khalifa Sall a-t-il conservé sa nationalité française aussi longtemps pour y renoncer il y’a tout juste un an ? Le débat sur la nationalité française de Karim Wade qui avait agité le landerneau politique sénégalais l’avait-il effarouché ?
C’est très probable mais il y a aussi l’ambition présidentielle certainement. Il aurait dû y penser mais la vérité crue est que Khalifa Sall n’a jamais envisagé une telle hypothèse jusqu’à récemment.
En l’absence de sondages, les rumeurs et les murmures l’ont peut-être convaincu qu’il avait une carte à jouer. Surtout après ses victoires surprises de 2009 et 2014 à la mairie de Dakar et les mairies d’arrondissement de la capitale sénégalaise.
L’échec du référendum et le sursis des élections pour le Haut conseil aux collectivités territoriales(HCCT) ont refroidi ses ardeurs.
S’il sort du bois maintenant c’est contraint et forcé pour essayer de montrer qu’il défend ses collaborateurs comme le maire de la Médina Bamba Fall et son propre directeur de cabinet en mandat de dépôt suite à l’affaire des agressions du mois de mars 2016 à la maison du parti socialiste.
Soit dit en passant : le mois précédent Khalifa Sall avait renoncé à sa nationalité française.
Pourtant la seule course éventuelle à la présidentielle ne semble pas être la motivation première de l’édile de Dakar pour se débarrasser de sa nationalité française. Il y’a surtout l’affaire explosive du financement de sa campagne par l’ex-patron de l’Athlétisme mondial, Lamine DIACK. Ce dernier est mis en examen en France et interdit de sortie du territoire.
Interrogé sur ce « financement » de sa campagne pour les élections municipales de 2009 et 2014, Khalifa Sall botte en touche en affirmant : « il a cotisé mais n’a pas financé la campagne ».
MENACE JUDICIAIRE
Question: à quelle hauteur a-t-il cotisé ?
En attendant de creuser cette question, il est permis de faire remarquer qu’une telle déclaration pourrait intéresser la justice française. Et si d’aventure c’était le cas, Khalifa Sall pourrait être convoqué pour être entendu en France.
Cette possibilité éclabousserait le maire de Dakar et politiquement cela lui causerait de très grands torts. Afrique Confidentielle est en mesure d’affirmer que cette éventualité est débattue en ce moment même par les enquêteurs.
Khalifa Sall a certainement senti le danger et s’est donc débarrassé de sa nationalité française pour éviter d’être appréhendé dans un aéroport hexagonal ou européen même s’il voyage avec un passeport diplomatique sénégalais auquel il a droit en tant que maire et surtout ancien ministre de la république du Sénégal.
En effet s’il avait encore sa nationalité française, il pourrait être interpellé même s’il était en possession d’un passeport diplomatique car la nationalité française aurait prévalu et annihilerait une éventuelle immunité. Il pourrait toujours y avoir une exception mais il est plus rassurant de se prémunir.
Cependant le fond de l’affaire est de savoir combien Lamine DIACK a mis sur la table comme « cotisation » ? Et à quel titre a-t-il cotisé? La mairie de Dakar est-elle une tontine ?
Si Lamine DIACK est un parrain, ancien maire de Dakar lui-même, quelle est la contrepartie de son soutien ? Cette affaire est celle qui fait vraiment peur à Khalifa SALL. Lorsqu’elle avait éclaté, des accusations avaient fusé de partout mais avaient été vite démenties. Khalifa Sall n’avait pas été encore mis sur la sellette. A-t-il pris les devants pour se délester d’une nationalité française devenue « dangereuse » ?
Le débat est ouvert même si une autre menace plane sur le maire de Dakar dont les proches collaborateurs sont entre les mains de la justice. S’ils craquent et l’enfoncent; il est perdu. Parce qu’on peut se demander comment son propre directeur de cabinet peut-il être impliqué et que lui soit blanc comme neige ?
D’ailleurs il affirme que c’est lui qui « est visé ». Pourquoi ? Les enquêteurs de la redoutable DIC (division des investigations criminelles) ont pris le temps depuis mars 2016 pour accumuler des preuves et dévoiler la machination qui aurait pu très mal se terminer.
C’est pourquoi la direction du PS a porté plainte et que des personnes sont traduites en justice. Khalifa Sall est affaibli mais n’est pas encore mis en accusation personnellement pour le moment. Mais, il a conscience que la menace avance à grand pas. Politiquement sa position déclarée de rester coûte que coûte au parti socialiste et de faire liste à part pour les législatives et de devenir candidat à la présidentielle de 2019 est un défi impossible à relever.
Il sera exclu et combattu rudement par Ousmane Tanor Dieng qui a déjà sonné la charge avec ses « boys ». La bataille va être sanglante politiquement parlant. Le temps de l’ambiguïté pour Khalifa Sall est terminé. Qui avait dit qu’« on ne sort de l’ambiguïté qu’à ses dépens » ?
Le maire de Dakar et ex-citoyens français résident au 33 rue Jeanne d’Arc à Amiens est face à un combat difficile. C’est le combat de sa vie politique. À 61ans, il ne peut plus attendre. AC continue l’enquête.
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